Mon top 10 des régions 2016: N°8: Majorque (Espagne) (Entrée)

Publié le 10 février 2016 par Romain Delannoy

Retirer de la liste des endroits à ne pas faire

Il y a encore 2 ans, Majorque figurait sur ma liste maudite. Sur cette liste sont notés les noms de Dubaï, Ibiza, le Cap d'Agde et Las Vegas également. Des temples de la culture bling bling ou du tourisme de masse d'où je reviendrais sans n'avoir rien appris, rien pu voir avec la foule. Je suis de ce genre de touristes chiants: je n'aime guère m'amuser comme les autres. Mais qu'a-t-il bien pu se passer alors en 2014 pour que je me désinhibe? L'organisme Lonely Planet l'avait justement auréolée du titre des 10 régions à visiter en 2014. J'ai réfléchi et j'ai combattu mes démons intérieurs. J'allais passer une semaine dans cette île qui ne me disait pas grand chose. Mais certainement pas l'été pour camper à côté des topless et des bandes de jeune venus se saouler sur la plage. Je choisis donc février quand je fus sûr que tous ces touristes étaient planqués chez eux. De là, j'atteris à Palma de Majorque, la grande ville. Du bus, je vois des barres, une plage comme dans toute station balnéaire et des monstres flottants: les paquebots Costa Croisière. C'était bel et bien l'enfer où j'avais mis les pieds. Du moins mon enfer. Seulement, quand j'entrai dans le centre de Palma, il me plut tout autant que l'appartement. Peut-être y avait-il quelque chose à sauver. Et au fil de mon séjour, ce qui devait me plonger dans les ténèbres m'irradia de beauté. Et le périple se transforma petit à petit en paradis. Bien sûr, je n'ai pas échappé à quelques désagréments: des grottes avec spectacle de son et lumière complètement abrutissants, des cars de touristes de vieux car on ne voudrait pas les exposer à la canicule ... Cependant, j'ai découvert à Majorque une authenticité. Pour s'en apercevoir, il faut quitter les plages et le sud de l'île. Cette authenticité est d'abord transmise par ces villages. D'ailleurs, l'un d'entre eux attire les personnalités depuis le XIXe siècle. Son nom ne restera plus confidentiel bien longtemps même s'il ne l'est déjà plus vraiment. Valldemossa était le refuge de George Sand le temps de quelques mois avec son amant Chopin. Pouvoir vivre son amour de la foule parisienne, c'était encore possible à Majorque. Allez demander aujourd'hui à Michael Douglas qui y a élu résidence secondaire si personne n'essaie de le traquer. Je n'ai pas poussé loin l'investigation et ne comptez pas donc sur mes bons tuyaux pour connaître rue et numéro. On le comprend Michael. Après des mois à tourner pour des films et engranger un max de poignon, perché sur les collines, il en prend plein la vue. Les terrasses anciennes en pierre et les oliviers changent littéralement des plateaux de Los Angeles. Valldemossa est le village le plus fréquenté mais il y en a d'autres : Deia, Biniaraix, Pollença (ce dernier étant aussi à la mode) ... Ils sont reliés par un superbe chemin de randonnée qui nous conduit dans les montagnes de la Serra de Tramuntana, en arrière du littoral qu'on n'aperçoit presque jamais. Et c'est à l'ombre des petites places, prenant un café au milieu du vide ou d'un ou deux villageois qu'on redécouvre la quiétude et qu'on repose ses petits pieds avant de repartir le lendemain dans des paysages façonnés par l'Homme. On se croit parfois dans des contrées sud-américaines où les moutons ne se font pas de bile. C'est aussi l'occasion de découvrir un ovin particulier: la chèvre de Majorque, votre nouveau compagnon de voyage au pelage brun/ roux et à la queue noire. Elle escalade les terrasses en pierre dédiées à l'agriculture avec une agilité déconcertante. En traversant les villages, il nous prend parfois l'envie de redevenir le chenapan que nous étions jadis, chapardant les oranges de Soller bien juteuses ou les citrons. Mais nous sommes des adultes alors nous irons les acheter au marché de Palma. Si la côte nord vous a plu mais qu'il vous manque un peu, beaucoup de plage alors la côte est saura le palier. D'aussi belles randonnées vous y attendent, plus confidentielles, impraticables avec des enfants car les sentiers s'effacent à certains endroits et que pour atteindre la plage, il vous faut descendre de très gros rochers pas taillés pour la marche. Et là, le rêve, nous nous posons sur une crique, notre crique car nous y sommes seuls et n'avons ce jour là l'intention de divulguer le chemin à personne. Je me pose au son des vagues mangeant les spécialités que j'ai achetées dans la ville fortifiée d'Arta. Nous sommes en février. La Méditerranée n'est pas encore une grosse baignoire à température ambiante. Tant pis pour le maillot de bain. La liste des destinations maudites s'amoindrit comme fond une peau de chagrin. Je l'aimais bien cette liste car elle me permettait d'êre moins frustré à la fin de ma vie. Je ferme les yeux et je me dis que je peux tenter de présenter Majorque dans les régions à visiter. Peut-être même qu'un jour Las Vegas et Dubaï auront aussi cette chance.

