Nouvelle interview sur le blog, celle d'Alizé et Maxime qui voyagent depuis 5 ans, à travers la planète, se posant ça et là, pour apprendre une langue, ou bien savourer le goût d'un autre café... Un mode de vie qui me plait bien, m'inspire et me fait réfléchir, comme vous le verrez à la fin de l'article. Lisez, et puis dîtes-nous ce que vous en pensez!
1/ Bonjour à tous les deux, pour ceux qui ne vous connaissent pas, pouvez-vous vous présenter?
On est un couple de globetrotteurs, qui voyage en continu sur les routes du monde depuis 2010. Maxime est canadien et moi, Alizé, je suis d'origine belge. On s'est rencontrés en voyage, lors d'un séjour en Tanzanie et depuis on ne s'est plus quittés. On partage notre mode vie et nos bons plans de nomades et de slow traveler sur notre blog Détour Local.
2/ Vous êtes sur la route depuis quelques années déjà, pouvez-vous nous faire un rapide topo de votre expérience de voyageurs?
Après avoir passé six mois en Tanzanie, où j'effectuais mon premier job dans un bureau d'architecture et où Maxime avait un échange de services avec un hôtel dans la ville de Dar es Salaam, nous avons commencé notre aventure commune en Europe. En passant par les festivals d'Espagne, d'Allemagne, de France et de Belgique, on s'est finalement posé six mois, juste avant la tombée de l'hiver, dans les Alpes françaises pour y travailler comme saisonnier. Nous avons pu y mettre un peu d'argent de côté, afin de repartir de plus belle, au printemps, à la découverte des fjords norvégiens et de son soleil de minuit, pendant cinq mois. Nous y avons fait une panoplie d'échanges de services et de rencontres singulières avec les gens locaux.
On s'est ensuite dirigés vers le Québec pour voir furtivement la famille de Maxime, avant de s'envoler vers Saint-Martin où nous avons séjourné sept mois. Après une escale en Jamaïque et à Cuba, on est finalement débarqués au Mexique où nous avons débuté notre dernière année en Amérique centrale. Le Guatemala, le Honduras, le Nicaragua, le Costa Rica et pour finir le Panama. Nous sommes actuellement au Canada depuis l'automne pour expérimenter le passage de l'hiver sauvage et les grands espaces canadiens. Nous nous envolons très prochainement vers l'Europe pour y passer la prochaine année. Sans plans précis, nous vagabondons au gré de nos contacts, des opportunités qui se présentent à nous, en gardant toujours le cap sur des rencontres locales et en prenant le temps de vivre le pouls de chaque destination.
3/ Avant de partir, que faisiez-vous? Qu'est-ce qui vous a motivé à partir ainsi pour un voyage " sans date de retour "?
Alizé: Avant de partir, je finissais mes études entrecoupées de voyages. À chaque retour, je n'avais qu'une seule envie, repartir. J'ai goûté au voyage avec ma famille quand j'étais plus jeune, mais c'est vraiment lorsque j'ai pris une pause d'une année dans mon cursus scolaire, pour aller apprendre l'anglais en Nouvelle-Zélande, que j'ai pu toucher la liberté qu'offre le voyage à long terme. Là-bas, j'ai rencontré des gens partis de chez eux depuis plusieurs années qui voyageaient depuis longtemps en faisant des jobs à droite à gauche. C'est à ce moment-là que le déclic s'est fait et que j'ai réalisé que c'était exactement ça que je voulais faire moi aussi.
