Marathon de San Francisco 2015

Publié le 07 août 2015 par Anlc
En 2014, je postais un article intitulé "Le marathon de San Francisco"  pour décrire notre premier voyage en Californie afin de poser les bases de notre installation. Quelques mois plus tard, avec notre visa en poche, je courais le semi-marathon de San Francisco avec un chrono qui reste mon meilleur sur cette distance à ce jour. Cette année, il était donc temps de courir mon premier vrai marathon complet !
Avec mon frère Fred sur le Golden Gate Bridge. Tout va bien, nous avons encore toutes nos provisions à la ceinture ou presque !
Un marathon commence bien avant le jour de la course. Pour ma part, c'était six mois d'entrainement dont les trois derniers avec 4 séances d'entrainement par semaine (dont quatre séances de plus de 20 kilomètres de long, soit deux heures de sortie minimum...). Ces mois ont été longs et fatigants au point qu'avant même de débuter la course, je disais que ce serait mon premier et dernier marathon. Ai-je changé d'avis depuis ? Nous allons bientôt le savoir...
Récupération des dossards la veille à Fort Mason et pose avec Thomas devant le parcours de la course
Le marathon démarre très tôt (5h30 du matin) et notre objectif de chrono (4h15) nous placait dans la cinquième vague de départs, à 6h du matin. Et oui, on ne lance pas 25 000 coureurs d'un coup comme ça ! La famille nous dépose à 500 mètres de la ligne de départ avant de partir plus loin pour nous encourager tout au long de la course. Nous arrivons dans notre zone de départ peu de temps avant la fermeture des grilles, puis c'est parti !
Une petite grimace sur le Golden Gate... Peut-être parce que le type devant nous semble avoir le bras gauche dysloqué ?
Dix premiers kilomètres : Le marathon étant une course très longue (42,195 kilomètres), il se court plus lentement que ce dont on a l'habitude. Les premiers kilomètres sont donc agréables et faciles, si ce n'est qu'il faut se faufiler dans la foule de coureurs, certains marchant dès le deuxième kilomètre ! Nous passons le plus clair du temps à doubler beaucoup de monde, tous ceux qui étaient visiblement beaucoup trop optimistes et s'étaient inscrits dans une vague de départ finalement trop rapide pour eux.
Dans la montée du Présidio, frais comme des gardons ! 
Dix septième kilomètre : La montée du Présidio, tellement difficile l'an dernier, s'avale facilement. Voir tout le monde autour de nous marcher ou souffrir nous booste le moral (sadiques !) car on se sent d'autant plus en forme. L'entrainement semble avoir payé ! Nous passons devant Adeline, Thomas, mon frère Alex et mes parents pour la seconde fois dans cette montée, d'où la photo ci-dessus.
Vingt-troisième kilomètre : Nous croisons le départ du second semi-marathon dans Golden Gate Park. Les types nous passent comme des fusées ! C'est aussi l'entrée dans la zone inconnue pour nous, la seconde moitié du marathon ! Quelques douleurs musculaires commencent à se faire sentir, mais rien de grâve pour le moment. Je continue à prendre une gorgée d'eau énergisante toutes les 5 minutes et un gel toutes les 45 minutes. C'est 800 calories d'ingérées tout au long de la course !
Passage devant la famille au trentième kilomètre, avec le sourire pour le moment...
Trente et unième kilomètre : Deux cent mètres après avoir passé la famille, et après avoir franchi le cap des trois heures de course, c'est le drame : Je découvre le fameux mur du marathon. Sans prévenir, mes deux jambes lâchent d'un coup, comme une voiture qui n'aurait plus de carburant, et me voilà contraint à l'arrêt, trainant péniblement un pied devant l'autre... Je suis pratiquement paralysé, et si le phénomène n'est pas forcément douloureux, il est vraiment surprenant ! Fred s'éloigne alors que je pense aux douze derniers kilomètres qui s'annoncent longs et difficiles...
