Le paquet-message de Rudyard Kipling

Exhumé des terres anciennes de l’écriture, quelques mots surgis du passé :

J’ai trouvé ces mots, dans l’Histoire de la lecture d’Alberto Manguel.

Alors qu’il m’écoutait lire un poème de Kipling, “Bisesa” (dans L’homme qui voulut être roi), Borges m’interrompit après une scène où une veuve hindoue envoie à son amant un message composé de plusieurs objets emballés ensemble. Il en souligna la justesse poétique et se demanda à haute voix si Kipling avait inventé ce langage concret et cependant symbolique.

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Un numéro renvoyait à une note en fin d’ouvrage :

A l’époque, ni Borges ni moi ne savions que le “paquet-message” de Kipling n’était pas une invention. D’après Ignace J. Gelb (The History of Writing, Chicago, 1952), au Turkestan oriental, une jeune femme envoya à son amant un message consistant en une poignée de thé, une feuille d’herbe, un fruit rouge, un abricot sec, un morceau de charbon, une fleur, un morceau de sucre, une aile de faucon et une noix. Le message signifiait : “Je ne peux plus boire de thé, je suis aussi pâle que l’herbe sans toi, je rougis quand je pense à toi, mon cœur brûle comme le charbon, ta beauté est celle d’une fleur, ta douceur celle du sucre, mais ton cœur est-il de pierre ? Je volerais vers toi si j’avais des ailes, je suis à toi telle une noix dans ta main.”

Un peu plus loin, une citation que je ne peux laisser passer, d’Ezechiel Martínez Estrada :

Lire est une des formes les plus délicates de l’adultère.

Photo d’en-tête © Pepe Pont