3 bonnes raisons d'y aller en 2016:

- pour ceux qui y sont déjà allés, il serait bien de décoller des plages et de visiter la Serra de Tramuntana

- pour ceux qui n'y ont jamais mis les pieds, c'était une terre idéale pour les randonnées

- parce que Majorque restaure depuis peu ses fincas, d'anciennes villas campagnardes mais aussi des fermes. Elles sont aujourd'hui reconverties en musée ou en hébergement.

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Dans l'actu:

- Majorque a beau être porté sur l'industrie touristique, ça ne fait pas tout. Alors que les touristes aiment la mer, ils pourraient bientôt y voir des plateformes off shore. Vous l'aurez compris, du pétrole a été découvert dans l'archipel des Baléares. Les écologistes comme les lobbys touristiques s'insurgent contre cette probable exploitation. Une des raisons d'y aller en 2016: pour éviter de tremper ses pieds dans une marée noire.

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Mon top 5:

1) Torrent de Pareis (beaucoup moins agréable l'été)

2) la route du Cap de Formentor

3) la Platja de Coll Baix (une de ses criques géniales où vous ne serez pas embêté)

4) la route de Sa Calobra

5) Une randonné dans la Serra de Tramuntana en s'arrêtant à chaque village

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Côté gastronomie:

- Majorque a quelques spécialités bien à elles mais deux d'entre elles se détachent clairement. La première, c'est la soubressade, une saucisse pimentée (il existe aussi des versions douces) molle à tel point qu'on la retrouve étalée sur les tapas proposés dans les bars. Des tas de boutique vous en vendent. Côté dessert, c'est l'ensaïmada qui fait fureur, une sorte d'escargot à pâte feuilleté saupoudrée de sucre ou fourrée de crème. J'en ai même mangé une à la soubressade.

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A vos agendas:

- Le mois de février est idéal pour appréhender une Majorque apaisée. Pas tant que ça en fait car c'est le mois du carnaval. Le moins qu'on puisse affirmer, c'est qu'il est endiablé. Les habitants portent des masques démoniaques et jouent littéralement avec le feu. Attention aux étincelles. 

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La bonne adresse:

- A Palma de Majorque, vous pourriez passer devant cette porte cochère où est inscrit à côté sur le mur: Abaco. Jamais ne vous viendrait l'idée de la pousser d'autant qu'il n'y a aucune fenête sur ses murs hauts et épais. Et pourtant, il s'agit là d'un bar où les cocktails sont vendus à 15 euros l'unité mais dès que vous le franchissez, une corne d'abondance laisse tomber des fruits au sol, ce qui forme un long tapis sur lequel, vous ne marcherez pas. Au dehors, une volière et des fontaines et à l'intérieur, on se croit dans une boutique d'antiquaire. Je ne vous mets la photo que de la porte cochère pour ne pas trop divulguer les surprises qui vous y attendent.