Jours 4 et 5, Deux journées au plus près de la nature boréale
28 et 29 Janvier 2016Journée la plus chaude du séjour aujourd'hui (-3°C) mais le ciel est toujours aussi couvert. Le temps est vraiment clément pour la saison ! Il faut revoir l'habillage en trois couches et se couvrir un peu moins chaudement après l'échec d'hier... En même temps, il faut prévoir quelques rechanges car nous partons en raid en raquettes pour deux jours. Thomas, notre guide, a apporté la nourriture et les bidons d'eau à la cabane d'Hossaari la veille mais nous devons toute de même porter nos propres affaires ainsi que le pique-nique du midi. Départ de l'auberge à 10h. On chausse les raquettes et on s'équipe de bâtons de marche.
Cette fois nous n'avons pas les chiens pour nous accompagner et nous aider dans la poudreuse. C'est donc parti pour une petite randonnée de 4 km. Etant donné le temps maussade, on marche la matinée jusqu'au refuge, puis après avoir mangé au chaud, nous ressortirons l'après-midi. On prend la direction du Nord-Ouest, en traversant d'abord le lac Hossanjärvi situé en contrebas de l'auberge, avant de couper par la forêt de Seipiniemi. On marque régulièrement des pauses et Thomas nous apprend à différencier les différents types de végétaux et arbres de la région.
La forêt boréale, ou la taïga, recouvre 10% des terres émergées et constitue la plus grande continuité boisée de la planète, s'étendant de l'Alaska jusqu'en Russie en passant par le Canada, la Scandinavie et et le Nord du Japon. Au-dessus de la limite boisée, la végétation se raréfie, c'est la toundra arctique. La taïga est composée d'une majorité de conifères et de feuillus : de pin sylvestre, un grand arbre au tronc nu, d'épicéa, reconnaissable car ses branches descendent bien bas jusqu'au sol, et le bouleau, à l'écorce bien blanche. Le genévrier est quant à lui un arbuste courant de la forêt boréale et est utilisé pour faire des tisanes. Sous la neige, on trouve également des plantes utilisées pour le thé.
On perd vite le sens de l'orientation dans la forêt et, lorsqu'on débouche sur un nouveau lac, j'ai la vague impression d'avoir tourné en rond et que nous prenons la direction du Sud-Est. Erreur, après avoir coupé par la forêt en direction de l'Est on se dirige maintenant vers le Nord en longeant le lac Honkiselkä. Bon, il va falloir que je travaille mon sens de l'orientation !
Une partie du lac n'est plus gelée et cela forme une grosse tâche brune, mélange de neige fondue, d'eau et de sédiment. Dans les sections étroites des lacs s'exercent généralement un plus fort courant empêchant l'eau de geler. Contrairement à ce qu'on peut penser, ce n'est pas au centre du lac que la glace est plus solide, car les courants y sont plus nombreux et plus forts. Il vaut mieux longer les berges (d'autant plus qu'il y a moins de profondeur) et, si on a besoin de traverser un lac, il est préférable de le faire sur la section la plus large.
Le brouillard commence à tomber et la visibilité se réduit. Après un virage, on arrive en vue de l'île Nurmisaaret où se trouve la cabane d' Hossaari, nimbée d'un brouillard fantomatique. Une fois arrivé, c'est le même rituel : aller chercher et couper du bois, allumer les poêles, faire chauffer de l'eau pour la soupe.
Contrairement à la première cabane de trappeur, celle-ci ne dispose pas de pompe à eau, nous avons quelques bidons mais pour avoir plus de réserve, il faut soit se servir dans le lac, soit faire fondre de la neige. Au menu de ce midi : soupe, papillote de saumon et riz.
Après manger, on se remotive pour sortir. Direction la forêt à l'Est de l'île pour une petite boucle d'environ 3 km dans un paysage vallonné, en passant par une petit lac fermé, un kettle. Le kettle est une formation glaciaire, dont l'origine provient des dépôts qui sont transportés par le glacier et qui emprisonnent une certaine quantité de glace. À la fonte de celle-ci, une dépression va se former sous l'action d'un effondrement de terrain, créant ainsi un kettle, pouvant se remplir d'eau.
Cette après-midi donne l'occasion de se détendre, avec un concours de sauts dans la neige et une petite course jusqu'à la micro île voisine de la nôtre. Et oui, il en faut beaucoup pour nous fatiguer ! Et comme nous sommes de grands enfants, une fois de retour à la cabane , on ne résiste pas à l'envie de faire un bonhomme de neige. Mais, comme la texture de la neige n'accroche pas, ce n'est pas facile et il ressemble plus à l'abominable homme des neiges...
Après un goûter au chaud près du poêle, direction le sauna situé dans la cabane d'à côté. Cette fois, tout le groupe est motivé et on se retrouve tous ensemble dans le sauna traditionnel chauffé au poêle à bois. En revanche, nous n'avons pas fait le trou dans la glace comme pour le raid en traîneau à chiens, donc à défaut, on se roule dans la neige lorsque nos corps sont bien chauds. Pour ceux qui ont également fait la baignade dans l'eau glacée du lac, il est apparemment beaucoup plus difficile et douloureux de se rouler dans la neige. En effet, celle-ci au contact de la peau brûle, mais quel bonheur de retrouver la chaleur du sauna après ! Nous aurons eu tout de même deux belles frayeurs car la porte d'entrée du sauna conduisant au sas, toute gonflée par l'humidité, s'ouvre très difficilement si elle est claquée... Vous l'aurez compris, à deux reprises la porte a claqué, dont une fois lorsque nous étions dehors plein de neige...
