Je vous laissais - dans mon dernier post - alors que j'arrivais chez moi, prête à entamer mes 14 jours de quarantaine réglementaire pour tout voyageur arrivant à Hong Kong. Me voilà au terme de cette épopée et en voici le récit :
Jour 1 - LUNDIMa première journée se passe plutôt bien et commence tout en douceur, malgré le décalage horaire. Je range ma valise, je fais du vélo d'appartement (ma copine F. m'a prêté le sien pour la durée de mon confinement), je me fais un programme du tonnerre et une liste de menus sains. Puis, l'après-midi, je travaille à distance pour mon école... et c'est déjà le soir. La journée a filé... et je suis tellement épuisée que j'arrive même à m'endormir normalement !
Je me rendrai rapidement compte que certaines résolutions sont comme celles du Nouvel-An... on s'y tient 3h, tout au plus !
Jour 2 - MARDILe lendemain, je commence à œuvrer pour suivre mon petit planning idéal. Le matin, je travaille pour Le Petit Journal. J'écris des articles. J'ai un meeting via Zoom. L'après-midi, je donne plusieurs cours à distance.
Entre deux activités, je nettoie l'aquarium, je fais des lessives, j'appelle une amie et mes grands-parents. Rien de bien palpitant mais tout passe rapidement.
Jour 3 - MERCREDILe mercredi, c'est un jour plus light en termes de travail. Du coup, je me lance dans un immense marathon : je vide toutes les armoires de ma cuisine et je nettoie, je range, je trie. Même si ma cuisine est microscopique, cela me prend plus de 3h au total. Je suis en nage mais très satisfaite.
J'ai cependant un souci de taille : que vais-je faire des choses dont je dois me débarrasser pendant mon séjour ?
Je suis coincée dans mon appartement et ne peux donc pas aller aux poubelles. Il va donc falloir que j'appelle Nicolas pour qu'il se charge de cette tâche agréable.
L'après-midi, j'écris un article, je fais du vélo, je prépare des cours...
Je me rends compte que ma volonté de faire une digital detox est impossible : environ 10 à 12 fois pendant la journée, mon application Stay Home Stay Safe vibre et j'ai 24 secondes pour scanner mon bracelet. C'est stressant et je suis donc obligée de me promener avec mon téléphone partout.
Podcast écouté : En tongs aux pieds de l'Himalaya
Jour 4 - JEUDILe jeudi, en plus de préparer des questions pour un interview et de donner quelques cours en ligne, je m'attelle au rangement de ma salle de bain. Je suis contente. Je tiens mon planning et je ne m'ennuie toujours pas.
J'appelle mon frère, mes parents. J'appelle mes grands-parents... je parle en ligne avec des copines. Chaque soir après le travail, Nicolas m'appelle également. Ça fait plaisir d'être enfin sur le même créneau horaire. Bref, en résumé, même si je suis seule physiquement, je ne suis pas seule.
Jour 5 - VENDREDILe vendredi, je travaille pour mon école en ligne. Puis, après plusieurs réunions, documents à remplir et compagnie... je me connecte pour mon cours de cantonais via Skype. Ouf... malgré mes 4 semaines sans pratiquer, tout revient vite !
En parallèle, je fais du vélo et je fais une liste de courses pour que Nicolas puisse venir me remplir le frigo le lendemain.
Jour 6 - SAMEDILe samedi, je me lève pleine d'entrain. C'est pourtant un jour sans travail et je devrais craindre les longues heures qui m'attendent... mais non. Nicolas me dépose tout d'abord les courses devant la porte. Puis, ensuite, dans un élan d'enthousiasme, je range, je trie, je vide, je nettoie. Bree Van de Kamp et Marie Kondo seraient fières de moi.
L'après-midi, je me repose... comme le temps est sublime dehors, qu'il fait chaud, hyper beau et que j'ai vraiment très très envie de sortir, je trouve un prétexte : je décide de faire croire à mon esprit que c'est Noël et qu'il faut cocooner dedans en buvant du thé et en mangeant des biscuits... si ce n'est pas très bon pour la ligne, ça fonctionne du feu de Dieu. Je me regarde des films de Noël. Je me fais un gâteau soupoudré de cannelle. Je suis en mini-short... mais on y croirait presque.
