Ypres

Publié le 29 août 2018 par Pomdepin @pom2pin

On a profité des vacances pour aller s’empiffrer de chocolat faire un tour en Belgique. On s’est baladé à Ypres, qui n’est pas comme ça, à priori, la destination la plus guillerette, et je ne parle pas de la météo qu’on peut qualifier de changeante pour être poli (c’est sûr qu’entre bruine épaisse et déluge torrentiel, il y a une nuance énorme, demandez à mes cheveux…). Je faisais évidemment allusion aux diverses petites sauteries mondiales qui ont eu lieu dans le coin, au début du siècle dernier, vers 1914 et les quatre années suivantes, par là….en même temps, quand on vit dans le Nord Pas de Calais, on n’échappe rarement aux cimetières militaires (on en a même un dans notre village). Au moins, à Ypres, il y a aussi d’excellents chocolats.

Avant de devenir mondialement connue pour ses tranchées et autres bombardements, Ypres a été au moyen âge, très prospère grâce au commerce textile. C’était même une des plus grandes villes d’Europe au XIII siècle d’après Wikipedia, qui est bien plus avenant que les préposés à l’office de tourisme local. Cela dit, son aisance médiévale a permis à Ypres d’avoir de très jolies rues et de grands monuments, dans le pur style flamand. C’est charmant (et très bien reconstruit…). La grande place est splendide et je ne sais pas si j’ai mentionné qu’on y trouve de très bons chocolatiers? Il y a aussi l’hôtel de ville et surtout l’imposante halle aux draps reconvertie en musée et office de tourisme francophobe mais heureusement anglophone. Ypres (Ieper en flamand), comme toute la region n’a pas attendu la première guerre mondiale pour connaître des massacres immondes batailles à n’en plus finir et elle a changé plusieurs fois de nationalité, passant notamment des anglais aux français en 1658 ce qui fait qu’on peut se promener en hauteur sur les fortifications Vauban pour avoir une vue d’ensemble sur la ville. Franchement, c’est très sympathique.

La cathédrale Saint Martin, derrière la grand place avec le cloître a été entièrement bombardée mais reconstruite à l’identique après la première guerre mondiale, un peu comme toute la ville en fait. Marichéri n’a pas résisté à prendre une photo d’un pigeon perché sur une statue pour sa collection ( de pigeons sur des statues, notamment d’un en train de faire pipi sur la tête de Jeanne d’arc à Paris…je sens que je m’éloigne du sujet), mais ce n’est pas le plus spectaculaire. Je vous fais grâce des monuments, mémoriaux et autres souvenirs aux malheureux soldats, notamment ceux de l’empire britannique à l’intérieur de la Cathédrale, mais c’est parce que je vais y revenir.

Je disais donc qu’à Ypres, on n’échappe pas au souvenir de la première guerre mondiale. Ypres a commencé les festivités qui l’ont rendu si tristement célèbre dès octobre 1914, avec une première offensive allemande et ça n’a plus arrêté jusqu’à la libération de la Belgique, c’est dire si on s’est amusé pendant 4 ans. On ne parle pas de la bataille de Ypres mais des batailles de Ypres, notamment la troisième, celle de Passchendaele (je vous passe les détails immondes). C’est à Ypres qu’a été lancé pour la première fois ce grand classique de l’époque: le gaz moutarde, qu’on appelle aussi ypérite, en l’honneur de ce premier massacre cette inauguration. Ça doit bien faire plaisir aux malheureux canadiens sur qui s’est tombé, qu’on donne le nom de leur lieu d’agonie au poison qui les a tués. On estime que quelques 300 000 soldats sont morts juste à Ypres, dont une majorité de pauvres malheureux arrachés aux fins fonds de l’empire britanniques pour finir là, de l’autre côté de terre. On ne compte plus les monuments aux morts, mais c’est le mémorial de la porte de Menin qui est le plus impressionnant. C’est une gigantesque porte, tapissée à perte de vue des noms des pauvres types tombés là. La litanie est sans fin. Des gamins de l’âge de mes deux grands, des hindous qui ne devaient même pas savoir où ils étaient, des fratries entières…on a même retrouvé le nom de notre ancien village de l’Essex sur les couronnes de poppies, de coquelicots commémoratifs. C’est à hurler de rage même un siècle après, et terriblement émouvant. Les soldats n’ont pas été sectaires, ils ont laissé la population civile jouer aussi. Elle a diminué de moitié entre 1914 et 1918. Ypres a été pratiquement toute anéantie…

Bon, j’ai bien cassé l’ambiance (attendez, on n’a pas encore été visité Notre Dame de Lorette, ça risque d’être fun aussi). Mais Ypres a été magnifiquement reconstruite et son charme flamand préservé. Elle mérite d’autres visiteurs que des militaires déposant mécaniquement des gerbes souvenirs devant des monuments désolants. Ses petites rues, ses restes de grandeur médiévale et ses façades flamandes valent la peine d’être vus pour eux mêmes. Et puis, n’oublions pas le chocolat…