Depuis des années 2000, il y a un engouement pour la calligraphie vietnamienne. Du fait de son système adapté, cet art est beaucoup plus accessible à un grand nombre d’apprenants. En effet, la calligraphie vietnamienne utilise la langue romanisée plutôt que les idéogrammes chinois. Donc, c’est moins « intello » et plus ludique. Dans ce contexte, les cours de calligraphie vietnamienne étaient initialement réservées aux locaux. Peu à peu, quelques ateliers sont proposés aux étrangers. Je vous propose de rencontrer Duy Duc pour bien comprendre cette forme artistique assez méconnue dans les circuits traditionnels
A deux pas du Temple de la Littérature, nous avons aménagé un atelier qui rappelle d’une salle de cours au 19e siècle. L’atelier de calligraphie est proposé après la visite de ce temple. L’idée est de vous permettre de comprendre le modèle de réussite des Vietnamiens par le passé, avant de comprendre le rôle de la calligraphie dans la société contemporaine. Dans un cadre convivial, tout est reconstitué pour rendre une ambiance authentique de l’époque où les lettrés vietnamiens préparaient le concours mandarinal. C’est ici que vous rencontrez Duy Duc, un maître calligraphe réputé du Nord Vietnam. Autour d’une tasse de thé, il vous explique un peu son parcours académique et professionnel.
Il faut savoir que plusieurs cours de calligraphie sont proposés pour les touristes ailleurs. Cependant, ils ne sont pas tous de la même qualité, car la compétence des maîtres calligraphes n’est pas homogène. C’est un peu comme dans la médecine, il y a ceux qui passent par la voie académique officielle pour exercer le métier. Et il y a deux qui s’improvisent médecins en apprenant des trucs sur le tas. Duy Duc fait partie de la première catégorie. Pour bien maîtriser la calligraphie, ça passe d’abord par l’apprentissage des racines chinoises. Autrement dit, ce sont les idéogrammes classiques qui étaient en vigueur en Chine à l’époque féodale. Ceux qui passent par cette voie font souvent des études de langues anciennes à l’Université pendant 4 ans avant de se spécialiser dans la calligraphie vietnamienne moderne. Donc, Duy Duc est à la fois chercheur en Lettres classiques chinoises et peintre, avant de devenir maître en calligraphie vietnamienne. À la fin des années 1980, il était professeur de langue chinoise et de la calligraphie chinoise. Cet art élitiste était pratiqué dans un cercle très fermé et restreint. L’enseignement de la calligraphie était exclusivement réservé au milieu universitaire. Il a fallu attendre jusqu’au début des années 2000 pour que son éducation soit un peu plus démocratisée. C’est dans ce contexte que Duy Duc a ouvert son premier atelier en 2013, suite à l’appel d’un club des amateurs de calligraphie.
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Avec un laps de temps limité, vous découvrirez la calligraphie en survol. Duy Duc vous expliquera les différentes techniques artistiques utilisées en calligraphie vietnamienne. Habituellement, pour s’entraîner, il nous faut 04 objets : le papier, le pinceau, l’encre et l’encrier. Selon la tradition, on les appelle « les quatre trésors du cabinet d’un lettré ».
Selon Duy Duc, la seule belle écriture n’est pas suffisante pour dégager toute la quintessence de la calligraphie. Au-delà de la dextérité manuelle, il faut aussi maîtriser le souffle qui exerce la force des traits et un œil artistique. La dextérité n’est que le niveau débutant. En général, il faut compter 2 ans pour acquérir les techniques de base. Puis, vient la créativité artistique et littéraire des agencements. A cette étape, il faut 3 ans supplémentaires pour bien comprendre les subtilités sémantiques de la poésie classique et la peinture aquarelle.
Pendant l’atelier, vous apprenez plutôt les techniques de base : comment tracer des traits simples avec le pinceau. C’est vraiment le b.a.-ba de la maîtrise du pinceau : le dos droit, les pieds immobiles au sol, la position fixe du pinceau, le mouvement du poignet et du coude, l’épaisseur du trait, la vitesse des mouvements, etc.
Comme expliqué dans mon article précédent, la langue vietnamienne s’appuie sur le système latinisé avec des lettres alphabétiques. Il faut modifier les règles pour que la calligraphie chinoise soit « vietnamisée ». C’est via un long processus de transformation que l’agencement des lettres à la chinoise est beaucoup atténué dans la calligraphie vietnamienne.
En effet, souvent, pour tracer des idéogrammes chinois, il faut que les traits rentrent dans une case carrée ou circulaire. La calligraphie vietnamienne offre beaucoup plus de cases (triangulaire, rectangulaire, octogonale, etc), du fait de la forme des lettres alphabétiques.
Au bout de deux heures, vous terminerez l’atelier de calligraphie avec Duy Duc. Il sera ravi de vous offrir une magnifique œuvre calligraphiée et un coffret de pinceau pour que vous puisiez pratiquer chez vous.