Téléfilm regardé : Jour 7 - DIMANCHE Christmas inheritance (Noël à Snowfalls)Je continue ma croisade contre le désordre et cette fois-ci je m'attaque à ma chambre et surtout... à nos armoires. Je trie, je plie, je suspends. Nos tiroirs n'ont jamais été aussi propres. Puis, je lis, je me détends, j'écoute de la musique... et je continue mon petit carnaval de Noël.
Jour 8 - LUNDIJ'ai déjà fait la moitié de ma quarantaine et la semaine à venir me semble surmontable.
" Retour " au boulot : je travaille pour mon école en ligne, ainsi que pour le journal. Finalement, c'est tout ce que je fais pendant cette journée et même si j'ai beaucoup à faire, ma motivation commence à fléchir.
Podcast écouté : Jour 9 - MARDI Les Baladeurs - épisode 1 - Face à face polaire dans le Grand Nord, avec Jérémie Villet Podcast écouté : Jour 10 - MERCREDI Les Baladeurs - épisode 2 - Pédalier d'enfer sur la plus haute route du monde, avec Matthieu TordeurComme à son habitude, mon bracelet ne cesse de vibrer. Je commence à en avoir marre de devoir me balader en permanence avec mon téléphone dans la main.
Le mardi, j'enseigne en ligne. Je suis un cours de cantonais en ligne. J'ai une réunion... je fais du vélo... Je commence à m'ennuyer sec ! Du coup, je range mon bureau... Ma copine M. m'appelle via Zoom et ça fait trop plaisir de lui parler !
Le mercredi, vers midi, je reçois un appel de ma grand-maman et j'apprends que mon grand-papa nous a quitté dans la nuit...
Podcast écouté : Les Baladeurs - épisode 3 - Le silence du singe araignée, avec Natexplorers & Jour 11 - JEUDI épisode 4 - Au coeur des vagues géantes de Nazaré, avec Justine DupontOn avait beau s'y préparer. Savoir que ça allait arriver. La nouvelle m'arrache quand même le cœur. Je passe l'après-midi à écrire un petit texte pour lui, puis à appeler ma famille.
C'est assez étrange de me dire que je suis là, en quarantaine coincée, à des milliers de kilomètres. Et en parallèle, je sais que si j'étais en Suisse, avec les mesures liées au Covid, je ne pourrais pas être plus présente que maintenant.
Jour 12 - VENDREDIBref, la fin de ma quarantaine se passera dans une sorte d'état second étrange... entre larmes et souvenirs.
Ce matin, je dois faire un test Covid pour savoir si je pourrai bien sortir dans quelques jours (en fait, je me rends compte que je suis au jour 12 de ma quarantaine, et non au 11ème. Le jour passé à l'aéroport comptait également en tant que tel. C'est une bonne nouvelle... je pourrai sortir dimanche matin). Je crache dans mon petit flacon, puis Nicolas vient le chercher et l'amène au centre pour qu'il puisse être analysé.
En parallèle, je passe beaucoup de temps au téléphone avec la famille. On se fait un appel groupé pour se retrouver vu les circonstances.
En parallèle, je vis un deuxième choc. Un collègue que j'appréciais beaucoup est également décédé hier. Je suis extrêmement triste.
Aujourd'hui, c'est l'enterrement de mon grand-papa. Je passe la journée à attendre dans un état un peu particulier. L'après-midi, je me prépare - comme si j'allais y aller en vrai. Je choisis de beaux vêtements, m'apprête avec soin pour rendre un dernier hommage à mon grand papa chéri, même depuis mon salon.
Jour 13 - SAMEDIMon papa a eu l'extrême gentillesse de caler un iPad sur un trépied dans l'église pour que je puisse suivre la cérémonie. C'est comme si j'y étais... et c'est très émouvant. Je pleure toutes les larmes de mon corps - et je me dis que l'éloignement a ça de bon : personne ne me voit hoqueter bruyamment.
