Le cloître est le cœur d’une abbaye. Alors que beaucoup de cloîtres ont disparu, souvent suite à la Révolution française, certains sont restés intacts à ce jour. Ou, du moins, subsistent malgré quelques malheureux réaménagements. Plus particulièrement, les cloîtres de Lorraine figurent parmi les plus beaux de France. Petit exposé des 10 plus beaux cloîtres dans la région…
Qu’est-ce qu’un cloître ?
Un cloître est généralement de plan carré. Il comprend quatre galeries couvertes et fermées qui protégeaient les passants de la pluie ou du soleil.
D’un côté, la galerie est adossée au bâtiment, de l’autre, des colonnes de pierres souvent ouvragées la supportent.
Ces galeries entourent une cour ou un jardin intérieur. Au centre se trouve parfois un puits et des bancs de pierre.
Selon l’importance que le cloître revêt, il est souvent très soigné et décoré.
Le cloître est une sorte de carrefour. Il dessert d’autres lieux communautaires d’une abbaye : l’église, la salle du chapitre, la bibliothèque, le réfectoire, le dortoir, etc.)
Le cloître donnait aux moines un espace pour se rencontrer et échanger, car il n’était pas soumis au silence, contrairement à d’autres parties d’une abbaye.
D’où vient le mot “cloître” ?
La première mention du mot “cloître” date du 11e siècle. D’après le rabbin Rachi (vers 1040-1105) le cloistre s’appliquait à un “portique couvert encadrant la cour intérieure d’un couvent”.
On retrouve le mot au 12e siècle dans un texte chrétien cette fois, signifiant “enceinte” puis “monastère” au 13e siècle.
Il semble que le mot français dérive du latin claustrum “serrure, barrière”, que l’on rapproche à un “lieu clos”.
Le cloître au moyen-âge
Aujourd’hui, on associe le cloître au moyen-âge.
C’est d’ailleurs à cette époque que l’on construit les premiers cloîtres près des églises, dans les monastères.
Puis, plus tard on les retrouve presque systématiquement adossées au mur de la nef des cathédrales ou des grandes collégiales.
Beaucoup de cloîtres n’ont pas survécu à la Révolution française ou aux aménagements urbains engagés autour des cathédrales. C’est le cas par exemple du cloître qui jouxtait la nef de l’église Saint-Maurice à Epinal.
Ceux qui subsistent aujourd’hui en Lorraine sont des merveilles de l’art gothique, avec leurs gracieux piliers, colonnettes et chapiteaux sculptés.
La symbolique du cloître
Le cloître porte une valeur symbolique. Ainsi, “le cloître représente la contemplation dans laquelle l’âme se replie sur elle-même, et où elle se cache après s’être séparée de la foule des pensées charnelles, et où elle médite les seuls biens célestes”.
Les quatre pans du cloître symbolisent quatre murailles :
- le mépris de soi-même,
- le mépris du monde,
- l’amour du prochain et
- l’amour de Dieu.
La base des colonnes se réfère à la patience.
Le jardin fleuri au centre du cloître évoque le paradis terrestre, ou le jardin enclos (hortus conclusus) relaté dans le Cantique des Cantiques (chapitre 4, verset 12).
Le cloître de la cathédrale de Toul est un bel exemple de ce jardin enclos (ou paradis terrestre) où trois mondes se côtoient :
- le monde végétal à travers les éléments sculptés sur les chapiteaux ainsi que les consoles de la frise bordant la toiture.
- les mondes animal et humain par les gargouilles et les modillons.
De plus, dans le jardin d’Eden se trouve un fleuve où coule “l’eau de la vie”.
Ainsi, à Toul, celui-ci est marqué par le puits au centre du jardin. De lui partent quatre allées, symbolisant les quatre bras secondaires du fleuve : le Tigre, l’Euphrate, le Pishon et le Gihon.
Les 10 plus beaux cloîtres de Lorraine
Lorsque je visite un cloître, j’aime y consacrer du temps à admirer de près les détails : les décors des arcades avec leurs gables, colonnettes et chapiteaux, ainsi que les voûtes des passages couverts et leurs clés.
Pour vous aider à découvrir les cloîtres de Lorraine, j’en ai dressé une petite liste de 10 exemples.
► Si vous connaissez d’autres cloîtres de Lorraine qui ne figurent pas sur la liste, écrivez-les en commentaire (en bas de l’article) !