Maxime: Après des études d'ingénieur logiciel, j'ai été engagé directement dans une compagnie web qui oeuvrait dans la sauvegarde sur internet. Avec tout ce qu'un travail sérieux implique, je me suis rapidement rendu compte que je n'étais pas à ma place dans cette vie-là et que je voulais vivre autre chose. Le déclic s'est fait lors d'un voyage au Brésil où j'ai rencontré des voyageurs de longues dates qui m'ont donné le goût de ce mode de vie nomade. En rentrant, j'ai décidé de démissionner et de me consacrer à ma passion pour la photographie, afin d'en faire ma profession. Puis, j'ai compris que le voyage devait prendre plus de place dans ma vie. Alors, j'ai décidé de tout vendre mes acquis (meubles, électro-ménagers, appartements, vêtements, équipements électroniques, etc.) et de partir du Québec pour aller travailler à l'autre bout de mon pays, dans l'ouest canadien. J'y ai vendu mes derniers biens, ma voiture et enfin libéré complètement de toutes contraintes matérielles, je suis partie à l'aventure en Tanzanie, où tout a commencé pour moi.
4/ Comment choisissez-vous vos destinations? Quels sont les " critères " qui guident vos choix?
On choisit nos destinations par coup de cœur, par chance ou par simple opportunité spontanée. Nous avons parfois un projet, une idée, une aventure qu'on a envie de vivre et qui nous emmène vers tel ou tel pays. Que ce soit quand Maxime voulait goûter le meilleur café jamaïcain ou quand Alizé voulait apprendre l'espagnol au Guatemala, on est toujours guidé par nos envies d'apprendre quelque chose de nouveau et de vivre des expériences différentes.
Comme on n'a pas de date de retour, on n'est pas tellement pressé de tout voir et de tout faire. On apprécie plus une destination, par ce qu'on y a vécu, que par ce qu'on y a vu.
5/ Depuis près de 5 ans sur la route, vous devez avoir une collection de souvenirs insolites: racontez-nous votre pire et votre meilleur expérience en voyage!
La pire expérience est une histoire qui ne nous est pas arrivée directement, mais à un ami proche rencontré en voyage.
Tout près du petit village de San Pedro la Laguna au Guatemala, au bord du lac Atitlán, notre ami débutait une belle randonnée nocturne jusqu'à un magnifique point de vue sur le lac et les montagnes environantes. Cette excursion se fait souvent de nuit afin d'arriver en haut, au moment propice du lever de soleil.
Arrivé quelque jours avant nous au village, il était donc parti avec un groupe de touristes, accompagnés de leur guide officiel, à l'assaut de cette randonnée en montagne très populaire. À peine la balade commencée, ils se sont faits agresser par une bande de jeunes armés de pistolets et fortement sous l'effet de drogue dure.
Dans la panique et la noirceur, les agresseurs ont tiré plusieurs coups de feu en l'air et tout le groupe s'est encouru dans tous les sens, sauf une jeune fille qui est tombée et qui s'est fait détrousser et un peu tabasser par les délinquants. Quelques instants plus tard, les autres se sont retrouvés plus loin et ont vite rebroussé chemin, afin de secourir la jeune fille. Leur guide a appelé la police en parlant très fort pour que les ravisseurs les entendent, et fuient. Ils ont retrouvés leur amie sur le sol, en boule, complètement hors d'elle. Ils ont tous portés plaintes, mais la police locale ne semblait pas très soucieuse de la situation et personne n'a été arrêté. Très nébuleuse comme histoire, elle a causée des petites vagues au village. La randonnée a été annulé par toutes les agences et la présence policière pour les autres excursions étaient de mise.
Même s'il ne lui est rien arrivé physiquement, notre ami a été tellement choqué par ces événements, qu'il en avait presque les larmes aux yeux lorsqu'il nous l'a raconté une semaine plus tard. Le fait d'avoir été si proche de gens désoeuvrés, prêts à tout pour de l'argent et surtout lourdement armés, lui a fait revoir ses perspectives de voyage et de vie. Avoir vu un pistolet à quelques centimètres de son visage, pistolet qui aurait pu facilement le tuer, l'a profondément bouleversé.
Ce genre d'histoires, sans être toujours aussi tragiques, nous ont été à maintes et maintes fois racontées durant notre séjour au Guatemala. Elles ne nous ont pas rassurés et ont laissé malheureusement planer un doute d'insécurité durant tout notre séjour dans ce pays magnifique.
