"Toi qui aimes les châteaux, il faudrait aller visiter celui de la Rochefoucauld, on n'y pense jamais et c'est à côté", m'a un jour lancé ma mère, il y a plusieurs mois. Donc acte début janvier, juste avant que je ne retourne en Autriche. Le château de la Rochefoucauld, sans doute l'un des plus beaux de Charente, est situé à une heure de Limoges : une paille, effectivement. Ouvert les dimanches en janvier et février, c'était la sortie idéale pour occuper un après-midi d'hiver.La visite s'effectue en deux temps : la première donne accès à une partie du château (par ailleurs toujours habité par la famille) avec un support de lecture présentant l'historique du lieu et des détails sur les éléments principaux ; la seconde se fait en compagnie d'un guide. Nous avons commencé notre visite sous un ciel plombé, donnant à la pierre de curieux reflets rouges. Édifié sur un promontoire rocheux (on l'aperçoit, majestueux, au-dessus de la ville quand on est encore à quelques kilomètres), le château de La Rochefoucauld (et par extension la famille) tient son nom de son emplacement : on doit les premières constructions fortifiées à cet endroit à Fucaldus, frère du vicomte de Limoges, à la fin du Xe siècle, d'où Fucaldus in rupe - La Roche à Foucauld. Le château possède un plan plutôt atypique avec sa cour entourée de trois murs seulement (l'aile nord a été rasée au XVIIe siècle) et s'ouvrant sur le vide, permettant une vue dégagée sur les alentours. On y retrouve un mélange de styles architecturaux, avec la massive tour carrée, seul vestige du château médiéval du XIe siècle, et les galeries Renaissance, datant du XVIe siècle. L'aile ouest, rebâtie au XVIIIe siècle après un incendie, n'est pas ouverte au public, c'est là que vit la famille. Partout dans le château on retrouve des fleurs de lys, symbole royal, mais surtout la salamandre, emblème de François Ier, qui fut le filleul de François II de La Rochefoucauld. Un lien important qui témoigne également du rang et de la puissance de la famille. C'est lui, avec sa femme Anne de Polignac, qui fait construire les ailes sud et ouest, les deux plus impressionnantes : ne vous étonnez donc pas si vous remarquez à de nombreux endroits les initiales F et A !La visite libre se fait sur trois niveaux. Au sous-sol, on découvre ainsi une ancienne salle de garde (où brûlait ce jour-là un bon feu de cheminée rappelant à quel point ces endroits devaient être glaciaux en hiver), les cuisines avec sa cheminée monumentale ainsi que tout un réseau de galeries souterraines, sous le château, pratiques en cas de siège. Là aussi on retrouve quelques vestiges médiévaux.Mieux vaut ne pas se perdre ! Heureusement on ne va pas bien loin...C'est au rez-de-chaussée que se trouve le plus gros de la visite libre. On commence avec la chapelle, qui se situe dans la tour de l'aile ouest. Là encore on y retrouve des inspirations italiennes, notamment au niveau des colonnades. L'agencement de la chapelle fut fortement modifié au XXe siècle, suite à la mort prématurée du petit François XVII (dallage du chœur et ajout de la tribune, notamment). On retrouve encore une fois la fleur de lys royale et surtout la devise de la famille La Rochefoucauld : "C'est mon plaisir". Les initiales F M J sont celles du petit François XVII.Puis vient le tour des salons, sept pièces au total réparties au rez-de-chaussée des deux ailes. Le mobilier date des XVIIe et XVIIIe siècles : ils ont subi de nombreux remaniements à la fin du XIXe siècle quand François XVI épouse l'Américain Mattie Mitchell. Au mur sont accrochés des portraits des membres de la famille, qui a compté beaucoup de personnes passées à la postérité : François VI, auteur des Maximes ; Louis-Alexandre, membre des États généraux et assassiné en 1792, proche de Roosevelt ; François XII, fondateur de l'école des Arts et Métiers et cofondateur de la Caisse d'épargne.La salle à manger. La salon François VI, dans la tour à l'angle des ailes ouest et sud, dédié à l'auteur des Maximes : "Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."Dans le boudoir