Cloître de la cathédrale de Verdun
Le cloître de la cathédrale de Verdun jouxte le flanc sud de la cathédrale. Il se trouve sur un emplacement très ancien, ce que révèle la porte romane qui donnait accès à la cathédrale.
Il comprend trois galeries d’un périmètre total de 87 mètres :
- celle de l’est (début du 14e siècle) conserve trois baies intérieures qui donnaient sur la salle capitulaire.
- les deux autres galeries (1509-1517) sont de style flamboyant.
Les galeries sont couvertes de voûtes à réseau.
Le cloître abrite quatre statues restaurées remontant au 12e siècle. Celles-ci représentent Adam et Ève, l’Annonciation, Caïn et Abel, et un évêque (peut-être Saint Saintin).
Cloître des Récollets à Metz
Peu de touristes à Metz connaissent l’existence de ce havre de sérénité au cœur de la ville, sur la colline Sainte-Croix.
Elégant et simple à la fois, le cloître des Récollets date du 13e siècle. Il faisait partie d’un ancien couvent médiéval de l’ordre des Cordeliers. En 1602, l’ordre des frères mineurs récollets s’y installa.
Observez la voûte des galeries : ce sont des poutres en bois.
La 4e galerie du cloître fut détruite en 1804. Aujourd’hui, le cloître donne accès à l’Institut européen d’écologie et aux archives municipales de la ville de Metz.
Dans les galeries, on peut observer un gisant et des pierres tombales enchâssés dans les murs du cloître.
Deux jardins y ont été aménagés :
- le jardin des simples (plantes médicinales non toxiques que les moines utilisaient pour soigner les malades)
- le jardin des plantes toxiques (plantes dangereuses servant de matière première à la préparation pharmaceutiques de médicaments).
Cloître de l’abbaye Saint-Clément à Metz
Ce cloître appartenait à l’abbaye Saint-Clément, une ancienne abbaye bénédictine qui occupait les lieux du 11e siècle à 1791.
Dans la seconde moitié du 17e siècle, l’ordre religieux engagea des travaux de reconstruction des bâtiments conventionnels et de l’église abbatiale. Ainsi, le cloître actuel date de 1669.
De style classique, il arbore des touches baroques italiennes. Dans le jardin du cloître, un puits à baldaquin est orné des Quatre Vertus cardinales : la Force, la Prudence, la Tempérance et la Justice.Depuis 1983, l’abbaye accueille le siège du conseil régional de Lorraine. De ce fait, il n’est possible de visiter le cloître que lors des journées du patrimoine.
Cloître Saint-Maur à Hattonchâtel
C’est le plus petit cloître de notre sélection : le cloître de l’église Saint-Maur flanque l’église de Hattonchâtel, un joli village lorrain perché au-dessus de la plaine de Woëvre.
Ce petit cloître date de 1328. A l’origine, trois galeries composaient le cloître. Une seule subsiste aujourd’hui.
Cloître de l’abbaye des Prémontrés à Pont-à-Mousson
Les bâtiments actuels de l’abbaye des Prémontrés de Pont-à-Mousson datent de 1705-1735. Ce bel exemple d’architecture monastique aux proportions classiques et au style baroque occupe une superficie de 12 000 m2.
Le cloître est fermé par trois galeries vitrées formant un U.
Depuis 2009, le jardin du cloître accueille le jardin des Senteurs. Il se compose de plantes et de fleurs entrant dans la composition des parfums.
Le jardin associe la rigueur d’un jardin à la française à l’exubérance d’un jardin anglais. Il bénéficie d’un entretien entièrement manuel et écologique. On peut avoir une vue d’ensemble du jardin en montant aux étages par un des magnifiques escaliers.
Cloître de la cathédrale de Toul
Le cloître de la cathédrale de Toul date du 13e siècle.
Les travaux commencèrent en 1240 par la galerie est, de style gothique rayonnant (voir les grandes baies ouvertes en tiers-point et les beaux chapiteaux à feuillages). Les travaux du cloître s’achevèrent avant la fin du 13e siècle.
Le cloître s’ouvre sur le jardin par de grandes baies en tiers-points formées de deux lancettes surmontées de trois oculi béants.
Les murs des galeries sont ornés d’arcatures trilobées selon le style champenois.
