Le Palais Idéal du Facteur Cheval

Publié le 25 mars 2016 par Ailleurstoujours @TjsEtreAilleurs
Dans la Drôme, sur la commune de Hauterives, se dresse un étrange palais, désormais une référence de l'art brut en architecture, un mystère fait de pierre et de chaux que l'on doit à un personnage hors du commun. Le Palais Idéal du Facteur Cheval fut édifié par le dénommé Cheval, Ferdinand de son prénom et facteur de son état, une construction tout droit sortie de ses rêves, un héritage unique au monde qui désormais se visite tout au long de l'année.La façade sud.  Tout commence en 1879. Durant l'une de ses harassantes tournées quotidiennes, Ferdinand Cheval, alors âgé de 43 ans, bute sur une pierre étrange qui lui rappelle un rêve. C'est le début d'une entreprise folle, la construction d'un palais tout droit sorti de son imagination, lui qui n'a pas de formation artistique et est encore moins architecte. Chaque jour, durant ses tournées de plus de 40 kilomètres, qu'il parcourt à pied, il met de côté les pierres les plus remarquables qu'il revient ensuite chercher avec sa brouette, sa fidèle compagne. Il mettra trente-trois ans à édifier ce monument, dont vingt ans rien que pour la façade est, le point de départ. Tous les éléments de son palais proviennent directement de la nature. Seuls les matériaux de construction, comme la chaux, sont achetés.La façade nord.Détail de la façade est : les trois géants – César, Vercingétorix et Archimède.C'est dans ce qui était autrefois son potager que Ferdinand Cheval commence les travaux. Dans le village, beaucoup le prenne pour un fou et bien peu comprenne son entreprise. Il faut dire que l'on n'a jamais vu ça, en plein cœur de la campagne française... Ferdinand Cheval puise son inspiration dans la nature qu'il parcourt tous les jours – l'eau joue un rôle prépondérant dans son édifice, même si depuis toute source à été coupée dans un effort de préservation – mais également des premiers magazines illustrés qui commencent à circuler, renfermant dans leurs pages les splendeurs de contrées lointaines... Il n'est pas étonnant que temples égyptien et hindou, mosquée et château fort médiéval se côtoient, dans une volonté délibérément universaliste.La façade ouest.   Chaque façade possède son histoire et sa symbolique propres, et l'on pourrait y passer des heures à les contempler attentivement sans pour autant réussir à en appréhender tous les détails. La façade est fut la première construite, avec pour point de départ la source de vie. Ferdinand Cheval y creusa également un tombeau, espérant pouvoir s'y faire enterrer, aux côtés de sa femme (ce qui lui fut finalement refusé pour des raisons de salubrité). Puis vint la façade sud, moins foisonnante, destinée surtout à stocker les pierres qu'il ramenait pour son projet. Il poursuivit avec la façade ouest et son enfilade de bâtiments représentant plusieurs cultures et religions, dans des alcôves. Elle abrite une galerie, aux sculptures plus oniriques, où, parmi les nombreuses citations gravées, l'on peut lire un poème signé Emile Roux, qui donna son nom au monument : "Ton Idéal, ton Palais". Puis il termina par la façade nord, la plus exubérante, la plus foisonnante : profusion de sculptures d'animaux, nombreuses références à la Bible... et à l'angle avec la façade est, la conclusion de son entreprise : "1879-1912, 10 000 journées, 93 000 heures, 33 ans" : "Travail d'un seul homme". Une entreprise colossale qu'il termina à l'âge de 76 ans.Détail de la façade est.   Vient alors le temps de la reconnaissance : dès 1905, alors que le palais n'est pas encore achevé, les premiers visiteurs se pressent et Ferdinand Cheval, enfin à la retraite, joue les guides. Des cartes postales, sur les photos desquelles ils veillent attentivement, sont imprimées, contribuant à étendre la renommée de son œuvre hors du commun. Mais son travail ne s'achève pas avec la pose de la dernière pierre de son palais. Interdit d'y être enterré, il poursuit avec la construction de son tombeau dans le cimetière du village, à quelques kilomètres de là. Un labeur qui dura huit ans et où il fut finalement inhumé, après son décès, à l'âge de 88 ans. Si vous avez le temps, ne manquez pas d'ailleurs d'aller y jeter un œil : le tombeau est actuellement en restauration (d'où l'absence de photo dans cet article, tout entouré d'échafaudages qu'il était) mais d'ici l'été, il devrait être de nouveau pleinement visible.La terrasse.La visite se termine par un espace muséographique, qui permet de retracer la vie de Ferdinand Cheval, ainsi que ses sources d'inspiration mais également mettre en évidence le combat d'André Malraux pour légitimer ce palais et le faire reconnaître comme exemple d'art naïf, lui permettant un classement aux Monuments historiques et par-là même des possibilités d'entretien et de restauration. On y découvre aussi les nombreux artistes que Ferdinand Cheval et son palais onirique ont inspirés : Pablo Picasso, André Breton, Niki de Saint-Phalle... Enfin, une maquette reproduit fidèlement le palais en version réduite et permet de mieux en admirer les détails.Fantasque, étrange, insolite, unique au monde... difficile de rester indifférent devant cet édifice à nul autre pareil ! Une visite à faire au moins une fois dans sa vie et qui marquera longuement les esprits.
Palais Idéal du Facteur Cheval8 rue du Palais 26390 HauterivesOuvert toute l'année (sauf les 25/12 et 01/01 et du 15/01 au 31/01)Préférez l'audioguide en plus de la brochure pour encore plus d'informations sur le palais !