Dans une ambiance totalement différente, notre meilleure expérience de voyage fût durant notre séjour dans le nord de la Norvège. On y faisait un échange de services dans une brasserie sur une minuscule île au niveau du cercle polaire, nommé Træna. Notre séjour là-bas coïncidait avec un festival unique en son genre : le festival de musique folk le plus au nord d'Europe. Cet évènement a fait augmenter le nombre de personnes vivant sur l'île de quatre cent à quatre mille durant le weekend le plus chaud de l'été. L'ambiance était géniale et on a même pu assister à un concert accoustique dans un cavité rocheuse habitée depuis la préhistoire. Complètement entourés de Norvégien, on a pu découvrir la culture nordique et rencontrer des habitants festifs et chaleureux.
On a évidemment dû travailler fort pour servir tous les festivaliers. Mais l'ambiance particulière de cette île du nord, nous a permis d'enchaîner les heures sans trop se plaindre. Et surprise, pour nous remercier, nos hôtes nous ont offert de nous emmener en bateau avec eux pendant cinq jours dans les fjords norvégiens. Au programme pêche, repos, visites uniques des îles des alentours. La générosité de ces gens et leur bonne humeur ont fait de ce séjour un des moments inoubliables de notre vie.
6/ Une question que se posent sûrement beaucoup de vos lecteurs: comment faites-vous pour financer votre mode de vie nomade?
La première chose à savoir est qu' il ne faut pas tant d'argent pour vivre et voyager à long terme. Surtout lorsque nos besoins primaires, soit de manger et d'avoir un toit où dormir, sont comblés par les différents échanges de services que l'on fait en permanence.
Après, il est évident qu'avoir un peu d'argent en poche est toujours bienvenu. Pour cela, nous travaillons dès que les occasions se présentent. Que ce soit comme serveurs ou vendeurs saisonniers dans un station balnéaire, comme baby-sitter ou prof de français dans une grande ville, il y a toujours moyen de trouver un job partout dans le monde.
Sinon, nous offrons aussi nos services de photographe et de web designer partout où nous allons.
Nous avons pour le moment essentiellement travaillé dans le domaine du tourisme, qui devient en quelques sortes notre spécialité. Nous débutons souvent par échanger nos services avec un hôtel ou un bed & breakfast, qui se finit presque toujours par un vrai contrat payant par la suite. Les gens apprécient beaucoup notre dévouement dans leur projet et ils sont notre meilleur publicité. Rien de tel que la bouche à oreille. Nous lançons d'ailleurs notre compagnie Yüna Design, très prochainement !
Ce qui fait vraiment la différence, c'est de revoir ses priorités, de diminuer au maximum ses dépenses et d'utiliser son temps comme monnaie d'échange le plus souvent possible. Il faut se rappeler que l'argent est un moyen et non pas une finalité. Ce n'est pas quelque chose d'indispensable à notre bonheur. Ce qu'on décide de faire de notre vie, oui.
7/ Vous avez travaillé dans de nombreux pays, et occupé différents postes: racontez-nous votre expérience professionnelle la plus insolite!
Le plus insolite des jobs payants qu'on a fait est peut-être quand Maxime a été filmeur (photographe pour touriste) sur les pistes de ski dans les Alpes en France. Il partait le matin avec son appareil photo argentique noir et blanc, prendre des photos des skieurs en vacances. Sans avoir aucun salaire fixe, il était payé à la commission en fonction de la vente de ses photos à la petite boutique du village qui les développaient. À longueur de journée au grand air, il discutait et faisait rire les touristes avec son accent québécois, avant de rentrer à la maison à l'aide de son snowboard.
Dans un climat beaucoup plus chaud, c'est au Costa Rica qu'on a fait le job d'échange le plus génial. On a bossé dans une ferme venant au secours des singes blessés. Notre travail consistait à s'occuper d'un petit bébé singe qui avait été retrouvé presque mort sur la plage voisine. On le nourrissait, on jouait avec lui et on devait aussi s'occuper des autres animaux de la ferme (poules, cochons, chèvres, chiens, chats,...). Le soir, on cuisinait avec les autres volontaires, avant de continuer les discussions autour d'un feu, bières bien fraîches à la main. Pour nous, c'était un job, mais surtout un style de vie de rêve.