Le cloître de Toul passe pour le 2e plus grand de France. Je ne sais pas si cette affirmation est vraie. En tout cas, il fait certainement partie des plus vastes :
- la galerie est mesure 65 mètres de long (10 travées)
- la galerie sud fait 40 mètres (6 baies)
- et la galerie ouest fait 52 mètres (8 travées)
Pour comprendre la taille importante de ce cloître, il faut se souvenir qu’au moyen-âge, l’évêché de Toul était l’un des plus grands en Europe occidentale.
Le puits du jardin qui symbolise le paradis terrestre :
Cloître de la collégiale Saint-Gengoult à Toul
Décidément, Toul est la ville des cloîtres !
Ce deuxième cloître est peut-être le plus beau de tous les cloîtres de Lorraine !
La construction du cloître Saint-Gengoult date de 1515-1525, à une époque où la Renaissance se propageait en France et en Lorraine.
Le cloître forme un carré presque parfait de 28 mètres de côté.
Les baies de style gothique flambloyant lui donnent beaucoup d’élégance avec leurs gâbles accentuant l’élévation des arcades.
A l’intérieur, les galeries comprennent 16 travées avec des voûtes en étoiles, ornées de liernes et de tiercerons. Les 70 clés de voûte sont en forme de médaillons décorées avec fantaisie : motifs floraux, figures, armoiries, tête de Christ…
Les galeries sont ouvertes sur le jardin à travers des fenêtres dont le gâble brisé extérieur est richement décoré de putti et de diablotins.
Les colonnes simples ou torsadées sont agrémentées de chapiteaux corinthiens avec fleurons, feuilles d’acanthe, de laurier ou des crosses.
Les plus marqués par la Renaissance italienne contiennent des mascarons, des cornes d’abondance, des rinceaux et des vasques à l’antique.
Cloîtres de la Chartreuse de Bosserville
La Chartreuse de Bosserville est un lieu chargé d’histoire.
Datant du 17e siècle, elle domine la Meurthe à Art-sur-Meurthe (banlieue sud-est de Nancy).
Depuis 1962, la Chartreuse accueille quelques 500 étudiants du complexe scolaire Saint-Michel, lequel devrait déménager à moyen terme. Avec son départ, la réaffectation de la Chartreuse est à l’étude. Il sera peut-être possible d’accéder aux deux cloîtres que renferme l’ancien monastère :- le petit cloître, qui sert de cimetière, occupe le flanc sud de la chapelle.
- le grand cloître forme un vaste carré. Les maisons (ou ermitages) des chartreux entoure le jardin transformé en verger. Si on le considère comme un cloître, il est de loin le plus vaste des cloîtres de Lorraine…
Cloître de l’abbaye Saint-Pierre de Senones
Le cloître de l’ancienne abbaye Saint-Pierre de Senones date du début du 18e siècle (1708-1710). Aujourd’hui, deux galeries subsistent : l’ouest (accès aux chambres d’hôtes) et sud (accès au réfectoire).
Le côté est flanqué de la nef de l’église abbatiale Saint Gondelbert. Le côté nord est aujourd’hui ouvert et fermé par une grille.
Au milieu du jardin, on découvre le blason de l’abbaye Saint Pierre.
Cloître de la cathédrale de Saint-Dié
Le cloître de Saint-Dié assure le passage entre deux sanctuaires : la cathédrale Saint-Dié et l’église Notre-Dame de Galilée.
Ce beau cloître en grès rose et aux larges proportions (un des plus vastes du nord-est), est cependant inachevé. La construction du cloître actuel débuta en 1444. Ainsi, les galeries sud et est seront complétées au cours des 15e et 16e siècles. Ces mêmes galeries présentent des baies en arc brisé aux motifs gothiques (arcades tréflées, quadrilobes…) Sur l’un des contreforts de la galerie orientale se trouve une chaire extérieure en pierre, datant du 15e siècle. On raconte qu’on y prêchait devant le peuple de Saint-Dié, assemblé dans la cour du cloître.Pour en savoir plus sur les cloîtres de Lorraine
Sites de référence
- Découverte du village de Hattonchâtel
- La cathédrale de Metz et ses petits secrets
- Le cloître de Saint-Gengoult de Toul sur Patrimoine-Histoire.fr
- Le site de Lorraine Tourisme
- L’article de Wikipédia sur les cloîtres en général
Une épingle des cloîtres de Lorraine pour Pinterest
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