Le Canal des deux Mers, de Toulouse à Royan à vélo

J'arrivai de Paris, exsangue. Après des mois à courir, j'avais envie de me sentir libre d'aller et venir dans une géographie plane échappant à toute idée de temps. A Toulouse, en face de la gare, on me tendit un vélo. L'idée était un peu folle ; rejoindre Royan en quelques jours en empruntant le Canal des Deux Mers, une voie verte de près de 800 kilomètres reliant Sète à Royan.

La magie opéra sur le champ. Après quelques tours de pédale, je me trouvai en pleine forêt. Aucun bruit alentour et, à perte de vue le canal et ses reflets. Parfois, dans le calme latent, un pont, un mur de framboisiers, une dizaine de canetons me rappelait à la douce réalité de ce chemin d'été où rien ne presse sinon cette envie de se détacher de tout ce qui n'est pas simplicité.

Entre la Haute-Garonne et le Lot-et-Garonne, le Canal s'imprimait de vert et, sous les ombres des futaies, je redécouvrais le plaisir d'une allure sans effort, d'un voyage lent où chaque minute compte.

A la première halte, Toulouse était déjà bien loin et, perdue dans les pierres de Moissac et de Nérac ou entre les confluents de Garonne, je rencontrai des hommes passionnés par le terroir et l'histoire de leur région. Combien d'autoroutes m'avaient privé jusqu'ici de les rencontrer ? Et ce qui n'était encore qu'une envie, un pressentiment, est devenue, grâce à ce voyage, une idée fixe ; voyager moins, plus lentement, au plus près des paysages et de leurs habitants pour ne plus rien rater de ces petits villages que l'on oublie trop souvent.

Les forêts firent place à la vigne au fur et à mesure que la Gironde s'élargissait. Le Canal des deux mers se réinventait et je suivais les aléas de châteaux et de cabanes sous un soleil de plomb.

Déjà, le sol se dérobait pour laisser place aux sables de Charentes et aux allées tranquilles de Talmont-sur-Gironde. Dans les étendues de blé, quelques coquelicots et plus loin encore, la mer qui annonçait la fin de ce voyage en dehors du temps.

Le Canal des deux mers pratique :

Le circuit du Canal des Deux Mers relie Sète à Royan, en 33 étapes, soit environ 660 km de piste cyclable. Je n'ai effectué que la partie Toulouse-Royan, Sète-Toulouse étant un peu moins aménagée même si celle-ci reste praticable (sûrement une prochaine étape pour moi).

Tout le trajet peut se faire sans guide (les pistes étant relativement bien indiquées) mais si vous le souhaitez, il existe plusieurs guides du Canal des Deux Mers. J'ai eu l'occasion de feuilleter celui édité par Chamina Edition et, une fois n'est pas coutume, je vous le recommande 😉

Avant de préparer votre voyage, n'oubliez pas de bien estimer vos temps de vélo. En moyenne, prévoyez de faire entre 10 et 15km par heure selon votre condition physique, soit un maximum 80 km par jour, le mieux étant de prévoir 50 km maximum pour avoir le temps de profiter des régions.

Meilleure période : Printemps et automne. Vous pouvez néanmoins choisir de faire le parcours en été comme moi. Il faudra alors compter sur quelques heures chaudes...se lever tôt et prolonger un peu les pauses déjeuners.

Si comme moi, vous êtes sportifs mais pas tant que ça, vous pouvez louer vos vélos via France vélo, une entreprise qui propose de porter vos bagages d'un hôtel à l'autre pour vous permettre de pédaler en toute légèreté 😉

Les lieux à ne pas manquer sur la route :

La Maison du vélo à Toulouse

Si vous passez par Toulouse, arrêtez-vous à la Maison du Vélo, juste en face de la Gare, histoire de regonflez vos pneus et de profiter d'une pause sur la terrasse du Vélo sentimental, le café de l'association qui propose des menus délicieux et à un prix défiant toute concurrence. En plus, c'est pour la bonne cause ; l'association promeut le vélo dans toute la ville et permet à des jeunes en difficulté de se réinsérer 😉

Le petit village de Moissac

Sur les bords du Tarn, Moissac est un petit village plein de charme où il fait bon s'arrêter. D'abord pour son Abbaye superbe ; au centre du plus ancien cloître du monde pousse un cèdre grandiose. Si vous en avez le temps, demandez à Georges de vous faire visiter les lieux - si cela ne tenait qu'à moi, je le classerai lui aussi au Patrimoine Mondial de l'Unesco - et qui sait, peut-être aurez vous la chance qu'il vous ouvre la salle des cloches...

Si une petite soif vous prend, descendez sur les bords du Tarn jusqu'à l'uvarium pour boire un jus de chasselas, le délicieux raisin de la région. Entre nous, je vous conseille même d'y rester pour la nuit : le moulin de Moissac est une très bonne table et l'hôtel possède un jacuzzi. Je dis ça, je ne dis rien...