les époques d'entrechoquent : plafond à caisson et boiseries datent du XVIe et virent Marguerite d'Angoulême, sœur de François Ier, s'y installer pour écrire ses poèmes ; sur les murs, des peintures des propriétés familiales, ajout du XIXe siècle quand Mattie Mitchell transforma la pièce en salle de bains.Le salon bleu est présent dans l'aile sud et n'est pas tout le temps accessible : il fait partie des appartements privés de la famille et n'est ouvert qu'en l'absence des propriétaires.La seconde salle à manger, également utilisée par les propriétaires du château.Vue sur l'aile est, d'architecture beaucoup plus sobre.Vient désormais le moment de monter dans les étages. L'une des pièces maîtresses du château est son escalier Renissance à vis, qui permet de desservir les différents étages. En haut des 180 marches (la plus longue fait 4 mètres), un superbe palmier en ogives. Son dessin est attribué à Léonard de Vinci. De quoi vous faire tourner la tête. À droite, dans la galerie de l'aile nord.Le château recèle de quatre bibliothèques qui ne sont accessibles qu'avec un guide : toutes ne se visitent pas pour le moment, une est notamment en cours de réaménagement. En tout ce sont plus de 20 000 volumes qui sont conservés, des ouvrages de sujets divers, principalement du XVIIIe siècle, mais également quelques incunables et d'autres beaucoup plus récents. Nous avons également eu le droit à un petit aperçu des archives de la famille, stockées depuis huit siècles. Un sacré trésor : quelle émotion de lire ces textes datant du XVIe... ou du moins d'essayer de lire, entre le vieux français et les fioritures des lettres, ce n'est pas toujours évident de déchiffrer ce qui est inscrit.Parmi les trésors du château, il y a également de nombreuses cartes (plus de trois cents), dont certaines assez anciennes pour avoir servi lors de batailles à l'époque de la construction du château.Dans la galerie de l'aile ouest.Nous sommes ressorties du château transies de froid (pensez à vous couvrir en hiver, les pièces ne sont pas chauffées) mais sous un beau ciel bleu : quel changement d'ambiance ! Entre la visite libre (qui nous a duré une heure) et la visite guidée, il faut bien compter environ 1 h 30 à 2 h pour bien tout apprécier, surtout si après vous voulez vous promener dans le domaine et notamment apprécier la vue sur la rivière en contrebas.Le pont qui enjambe la Tardoire, qui passe au pied du château, depuis l'un des salons.Château de La Rochefoucauld16110 La RochefoucauldEntrée : 10 €
Aux caprices des anges2 Place du Dr Lhomme16110 La Rochefoucauld
Bonus : bonnes adresses
Au pied du château on trouve un salon de thé (ouvert uniquement en haute saison) et une chocolaterie, La Chocolaterie d'antan, ouverte elle toute l'année, même le dimanche. Si vous êtes amateur de chocolat, pâtes de fruits, caramels, guimauves et autres douceurs, c'est l'endroit idéal pour se refaire les stocks. Il est même parfois possible de voir les artisans au travail dans l'atelier, grâce à la grande verrière dans la boutique.Nous n'imaginions pas trouver un endroit où goûter ouvert un dimanche de janvier à la Rochefoucauld. En fait, nous étions même sur le point de partir quand nous sommes passées devant cette devanture. Il y avait de la lumière, on est entrées et... nous avons bien fait ! Aux caprices des anges est un mélange de salon de thé et d'antiquaire : outre l'étage dédié, tout ce que vous voyez dans la pièce du rez-de-chaussée est à vendre : chaises, tables, bibelots... Un concept plutôt sympa qui donne à la décoration beaucoup de charme, avec un sacré mélange des styles. Côté restaurant, tout est fait maison, jusqu'au chocolat chaud qui est brassé sous vos yeux sur le comptoir. La carte (qui change régulièrement) propose aussi bien sucré que salé et les gâteaux... Ah, divin ! Ma mère a été bluffée par le financier et ma sœur et moi avons survalidé le crumble framboise/chocolat blanc. Une adresse à garder sous le coude pour un déjeuner rapide ou un goûter gourmand.Aux caprices des anges2 Place du Dr Lhomme16110 La Rochefoucauld