Dans le cadre de notre « Spécial Halloween », nous souhaitons vous faire découvrir, en ce lendemain de fête, un village fantôme des Émirats Arabes Unis. Alors que les États-Unis sont reconnus pour héberger plusieurs « Ghost Town », dont celle de Rhyolite à laquelle nous avons consacré un billet il y a quelques jours, le Moyen-Orient garde le secret de ses villages désertés, qui demeurent très peu connus internationalement. Dans un billet antérieur portant sur notre road-trip sur la route des forts du Sultanat d’Oman, nous vous avons parlé du village fantôme de Birkat al Mawz. Aujourd’hui, nous vous proposons plutôt un petit tour à Ras al Khaima, afin de découvrir le village de Jazirat al-Hamra que nous avons eu l’occasion de visiter lors de notre expatriation familiale de trois années aux Émirats Arabes Unis.
Jazirat al-Hamra fut notre premier arrêt dans l’émirat de Ras al Khaima, où nous avions planifié passer le week-end avec nos deux garçons et des amis en 2012. Il faisait chaud, très chaud. Le genre de chaleur que l’on sait reconnaître après quelques années aux Émirats, un mélange de soleil brûlant et d’humidité. Une chaleur à laquelle on s’habitue, contrairement au froid québécois, mais qui continue malgré tout de nous incommoder. Une fois sur les lieux, nous étions perplexes.
Un ami : « Est-ce vraiment le bon endroit? »
Moi : « Ça correspond aux quelques photos que j’ai pu trouver sur Internet ».
Mon mari : « Ça va, allons braver la foule! » À noter ici qu’il s’agissait d’ironie, car nous étions les seuls visiteurs sur les lieux.
Bien que la foule ne fut pas un obstacle à notre visite, la température écrasante l’était. Nous avons quitté l’air climatisé de notre voiture à regret pour planter nos pieds dans le sable brûlant. J’avais misé beaucoup sur cette visite pour semer l’intérêt de cette excursion à Ras al Khaima dans l’esprit de mon fils aîné, qui souhaitait plutôt passer la journée à la plage de notre immeuble avec ses amis de Dubaï. Je lui avais dit qu’il s’agissait d’un village fantôme et que ce serait une aventure incroyable de le découvrir. À première vue, je dois dire que j’étais toutefois déçue des lieux. L’endroit était désert et silencieux. Des dizaines de maisons, plusieurs en pierre de corail, d’autres en béton, étaient alignées. Toutes pratiquement identiques. Toutes vides. Contrairement aux adultes, les enfants étaient euphoriques à l’idée de sortir de la voiture, après une longue route, afin de découvrir le village déserté tout en se dégourdissant les jambes. Très vite, mon fils aîné s’est improvisé une carte avec un bout de je-ne-sais-quoi trouvé sur le sol… Il faut dire qu’il y avait plusieurs débris. Il a commencé à l’interpréter, se donnant le mandat de trouver des trésors cachés dans ces maisons mystérieuses… Je lui ai alors raconté la petite histoire du village (du moins, ce que j’en connaissais), espérant ainsi alimenter son enthousiasme pour ce lieu plutôt dénudé. En voici les grandes lignes…
Jazirat al-Hamra est un village côtier dont le nom signifie « île rouge ». Il a été construit bien avant l’époque pétrolière, au XIVe siècle, lorsque les habitants de la région vivaient encore principalement de la pêche et de la perliculture. Et puis, le village fut peu à peu déserté à partir de la fin des années 1960.
Mon fils : « Pourquoi maman? Pourquoi les gens ont quitté leur maison? Moi, jamais je ne quitterai ma maison, je l’aime trop… » – Petit pincement au cœur pour moi, sachant qu’il devrait la quitter l’année suivante…
Moi : « En fait, il y a plusieurs explications possibles. Certains disent que c’est en raison d’une dispute entre une tribu et des dirigeants de la ville. D’autres sont plutôt d’avis que les habitants pensaient faire plus de sous en allant vivre ailleurs… Mais certains affirment aussi que c’est parce que le village serait hanté… »
Mon fils : « Ah bon? » [l’air à la fois curieux et solennel]
Évidemment, comme tous les enfants, mon fils aimait bien la théorie du village hanté. Il faut dire que près de cinquante ans s’étaient écoulés depuis le départ des centaines de familles qui habitaient ce village. Les divers bâtiments étaient dans des degrés divers de dégradation, mais plusieurs demeuraient presqu’entièrement intacts, contrairement à de nombreux villages émiratis qui ont été abandonnées au cours de la même période. Pour une raison que j’ignore, ce village avait résisté… Certains prétendent que ce sont des Djinns qui auraient fait fuir les habitants et que le village serait toujours hanté. Ces créatures surnaturelles se présenteraient aux visiteurs sous différentes formes, que ce soit une chèvre ou un chat, et auraient la capacité de contrôler les humains psychiquement. En 2013, le film Djinn y a d’ailleurs été tourné, attirant un peu l’attention sur ce village mystérieux. Pour notre part, nous n’y avons croisé aucun fantôme résident… À notre connaissance du moins! ;-)
Notre visite du village hanté fut trop courte pour en mesurer pleinement l’aura de mystère qui s’en dégage. Au risque de susciter quelques cauchemars (qui ne se sont pas concrétisés au final), j’ai continué à parler de ce lieu à mon fils. Pas sur place, car il faisait trop chaud pour papoter tranquillement au soleil. Certains bâtiments semblaient aussi habités à nouveau, alors nous étions un peu inconfortables de nous y balader. Mais une fois à l’abris des rayons brûlants, dans la fraîcheur de la voiture, j’ai continué mon histoire… Je ne crois pas aux esprits, mais j’aime bien ce genre d’endroit qui laisse rêveur.
Et vous, la théorie du village hanté, vous y croyez?