Comforting words


La blogosphère est un monde merveilleux. Je ne me contente pas d’y égrener mes petites histoires tous les jours, je vais aussi lire celles des autres, des histoires drôles, passionantes et parfois tristes. Et sous ces billets-là, remplis d’émotion, il y a tout un tas de commentaires tout aussi touchants, avec toujours le mot juste,  réconfortants sans être mièvres,  plein d’à propos…et le mien, complètement à côté de la plaque, qui fait tâche au beau milieu.

 Je suis incapable dans la vraie vie de trouver les bons mots en cas de problème, alors sur la blogosphère, ce n’est pas mieux. Je pourrais évidement m’abstenir d’écrire quoique ce soit, au lieu des platitudes maladroites et coincées que j’arrive péniblement à sortir, mais ce genre de silence embarrassé a souvent été mal compris. On m’a accusé d’être froide ou distraite, pour ne pas dire égoïste, alors que je suis juste terriblement gênée parce que j’aimerais aider mais que je ne sais pas comment m’y prendre. Je dis quoi à ma copine si anglaise (c’est à dire normalement d’un stoïcisme à toutes épreuves, » keep calm and carry on » et tout ça) dont la maman est très malade quand elle s’écroule en pleurant? Tout ce qui me vient à l’esprit est totalement dérisoire. Le genre de platitude qui me donne envie de mordre quand on me les sert, alors je ne vais les lui imposer.  

 Comforting words 
Je n’ai pas le sens des formules, les petits mots gentils des autres me touchent mais je suis incapable d’en faire autant, ce n’est pas que je ne veux pas, je ne sais. Heureusement, les anglais sont aussi doués que moi pour les grandes effusions, ils ont prévu toutes une série de formules toutes faites qui évitent de s’étaler en longs discours émotifs, qu’ils supportent très mal.  Il y a l’inoxydable « I am here for you » et sa variante, popularisée par le générique de Friends  « I’ ll be there for you ». En gros , je suis là pour toi, c’est pratique et suffisamment vague pour être poli sans engager à rien. Par contre, ça suffit aussi pour faire comprendre à ma copine anglaise qu’elle peut m’appeler à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit si ça ne va pas, je serais là. Pas la peine d’en dire plus, ça nous plongerait toutes les deux dans des abîmes d’embarras.

Il y a aussi le « thinking of you » que j’aime moins, c’est plus je-m’en-foutiste. Je pense à vous, alors bon, ça suffit comme ça, pas besoin de venir m’ennuyer avec vos histoires. Quoique ça veut aussi dire qu’une voisine a débarqué avec un plat de lasagne sous le bras à chaque fois que je suis rentrée de la maternité. Juste pour aider. Dans ces cas là, quand on soupçonne que la personne en face n’a pas le temps ou l’envie de cuisiner, on amène  toujours des lasagnes, je ne sais pas pourquoi. Quand une copine a déménagé et qu’elle a passé sa première soirée au milieu d’un tas de cartons, je lui ai porté  des lasagnes pour son repas du soir. Je m’adapte aux coutumes locales, j’avais même mis des petits pois dedans pour faire plus anglais, c’est dire. On ne viendra pas vous réconforter à grands coup d’embrassades ou de mots bienveillants quand ça ne va pas, mais vous risquez de vous retrouver avec suffisamment de lasagnes, données presque en silence et avec un air gêné, pour ouvrir un Resto italien. Pour faire bref, on dira « all the best » ou « best wishes ». Ça fait un peu carte de vœux, mais là encore, tout est dans l’intonation. « It Will be fine » est carrément d’ un optimisme délirant…Il n’y a pas à dire, j’étais faite pour vivre dans ce pays, où être complètement coincé est normal, voire même recommandé.

C’était ma minute linguistico-philosophique. Comme j’ai un chouïa plombé l’ambiance, et que demain, on vote pour un nouveau premier ministre, je vous parlerai des slips avec les portraits des candidats imprimés dessus. Ça se trouve dans le commerce, il fallait y penser. J’adore l’Angleterre.