Agen, son marché couvert et son pont-canal

En passant par Agen, prenez le temps de visiter l'Eglise Saint-Hilaire puis dirigez-vous vers le marché couvert pour déguster les spécialités locales dont les pruneaux de Monsieur Bopy. Depuis le parking surélevé, vous aurez une des plus belles vues d'Agen. Le long du Canal des Deux Mers, juste avant un des plus beaux pont canal du circuit, vous pourrez vous arrêter au Café vélo, le temps d'un verre. Des outils sont à votre disposition si vous avez besoin d'une petite révision de votre vélo avant de reprendre la route.

La Table des Princes Noirs à Sérignac-sur-Garonne

A Sérignac vous attend une demeure de charme. Classé Logis, le Prince Noir se met en quatre pour vous concocter une table gourmande midi et soir (à partir de 17 euros le menu). Je n'ai malheureusement pas eu le temps de tester les chambres mais dans un cadre pareil, elles doivent être parfaites pour une bonne nuit de repos. Et l'établissement est habitué aux cyclistes, ce qui est un avantage certain 😉

Nérac et son raconteur de pays

Sans hésiter, Nérac est le COUP de COEUR de ce voyage. Berceau du futur Henri IV et haut lieu du royaume de Navarre, ce petit port fluvial regorge d'histoire. Vous pourrez partir sur les traces d'Henri IV, bien sûr, mais aussi de Marguerite de Navarre, femme de salon à qui l'on doit l'Héptaméron ou plus simplement vous laisser bercer par son architecture et ses jardins. En y passant, vous ne pouvez rater sous aucun prétexte la visite guidée de Guy, raconteur de pays passionné et des plus passionnants, qui partagera ses meilleures anecdotes autour d'une balade dans la ville. Mieux vaut réserver via sa Page Facebook car il a du succès. Et si vous n'êtes pas encore convaincu, je vous rajoute avec ceci mon dernier argument : la visite ne coûte que 4 euros par personne.Quand je vous disais que c'est une affaire de passion...

L'autre bonne nouvelle c'est que des raconteurs de pays, il en existe plein d'autres dans la région et qu'il sont tous répertoriés sur un site : les raconteurs de pays du Lot-et-Garonne.

Couthures où la vie près de Garonne

Afin de mieux comprendre ce fleuve que je suis depuis Toulouse, un détour s'impose à Couthures-sur-Garonne. Cette petit village, niché entre deux méandres de Garonne comme on l'appelle ici, a ouvert en 2006 la Maison des Gens de Garonne, un lieu qui met à l'honneur la relation de l'homme au fleuve. On y explique ses crues, comment elle a façonné au fil des siècles les paysages de la région et on peut même s'y promener sur un des bateaux des sauveteurs de Couthures le temps d'une balade découverte (7 euros par personne) et même pourquoi pas, s'y baigner juste en face de la Maison. Une pause bien agréable pour les mollets !

Dormir dans une roulotte à Fontet

J'ai tout simplement adoré mon court séjour au Clos d'Any, je vous le dis de but en blanc. D'abord et surtout pour l'accueil incroyable de Sylvain et Any, les deux propriétaires des lieux ; ils savent mettre à l'aise, accueillent beaucoup de cyclistes et sont pleins de petites attention, si bien qu'en partant je ne savais plus si j'étais cliente ou amie de longue date du couple (et je ne suis restée qu'une seule nuit !). Ensuite parce le lieu a un charme fou ; la piscine est parfaite pour se refaire les gambettes, la décoration est magnifique d'une chambre à l'autre et le repas se prend, toujours après l'apéritif, sous une tonnelle de kiwis à couper le souffle. Il y a des chambres mais pour les aventuriers comme moi, je vous conseille la roulotte de Mara, caché au fond d'un jardin japonisant où se cache un jacuzzi privatif pour les longues soirées d'été...

L'abbaye de la Sauve-Majeure

Quelques kilomètres avant Créon, dans le village de La Sauve, se trouve la superbe abbaye romane de la Sauve-Majeure. Lieu de pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle, ce lieu chargé d'histoire vaut vraiment le détour.

Les fontaines mystérieuses du château de Beaulon (et leur cognac !)

Si le château de Beaulon est surtout réputé pour le cognac et le pineau (qui sont délicieux), son parc est également immanquable. Entre frênes et bananiers, ce jardin superbement entretenu est célèbre pour ses fontaines mystérieuses aux eaux turquoises. Le maître des lieux m'a assuré que la couleur de l'eau provenait de l'influence des fées.Et j'ai préféré le croire...

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Les ruelles de Talmont-sur-Gironde

Sur l'embouchure de la Gironde, Talmont est l'endroit parfait pour faire une petite pause déjeuner avant votre arrivée sur Royan. J'ai adoré me balader dans ses ruelles piétonnes et admirer la vue sur la Gironde.

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