Fashion read

Publié le 21 octobre 2015 par Pomdepin @pom2pin

Je ne lis jamais la  presse dite féminine. J’ai essayé quelques fois, pour faire plaisir à des connaissances qui prétendaient que caustique comme je suis (déjà, je l’ai mal pris…depuis quand je suis caustique? C’est contagieux? ), j’allais a-do-ré l’article désopilant sur les belles-mères ou celui hilarant sur la bonne copine nymphomane. Ah. Non seulement j’ai l’impression que c’est toujours la même daube faussement irrévérencieuse depuis 20 ans, qui déjà ne me faisait pas rire, mais surtout je déteste être prise pour une demeurée profonde. Mais je suis accro aux new et je suis abonnée au Times en ligne. C’est captivant tout ça, attention, si ça  continue je vais vous  raconter ce que j’ai mangé ce midi…enfin bref, dans le Times, il y a une rubrique « Life » qui sert à caser tout ce qu’ils n’ont pas pu mettre ailleurs. C’est sensé être pour les lectrices, d’ailleurs on ne peut pas s’y tromper, l’onglet est violet. Ça va des recettes de cuisine, aux voyages,  en passant par les conseils d’une psy ou quelque chose comme ça qui a l’air éveillé d’une huître lobotomisée sur sa photo et donne des tas de conseils avec un aplomb admirable aux lectrices qui ont des problèmes existentiels  majeurs: mes petits-fils sont agités, docteur que faire? Ma soeur est moche, dois-je lui dire ? Et donc forcément, il y a une rubrique mode. C’est là que je voulais en venir depuis le début. 

Généralement je préfère regarder le même épisode de Fireman Sam en boucle pendant des heures accompagné au ukulélé par L’Ado que de m’y aventurer, mais là le titre m’a attiré: s’habiller selon qu’on est une pomme ou une poire. Forcément, avec notre pommier fou, j’ai des tas de fruits dans le jardin, je ne savais pas que je devais leur tricoter des petits pulls. C’est embêtant, surtout que je n’ai jamais tricoté autre chose que des trous. Alors donc, pas du tout, il ne s’agit pas d’habiller son verger mais soi-même. J’étais un peu déçue. Enfin, quand je dis soi-même, j’extrapole, parce que à en juger par les photos, on parle surtout de gamines qui ont 12 ans et demi, pas plus, et ont toutes les formes épanouies d’un fil à souder après étirement. Et bien, j’ai encore tout faux, il y en a qui sont en forme de pommes et de poires! Si. Il va falloir que je retourne chez l’ophtalmo. Pour moi, elles ont toute la même forme (et la même tête aussi d’ailleurs) qu’un phasme. Ça m’étonnerait que cette bestiole, charmante au demeurant passe des heures devant sa penderie tous les matins en se demandant ce qu’il doit mettre pour cacher ses genoux cagneux ou sa poitrine asymétrique.

  
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Il semblerait donc que je m’habille en dépit du bon sens depuis des années, à vouloir mettre des vêtements pour la bête raison qu’ils me plaisent et que je me sens bien dedans. Cela dit, je ne rentre dans aucune des rubriques de l’article. J’ai bien cherché, j’ai trouvé les conseils pour les pommes, pour les poires, pour les sacoches de bicyclette… Si par hasard quelqu’un se reconnaît dans la description, un seul truc : les toges (C’est marqué dans l’article, je n’invente rien). Et peut-être aussi une consultation chez un bon psy…mais rien pour moi, c’est à dire plutôt pomme de terre bouillie (pour rester dans les fruits et légumes). Il y a des idées pour celles avec un ventre bedonnant (illustré magnifiquement  avec une fille qui a tellement de ventre qu’elle en est concave), des grosses chevilles, des avant bras avachis…c’est curieux. Personne n’a dit à l’éditrice mode du Times qu’une femme n’est pas constituée en kit? Généralement tous les bouts ont tendance à aller ensemble. Parce que là, il y a un petit côté Frankestein…

On continue, les femmes avec un milieu large (attention, ça n’a rien à voir avec d’un ventre bedonnant, mais je ne sais pas pourquoi), celles ayant un débordement médian dû à l’âge mûr (on ne rigole pas) ou encore un centre élargi… C’est fou, j’ai bien  regardé  autour de mon  nombril, il ne se passe rien: mon ventre  est amorphe, il ne fait pas tout un tas de figures géométriques comme celui des journalistes mode du Times, c’est inquiétant. Avec tout ça, je n’ai rien trouvé pour la forme de serpillère avachie, je ne rentre  pas du tout dans les  cases du Times.  Je ne m’identifie ni à une pomme ni à une poire ni à un sablier…je ne fais pas une fixation sur mes coudes ou mes mollets. Je n’ai pas plus honte de mon bras droit que du gauche (d’ailleurs si vous avez un problème de bras ronds, évitez les imprimés léopard roses fluos.Je ne suis pas éditrice mode au Times, mais à mon humble avis, le conseil vaut pour toutes les formes de bras). En plus toutes les photos de l’article montrent des vêtements bizarres, coûtant un bras justement et importables en public, sauf pour Halloween. 

Ce qui me contrarie surtout, c’est que je n’ai pas l’impression que dans les autres rubriques du journal (News, opinion, éducation…), on  éprouve le besoin d’insulter  les lecteurs  en les traitant de fruits difformes.  On a même plutôt tendance à s’adresser principalement à leur cerveau plutôt qu’à leurs complexes. On peut parler mode sans prendre ses lecteurs pour des imbéciles, je connais des blogueuses qui font ça très bien. Le Times est un excellent journal, alors pourquoi dans la rubrique féminine, on ne parle plus aux neurones des lectrices mais on ne s’intéresse qu’à la taille de leur fessier?