Ça y est, c’est fait, je viens de déposer ma fille à la Petite École pour la rentrée. À 22 mois, elle est confiée à une étrangère pour une première fois, dans un milieu qu’elle ne connaît pas (ou si peu pour être venue y reconduire son frère à l’occasion). J’ai le cœur en miettes et je ne peux retenir mes sanglots. Pourtant, elle a semblé bien s’adapter à son nouveau milieu. J’y suis restée un peu avec son papa, à la regarder jouer avec les autres et faire de larges sourires à son éducatrice. Je la sentais bien et en confiance. Au moment de la quitter, elle nous a fait « bye bye » l’air de rien, continuant son jeu qui consistait à lancer un ballon dans les airs avec ses nouvelles amies. En refermant la porte derrière moi, j’ai entendu des pleurs. Je n’ai pas pu me retenir de regarder dans sa classe, mais ce n’était pas elle qui pleurait. Elle avait gardé son magnifique sourire, imperturbable. Elle était prête depuis longtemps à franchir cette étape, mais pas moi.
Mes deux bébés, prêts pour l’écolePourquoi je me sens aussi anéantie?
Depuis le début du week-end, je me sens très émotive. Alors que je reviens d’un séjour zen en forêt, je me sens comme une boule d’émotions, prête à éclater en sanglots pour un rien. Cette première séparation, je l’anticipas depuis longtemps. Ce n’est pourtant pas la première fois que je vis l’expérience de laisser mon bébé dans un milieu de garde. Et c’est bien là que le problème se situe, car je suis pleinement consciente que c’est la dernière fois que je vis cette première fois… Et faire ce constat, c’est douloureux. Il s’agit pour moi d’un deuil énorme.
Je ne serai plus jamais la maman d’un bébé naissant que je berce en peau à peau pendant des heures. Cette page de ma vie est définitivement tournée après avoir eu trois magnifiques bébés à chérir. Je comprends un peu mieux la peine de ma propre mère lorsque j’ai quitté la maison pour aller à l’université. J’étais sa petite dernière et elle m’a écrit une lettre (une vraie, manuscrite et timbrée) tous les jours au cours de ma première année de droit. 365 lettres d’amour… Vous imaginez?
Mon fils cadet, à 1 mois, alors que nous étions expatriés à DubaïLa vie passe sans que je puisse faire le tour de mon monde…
Je ne ferai jamais le tour du monde, car je suis incapable de faire le tour de mon monde. Le tour de ma région, de ma ville, de mes enfants… Chaque jour, mes garçons et ma fille me font découvrir une nouvelle facette de leur personnalité. Chaque semaine, j’apprends l’existence d’un musée, d’un sentier de randonnée ou d’un restaurant que je ne connaissais pas encore dans ma ville. Dix ans après mon installation au Saguenay-Lac-Saint-Jean, j’ai toujours l’étrange impression d’y être en touriste. Je me sens attachée à ma région d’adoption, mais je reste avec l’impression d’être à peine installée et d’avoir encore tellement à apprendre et à vivre ici.
Plus je voyage, plus je veux voyager. Je veux découvrir de nouveaux pays, mais aussi revenir dans chaque ville traversée pour m’en imprégner davantage, la voir sous un autre angle. C’est la même chose dans mon rôle de maman. Je découvre mes enfants un peu plus chaque jour et je les regarde grandir avec fierté… Mais il m’arrive aussi de vouloir arrêter le temps, voire de revenir en arrière pour les aimer encore plus fort et profiter d’eux un peu plus longtemps…
À ce rythme, c’est certain, je ne ferai jamais le tour du monde. Mais j’en découvrirai des petits morceaux tous les jours, à mon rythme…
P.S.: Plus qu’une heure et je vais chercher ma fille… Le temps file, mais certaines attentes demeurent interminables…