Se perdre dans l'Isola di Olivola *

Publié le 22 août 2015 par Venetiamicio







Combien de Vénitiens ne mettent jamais les pieds dans ce quartier de Quintavalle di Castello, qui, serré entre l'arsenal d'un côté et les jardins de l'Exposition de l'autre, s'étend vers le Lido sur une partie de la lagune  que même les barques des promeneurs négligent ? Avant d'y retourner ce matin, je n'en gardais qu'un souvenir d'enfance : une petite cour où j'allais voir les impiraresse - les enfileuses de perles - dont le travail me fascinait. Assises, chacune devant sa porte, une petite chaise de paille, et sur leurs genoux une cuvette de bois pleine de petits grains de verre aux vives couleurs, elles y plongeaient, levant et baissant la main d'un mouvement rapide, un fil de fer très long, très mince, bien plus mince qu'une aiguille, et si luisant, le long duquel coulaient les petites gouttes bariolées.
Quartier fragile aux rez-de-chaussée entassés, il est tellement plus ressemblant aux îles qu'au reste de la ville : on en retrouve, sur les murs lézardés, les claires et franches couleurs - le rose y parait déjà, et le jaune pur - et l'existence autonome des maisonnettes, pourtant si serrées, et le large canal presque marin; le long duquel sèchent des filets et des cordes, et où flottent de petites barques de lagune fatiguées par les trop lourdes charges, mais si vives sur cette eau mouvante. Les coups de quelque pêcheur rapiéçant sa barque accompagnent, espacés, le martèlement rythmé de l'arsenal dont le mur rose apparaît à chaque bout de calle, et s'épanouit, clair, sur le canal....
[Extrait d'un carnet vénitien de Liliana Magrini]

* l'île de San Piero di Casteo s'appellait aussi l'isola di Olivolo, peut-être sa forme en olive ou tout simplement parce qu'il y avait une oliveraie autrefois, tout comme aussi un château d'où Castello.

À chaque fois que je vais faire un tour dans l'île de San Pietro di Castello, je suis attirée par ce lieu et cet escalier, qui malgré un certain abandon me plaît toujours autant.
Autrefois, au retour de mes longues promenades, je m'arrêtais toujours sur le Campo S'Polo pour me fondre dans la vie vénitienne. Regarder les enfants qui jouaient, écouter sans trop comprendre les Vénitiennes qui papotaient et c'est là que j'ai vu ces femmes qui fabriquaient des fleurs en perles minuscules et colorées. J'étais fascinée par le mouvement rapide de leurs doigts et c'était à contre coeur que je quittais ce lieu serein et joyeux.