De retour à la cabane pour un bon repas chaud ; blanquette de porc, riz et salade de fruits sauce chocolat, suivi d'une bonne soirée à la lueur des bougies.
Le lendemain, réveil à Hossaari sous un beau ciel bleu et un -8°C. Les premiers rayons du soleil enrobent d'une douce lumière chaude la cabane et font scintiller de mille feux la neige, sous le regard presque bienveillant du bonhomme de neige. Départ pour notre deuxième journée de raid en raquettes après le rangement et le nettoyage de la cabane.
Direction le Nord-Est du parc naturel d'Hossa, pour une randonnée en raquettes de 14 km, afin de découvrir sa partie la plus sauvage et la plus belle, selon Thomas, notre guide. Et, c'est vrai, il s'agira de la plus jolie et variée des randonnées que nous aurons faite pendant le séjour. Ne pas revenir vers l'auberge permet en effet d'explorer le parc un peu plus en profondeur. Cette journée sera vraiment différente des autres, c'est la première fois où il fait vraiment beau, ce qui donne une lumière vraiment particulière, et nous ferons quasiment que de la forêt, avec la traversée de deux lacs seulement, celui du départ et celui de l'arrivée.
On commence donc par la traversée du grand lac Nurmiselkä. Sous les rayons du soleil, le paysage a vraiment un autre visage. La lumière sera rasante et chaude toute la journée.
Sur les grandes étendues, comme le lac, les ombres sont allongées et la neige scintille comme des diamants. Puis, on atteint la lisère de la forêt, les rayons du soleil s'infiltrent à travers les branches et les troncs, créant une atmosphère enchanteresse.
On grimpe en haut d'une crête bordée de part et d'autre par des lacs, en suivant un chemin de randonnée plus ou moins marqué. Il y a bien 50 cm de neige et il est parfois reposant de trouver une piste déjà tracée. On longe la crête, en alternant les petites descentes et montées ainsi que la vue sur un lac en contrebas. Des ponts routiers par lesquels nous devons passer permettent de relier les portions de terres entre chaque lac. Ces parties très étroites où s'écoule l'eau ne sont souvent pas gelées.
On pique-nique au feu de camp Hakokoski , en bordure du lac Syvä-Hoilua. Le lieu est vraiment très beau. Dans cette partie du parc, les courants sont plus forts et les lacs plus étroits, de ce fait de nombreux endroits ne sont pas gelés et ça a aussi son charme de voir l'eau bleue s'écouler dans un décor tout enneigé. Au menu de ce midi : soupe, hot-dogs à la saucisse finlandaise et gâteau au chocolat. Il fait tout de même assez froid ce jour-là et avec l'arrêt, nous ne tardons pas à avoir tous froid.
Heureusement, on repart en trombe en grimpant un escalier en bois menant en haut de la crête de l'autre côté de la rivière, ce qui nous réchauffe vite. On peut observer que les écorces sont arrachées sur certains troncs d'arbres, ce sont les rennes qui mangent les lichens et les écorces en hiver. Il n'existe pas de rennes sauvages en Finlande, ils appartiennent forcément à un éleveur, qui peut être Sami ou Finlandais (contrairement à la Norvège où seuls les Samis peuvent être éleveurs de rennes). Pendant l'hiver, les rennes mâles n'ont plus de bois ; ils repousseront à l'automne au moment de la période du rut.
Le soleil, qui n'est pas monté bien haut dans le ciel et a à peine dépassé la cime des arbres, commence déjà à décliner en se chargeant de douces couleurs rosées. Il n'y a, par contre, pas vraiment de points de vues pour l'admirer, les arbres cachant toujours le peu de vision qu'on a. Cela est tellement rare que Thomas nous fait même arrêter à un endroit qui est " le " point de vue de la forêt, c'est à dire un tout petit espace entre les troncs qui permet effectivement d'apercevoir l'étendue sans fin de la forêt boréale. On en plaisante même, car la Finlande est un pays plutôt plat, composé de vastes étendues planes occupées par des lacs et des forêts.
Les seuls reliefs caractéristiques de la Laponie sont les tunturit, des collines dépassant la limite de la forêt (300 mètres). Et, le plus haut point culminant de Finlande se situe à 1328 mètres, sur le Mont Halti, à la frontière avec la Norvège, mais il ne s'agit même pas du sommet de la montagne qui lui se situe dans les Alpes scandinaves en Norvège à 1365 mètres !
La randonnée se poursuit sous un ciel voilé éclairé par la douce lumière chaude du soleil couchant. On en profite aussi longtemps que l'on peut mais dès que l'on descend de la crête, c'est une forêt plongée dans une ombre bleutée qui nous accueille. On débouche ensuite sur le kettle de Pieni Hossalaislampi, où la glace commence à fondre. Les raquettes se prennent alors dans une bouillasse qui colle aux dents des raquettes et rendent chaque pas un peu plus lourd. Comme quoi, on a de la marge encore avant de passer à travers la glace ! Mais, cela ne sera pas pénible bien longtemps car nous arrivons au parking où nous attendent deux mini-bus pour nous ramener à l'auberge.
De retour à l'auberge , nous suivons toujours le même petit rituel : pause dans le salon commun pour un goûter et thé, suivie d'une séance de sauna dans notre appartement. Dégustation de la bière locale Karjala en apéro, puis, au dîner du buffet ce soir là : lasagnes et crudités, gâteau aux myrtilles crème anglaise en dessert. Mais ce jour là n'est pas n'importe lequel puisque c'est l'anniversaire de Lucas, le benjamin du groupe. Après nous l'avoir annoncé, on fête ça tous ensemble autour d'un verre de Jaloviina pendant qu'on lui prépare une surprise pour le lendemain...
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