8/ Après toutes ces expériences, quels tuyaux donneriez-vous aux voyageurs qui aimeraient eux aussi travailler à l'étranger: comment dénicher un job?
Trouver un job à l'étranger dépend beaucoup de votre débrouillardise. Les boulots de type vendeur, serveur, cuisinier ou tout autres emplois dans le domaine du tourisme, il y en a quasi partout, mais il faut être prêt à bosser dur pour un salaire qui souvent n'est pas très élevé.
Le meilleur conseil que l'on peut donner est de connaitre ses atouts et d' oser se lancer. Vos qualités vous permettront de vous faire valoir et vous aideront à dénicher un job où que vous soyez. Que ce soit votre maîtrise de l'anglais et du français, vos talents en web design ou en graphisme, votre organisation exemplaire ou vos qualités sportives, il y aura toujours quelqu'un qui pourrait utiliser vos qualifications en échange d'un salaire décent.
Sinon en terme plus pratique, en fonction du pays où vous êtes, écrivez un beau cv puis parcourez la ville en demandant à voir le gérant dans tous les endroits où vous aimeriez bosser. Il faut savoir se vendre en personne, être sûr de soi, flexible et prêt à s'investir. En générale, si vous parler anglais et français, ça ne devrait pas être trop compliqué. Encore moins, si vous réussissez à trouver ce qui vous fait ressortir du lot.
Nous avons écrit un article spécial à ce propos sur notre blog: Travailler et voyager, par où commencer
9/ Si un jour vous deviez poser vos valises plus longuement, où aimeriez-vous le faire? Est-ce qu'un retour en Belgique ou au Canada (pour une longue durée) serait envisageable pour vous? Pourquoi?
On nous pose souvent la question de la durée de nos voyages. Mais avec ce mode de vie assez équilibré et pour le moment parfait pour nous, on n'est pas encore prêt à nous arrêter.
On envisage bien sûr de fonder une famille, mais dans quelques années. À ce moment-là, on souhaiterait se poser plus longuement, afin d'offrir à nos enfants plus de stabilité quand ils nous le feront sentir. Ce qui fera pencher la balance pour le lieu de notre sédentarisation sera plutôt la communauté dans laquelle nous aimerions vivre plutôt que le pays en tant que tel. On aimerait faire partie d'un village qui partage les mêmes valeurs que nous.
10/ Pour suivre vos aventures, c'est où?
Depuis un peu plus d'un an et demi, on a eu envie de partager nos aventures sur notre blog Détour Local, avec une approche alternative sur le voyage au long court, le tour du monde lent, le volontariat, l'échange de service & l'expatriation. Le but de ce site est de montrer que voyager différemment reste à la porté de tous et qu'il y a différente façon d'aborder une destination.
Merci à Maxime et Alizé pour ce partage d'expérience!Ces deux-là mènent une vie qui me fait à la fois rêver et réfléchir: le mode de vie " nomade " est si loin du mode de vie " conventionnel "....
Avoir un CDI, être propriétaire, remplir un PEL... est-ce que ça rend vraiment heureux? Ou le faisons-nous " parce qu'il faut le faire" ? Mais pouvons-nous passer (perdre?) toute sa vie à faire " ce qu'il faut" ? " ce qu'il faut " , oui, mais pour quoi? Pour être heureux? Ben, pas forcément justement, ce mode de vie-là n'est pas toujours en adéquation avec les envies et les besoins réels de se faire plaisir, d'apprécier chaque jour et chaque nouvelle expérience.
Autant de questions que je me pose personnellement en ce moment, et que les réponses de Max et Alizé viennent bien chambouler!
Et vous, vous en pensez quoi, de tout ça?