Après deux à trois minutes de marche, mes jambes reviennent aussi subitement qu'elles étaient parties, et je peux à nouveau courir ! Un peu de glycogène de généré, et ça repart !
La souffrance a un visage...
Trente sixième kilomètre : Je marche désormais à chaque ravitaillement pour bien m'hydrater (eau + boisson énergétique), ne pensant plus au chrono mais simplement à finir la course. Les gels énergétiques font un grand bien également, et chaque ravitaillement me permet de tenir jusqu'au suivant. Deux petits rappels du "mur" me contraignent à de nouveaux ralentissements, mais sans jamais m'arrêter : C'est dur mais on y croit !
Ce type a fait le marathon en tenue et chaussures militaires avec le drapeau US sur l'épaule. Chapeau !
De 37 à 40 kilomètres : Les douleurs sont désormais présentes en continu et plein de choses bizarres passent dans ma tête. Parfois j'ai les larmes qui montent aux yeux, deux minutes après j'ai le sentiment d'être euphorique... Car aussi dur que l'épreuve soit, après avoir couru 38 kilomètres, un sentiment d'invincibilité commence à poindre, une immense fierté, une énergie qui vient d'on ne sait où... Il ne reste vraiment plus grand chose d'autre que le mental pour aller au bout.
Deux derniers kilomètres : Les plus longs ! A l'entame des deux derniers kilomètres, mes jambes sont comparables à deux réacteurs en feu qui attendent que l'avion s'écrase. Que faire dans une pareille situation ? Accélérer, bien sûr ! Me voilà parti pour les deux kilomètres les plus rapides de toute la course. On nous annonce le dernier mile (1,6 kilomètre) qui semble interminable, alors j'accélère encore un peu...
Je double à nouveau du monde, ignore le dernier ravitaillement et voit enfin la bannière de la ligne d'arrivée, que je franchis les bras en l'air pour la première fois de ma vie ! Marathon, je t'ai vaincu !
Le sourire est de retour avec la médaille. 4h18 minutes, c'est 3 minutes de plus que mon objectif, mais peu importe ! I did it!
Je retrouve Fred, qui n'a pas eu de défaillance physique, aidé par ses 4 ans et 10 kilos de moins pour terminer en 4h09 minutes. Nous rejoignons la famille pour une dernière photo devant le Bay Bridge :
42 kilomètres et toujours debout !
Nous aurons mal au jambes pendant trois jours après la course. C'était dur, mais je m'attendais à tellement souffrir qu'au final, à l'exception du mur, ce n'était pas si différent qu'après un semi-marathon... Le plus beau, c'est que je n'ai jamais songé à abandonner. Même au plus bas physiquement parlant, ma priorité restait de mettre un pied devant l'autre coute que coute pour approcher de la ligne d'arrivée...
Mon sentiment (et mon état physique) à la fin de la course m'ont rappelé ce que disait Rust Cohle à la toute fin de la saison 1 de True Detective, alors qu'il contemplait un ciel étoilé, demandant à Marty si selon lui l'obscurité ou la lumière l'emportait :
"Avant, tout n'était que ténèbres. Si tu veux mon avis, la lumière est en train de gagner"
Dès la fin de la course, je songeais déjà à refaire un marathon, donc j'imagine que oui, malgré la souffrance, la lumière a fini par gagner. J'en choisirai certainement un plus plat que celui de San Francisco pour pouvoir améliorer mon chrono, et cette fois-ci en partant une ou deux vagues plus tôt histoire d'éviter tous ces dépassements qui font perdre de l'énergie.
Peut-être songer à davantage de diététique avant la course pour accumuler davantage de glycogène et éviter le "mur", ou le repousser aussi loin que possible en tous cas...
Dans tous les cas, même si courir un marathon n'est probablement pas pour tout le monde, c'est une expérience à essayer ! Ne serait-ce que pour voir la lumière à la ligne d'arrivée !