Ça a beau être à distance. C'est très important pour moi " d'y être... ". D'avoir l'impression de vivre la même chose que mes proches, sur place. Et de me rendre compte que c'est réel. Il est parti.
Jour 14 - DIMANCHEPour des raisons de Covid, l'enterrement a lieu dans la plus stricte intimité, avec distanciation, masques... etc. Il n'y a pas de verrée à la fin. Et de ce fait, mon absence physique n'a pas d'inconvénients. J'aurai vécu " presque " la même expérience que les autres, finalement.
Pendant l'enterrement, une nuée de petits papillons sont venus me trouver et voleter devant ma fenêtre. J'aime croire que c'est mon grand papa qui me les a envoyés de là où il se trouve.
En fait, techniquement nous sommes le jour 14... puisque la première journée à l'aéroport a compté dans ma quarantaine. Je pourrai donc sortir ce soir à minuit. Je reçois mon petit sms m'avertissant que c'est tout bon - et donc que mon deuxième test est bien négatif (par la force des choses). Youpie. De plus, le typhon qui devait nous arriver dessus a finalement décidé de changer de cap et du coup, il fait un temps magnifique !
Maintenant, je dois réfléchir à ce que je vais faire demain pour ma libération ! J'ai hâte de retrouver Nicolas après 6 semaines d'éloignement.
La chanson Libérée, délivrée me trotte dans la tête. Je me retiens de la chanter même si j'en ai très envie. Au programme de la journée :
- Couper mon bracelet électronique et désactiver mon application de traçage
- Aller manger des Dim Sum pour le petit déjeuner (c'est le petit déjeuner traditionnel ici)
- Et aller me balader, prendre le soleil... bouger mes jambes, aux côtés de Nicolas !
Nous allons visiter le musée d'art, ouvert depuis peu. Puis, je réussis l'exploit de me casser la figure et de m'amocher sérieusement la jambe droite. Comme quoi, après la quarantaine, il faut aussi réapprendre à marcher.
***
Finalement, ma quarantaine se sera bien passée dans l'ensemble. C'était extrêmement agréable de pouvoir la faire à la maison. Je suis vraiment contente de mon grand nettoyage de printemps. Mais, dès à présent, toutes les nouvelles quarantaines pour les arrivants sur le territoire devront se faire en hôtel...
Sinon, comme je le disais au début de mon article, j'ai commencé ma quarantaine avec pleins d'objectifs surréalistes. Je voulais manger sainement, faire beaucoup de sport, faire une digital detox, prendre le temps de faire pleins de choses...
Finalement, ça aura été compliqué. Premièrement, pour ma digital detox, c'était impossible. Je devais me promener avec mon téléphone partout pour pouvoir scanner mon bracelet dès que l'application me le demandais. Ensuite, quand on est seul, c'est difficile de se couper de l'outil qui permet d'avoir un lien avec l'extérieur.
Ensuite, pour les repas sains, si je n'ai pas craqué et grignoté tout le contenu de mes armoires (big up to me !), je n'ai pas mangé forcément hyper sain ou de micro-portions. Le truc c'est que quand ton seul plaisir dans la journée... et le seul moyen de garder un rythme normal, c'est les repas, c'est difficile de passer outre.
Pour le sport, je m'y suis tenu même si - définitivement, le vélo d'appartement, c'est pas plus mon truc que les cours de sport devant la TV. Moi j'aime marcher, nager DEHORS, faire du yoga en groupe. Pas devant un écran ou en faisant du sur place.
Mais ça s'est bien passé. Je ne me suis pas ennuyée. J'avoue que le deuil en fin de quarantaine a été particulier. C'est bizarre de vivre ça seule, enfermée chez soi. En même temps, ça a été un temps où j'ai eu le temps de m'arrêter un moment. De prendre le temps d'accuser le choc. Je n'ai pas eu besoin de faire bonne figure. J'ai pu également prendre le temps d'appeler mes proches... et c'était important pour moi d'avoir un ralentissement me permettant de me connecter à mes proches en Suisse.
Mais voilà, la vie a repris son cours. Le cours des choses a repris, et il est désormais temps de se replonger dans le quotidien !