SuperMum goes shopping


Comme beaucoup, je déteste aller faire les courses au supermarché, ça m’ennuie profondément. Mais il y a des fois, quand il n’y a plus une seule pizza dans la maison et un ado anxiogène en plein exam, c’est une question de survie. Pour L’Ado. Parce que c’est bien gentil d’être stressé mais il va falloir qu’il se calme, je suis au bord de l’infanticide. Enfin bref, j’ai été au supermarché. J’ai une vie trépidante. Mais je peux me rassurer en me disant qu’il n’y a pas que moi, puisque j’ai croisé SuperMum, rouge de honte et qui essayait de se cacher entre deux blocs de cheddar au rayon frais. 

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SuperMum au supermarché, ce n’est pas juste une mauvaise allitération, c’est une révolution! Quand je pense à tous ses longs discours moralisateurs contre les grandes surfaces qui ne font rien qu’à empoisonner nos enfants (pas les siens, elle, elle fait tout maison…ahaha) avec d’ignobles produits chimiques cancérigènes  sauvagement manufacturés dans des conditions que la morale réprouve par des trolls hargneux abusant sans scrupule de la naïveté de pauvres gens comme moi…je résume. Mais c’est idée générale. Jamais les enfants de SuperMum ne seraient venu à l’école sans autre chose dans leur lunch box qu’un risotto maison aux petits légumes sauvages…bien sûr, et elle a une rizière dans son jardin donc? Et je ne veux pas être tatillonne, mais si elle les cultive, ses légumes, c’est qu’ils ne sont plus sauvages. Et toc!

SuperMum a évidemment un allotment, un potager « ouvrier » (j’en ris encore…j’imagine SuperMum en bleu de travail, à la chaîne…) où elle fait pousser des tomates médiévales, des haricots péruviens et des topinambours maltais ou quelque chose comme ça. Elle y va tous les jours, avec ses bottes en caoutchouc à fleur (de chez Joules) et son panier en osier assorti. Rien que sa tenue équivaut au budget nourriture mensuel d’une famille normale. Mais je ne critique pas, elle a tout fait raison de jouer à la fermière habillée chez Cyrillus (c’est très chic et trois fois plus cher ici qu’en France) si ça l’amuse. Je rêve bien d’élever une vache potty trained (qui va aux toilettes), deux ou trois canards bien peignés et tout un tas d’animaux tous propres et qui sentent bons. Par contre, je ne vais pas faire la morale ma voisine qui n’a rien demandé quand elle achète des frites surgelées pour ses enfants. SuperMum m’a aussi expliqué pendant des années comment elle fait ses courses, loin des supermarchés, et tous les jours pour n’avoir que des produits frais: elle passe donc par une première ferme pour les œufs, puis elle revient en ville, chez un boucher écologique, elle repart vers un marché bio dans un village à plusieurs kilomètres, pour finir dans une deuxième ferme encore plus loin, pour le lait (elle se méfie du laitier, depuis qu’il n’a pas su lui dire si ses bouteilles en verre étaient recyclées au profit des enfants africain ou pas). Et encore si elle se décide pour du poisson, il faut qu’elle fasse l’aller-retour jusqu’à l’île de Mersea pour aller se servir directement sur la jetée (une bonne heure de route en plus)…elle y passe la moitié de la journée, mais c’est bon pour ses enfants. Sûrement. Mais peut-être pas pour l’environnement. Elle a pensé à la pollution due à tous ses kilomètres inutiles pour une simple salade de pâtes? Oui, mais non, mais je n’y comprends rien de toute façon (c’est marrant, quand SuperMum ne sait plus quoi dire, elle parle un peu comme L’Ado).

J’étais donc absolument ravie de la voir ce matin au supermarché. Un supermarché normal, pas bio, ni rien. A la limite, si SuperMum est obligée d’aller dans une grande surface, elle va chez Waitrose, le supermarché posh (chic) pour gens bien élevés  (bon, d’accord j’avoue, c’est chez eux que je fais mes courses en ligne, mais ils ont du pain mangeable et plein de produits français. Je suis faible). En tout cas, elle m’a tellement suriné pendant des années tout le mal qu’elle pensait des supermarchés pour monsieur tout le monde, que j’ai été mesquine. Alors que cette pauvre femme essayait de passer inaperçue, je me suis fait un plaisir de la saluer bruyamment. Je n’ai même pas honte.

-Quelle surprise de te voir là!

-oui, mais, en fait, c’est parce que mon beau-frère vient ce soir. Il est un peu…hum…spécial…mais tu achètes des pizzas surgelées? Tu sais ce qu’ils y mettent dedans comme poison? Tu ne vas quand même pas donner ça à tes enfants? 

-ben si, c’est pour L’Ado…

-mais c’est de l’inconscience!  Si il n’en meurt pas dans d’affreuses souffrances, il finira idiot, ces trucs là attaquent le cerveau ( je résume, mais c’était le sens de son discours horrifié, on sentait de suite que j’étais au mieux une meurtrière endurcie au pire, une mère maltraitant volontairement sa progéniture. Dans cet ordre.)

-justement, il a été invité par Cambridge. (j’en reparlerai, c’est une très légère exagération, mais on ne va pas chipoter!)

-oui…peut être…fais au moins attention aux autres, ils sont jeunes. Tu ne te rends pas compte évidement. Tout le monde ne peut pas être dévoué au bien être et à la réussite de ses enfants…

-au fait, il a quel âge, ton beau-frère? Il mange des chips en forme de nounours? 

Elle est partie furieuse, en grommelant quelque chose à propos d’une vente d’oeufs d’autruche dans un élevage bio au Nord du Suffolk (minimum 1h30 de route). Elle m’aurait bien proposé de l’accompagner, mais c’est réservé aux initiés. 

Je viens de me relire. Je ne sais pas si les supermarché sont aussi dangereux que SuperMum le dit, mais sa fréquentation, si. Parce qu’elle me fait devenir carrément méchante. Il faut que je fasse attention à éviter SuperMum à tout prix, elle est mauvaise pour ma santé mentale.