Les Buon ou Bon sont une célèbre famille d’artistes vénitiens du XVe siècle, à la fois architectes et sculpteurs, qui contribuèrent à fonder à Venise le style de la première Renaissance.
Il est assez difficile de les distinguer entre eux, de même que les Lombardi et les Massegne, et le catalogue de leur œuvre est loin d’être sûrement établi.
Nés probablement à Venise, ils habitaient la Contrada de San Marziale, près l’église Santa Maria dell’Orto.
Le chef de famille, Giovanni Buon, fils de Bertucci, conclut en 1423 le contrat pour la décoration de la Cà d’oro, un des plus remarquables édifices gothiques du Grand Canal. Il eut deux fils, Bartolomeo et Pantaleone.
Bartolomeo paraît avoir été le plus illustre de la famille. L’œuvre principale qui reste attachée à son nom et la seule qui soit absolument authentique (car elle est signée : Op. Bartholomei), c’est la superbe porte qui donne entrée au palais des Doges du côté de la basilique Saint-Marc. Elle était primitivement Porta dorata. On l’a appelée depuis Porta della Carte, parce qu’on y affichait les décrets publics.
Le 10 novembre 1438, Bartolomeo signe avec son père Giovanni le contrat par lequel ils s’engageaient à exécuter ce travail moyennant la somme de 1700 ducats d’or. En 1442, l’œuvre étant en cours d’exécution, ils promettent de la terminer dans le délai d’un an. Elle le fut seulement vers 1463.
Quelle a été la part du père?
On l’ignore. En tout cas, l’artiste qui a conçu cette riche décoration n’en était pas à son coup d’essai. L’architecture élégante et fine appartient au gothique fleuri le plus charmant. Les quatre Vertus placées sous des niches de chaque côté de la porte sont encore un peu raides et drapées lourdement. Mais la majestueuse figure de la Justice, qui trône au sommet du fronton, assise sur des lions, et surtout les pétulantes figures d’enfants nus qui grimpent dans le feuillage, le long des rampants, ont toute la liberté et la vie de la Renaissance à ses débuts.
Bartolomeo Buon occupe à Venise le même rang de transition que Nicolas d’Arezzo à Florence. Il est demi-gothique, demi-naturaliste et novateur. On peut rapprocher de la porte della Carta le tombeau du bienheureux Pacifico, malheureusement très mutilé, dans l’église des Frari (1437). Une décoration analogue orne les rampants de l’arcade : des figures d’anges musiciens sortant à mi-corps du feuillage et qui sont d’une grâce exquise. Quant au grand bas-relief du Baptême, c’est encore, malgré sa détérioration, un des plus beaux spécimens de l’art des quattrocentistes à Venise. On attribue également à Bartolomeo les sculptures de la façade de Santa Maria dell’Orto, série d’apôtres placés haut sous des niches, ainsi que le saint Christophe et les deux figures de l’Annonciation qui surmontent la porte.
Les Buon eurent une part importante à la construction du palais ducal, sans qu’on sache exactement ce qui leur appartient en propre. Les sculptures des chapiteaux sont d’un art antérieur. Bartolomeo travaillait au palais avec son frère Pantaleone en 1463. Il est nommé architecte en chef (proto) de l’édifice le 20 août 1492 et occupe ce poste d’honneur jusqu’en 1496; après quoi, son nom disparaît des comptes, peut-être mourut-il cette année-là, dans l’expédition maritime qu’il entreprend avec Marc Trévisan, grand amiral. Le Piero Buon qui travaille ensuite au palais (1496-1498) pourrait bien être son fils