Dans le ciel de Venise passe une comète avec une longue queue d’argent. Naturellement, les gens du peuple pensent que le phénomène est une prophétie annonciatrice de malheur.
Nous sommes le 18 novembre 1618, et à cette époque, les vénitiens ont peur de tous et de tout, et le Conseil de Dix ne manque pas d’abonder dans le sens de chaque « découverte d’un réel danger pour la Sérénissime ».
Venise, par Claudine Dossarps
La première peur est le feu :
Nous sommes à quelques années seulement après le terrible incendie au Palais ducal de 1577 qui ouvre vers de nouvelles peurs, toutes centrées sur les risques hypothétiques de feu et d’explosions : le feu peut surgir ne importe où et partout des saboteurs astucieux peuvent faire sauter tout ou partie des bâtiments. Il ya ceux qui se imaginent un incendie ou une explosion dans une cheminée, dans diverses salles, même dans les latrines, dans les prisons, dans le clocher, la forteresse du Lido, dans le grenier de la Chancellerie, à Rialto, dans les échoppes, dans les magasins autour de la place S. Marco…
La seconde grande peur est l’atteinte à la sécurité de la République :
Il y a ceux qui imaginent une possible attaque pendant le carnaval.
Circulent des listes d’espions et de traîtres, et l’on montre du doigt certains individus. Les Vénitiens sont prompts à craindre trahisons et conspirations, il ya ceux qui arrivent à imaginer des attaques combinées complexes par terre et par mer pour renverser la République, parfois avec une ressemblance frappante avec le projet de coup d’État attribué cette même année 1618 à Bedmar et Ossuna.
La quantité de suspicions dans les décennies entre la fin du XVIème siècle et le début du XVIIème est vraiment incroyable.Le Conseil des Dix ne néglige aucun des avertissements des citoyens, souvent motivés par l’amour du pays et l’argent. Les inquisiteurs d’État invitent les autorités compétentes à faire des inspections minutieuses et à prendre les mesures de protection appropriées, même si, bien sûr, il reste peu de témoignages de ces dangers qui furent attestés.