Une arepa pour Noël et des chiens pour compagnie
La fin de mon voyage en Colombie approche. Pour l’heure, nous respectons notre feuille de route et arrivons le 24 décembre à Salento. 16h, nous avons notre logement. Il ne manque plus que quelques heures avant Noël. Un coucou à la famille en France s’impose puis le soir tombe et la faim se fait sentir. Nous partons à la recherche d’un restaurant… une pizza pourrait faire l’affaire mais bien mal nous a pris de compter sur un choix de restaurants ouverts le soir de Noël. Le paysage gastronomique ne fait pas rêver… Nous finissons par nous rabattre sur des stands de rue proposant des arepas au fromage. Qu’est-ce que des arepas ? Il s’agit d’une galette de farine mélangée à de l’eau revenue au barbecue ou grill. Les nôtres sont saupoudrées de gruyère râpé et voilà tout ! Bon appétit et surtout joyeux Noël ! Un brin bourratif, je finis par partager mon repas de Noël avec les quelques chiens venus nous tenir compagnie.
Après l’épisode du volcan, Salento fait office de base de repli, autrement dit repos complet et niveau d’activité ramené au plus bas. Aussi, nous ne verrons pas l’ombre d’un grain de café, étant pourtant dans la région la plus productive de Colombie. Salento, c’est en gros une petite ville coloniale avec des balcons et des porches de toutes les couleurs, une rue foisonnante de boutiques et le reste d’une tranquilité absolue. Pour trouver un peu de paix, il suffit juste de prendre une rue perpendiculaire à l’avenue principale d’où affluent tous les touristes. C’est plutôt « tranquilo » ici.
Les paysages alentours sont absolument magnifiques. Alors pourquoi partir quand on est si bien ? L’étape Salento passe de 3 à 4 puis 5 puis 6 jours. Xavi, un Espagnol tombé dans la France quand il était petit, se joint à notre philosophie du voyage. Nous partons tous les trois pour une excursion dans la vallée de Cocora dans le parc national de Los Nevados. Petits malins que nous sommes, nous décidons de faire le trajet en sens inverse afin d’éviter une montée bien raide que nous préférons prendre en descente. Unique en Amérique Latine, le parc naturel de Cocora est le berceau de l’arbre national « palma de cera del Quindio », qui culmine parfois jusqu’à 70 mètres de hauteur. Parsemés dans les collines et mélangés à une nature luxuriante, s’échappent de leur bouche des crachins de brume. Autant dire que je tombe sous le charme de ce paysage. Nous marchons 3 heures au total et rencontrons en sens inverse des marcheurs haletant défaits par la fameuse montée que nous dévalons à notre rythme.
De retour à Salento, nous finissons par nous décider à lever le camp. Nous estampillons l’auberge del Loro de nos drapeaux respectifs. France, Hollande et Espagne prennent donc le chemin du terminal de bus dans le but de rejoindre Medellín, la deuxième ville de Colombie, pour le Nouvel An.
Un Nouvel An à Medellin
Pas toujours évident de sentir ses proches loin du coeur au moment des fêtes. Heureusement, je suis avec mes deux compagnons de fortune. Avec nous, l’Europe est bien représentée. Nous célebrons le Nouvel An à la colombienne, passant de bar en bar à la recherche de la meilleure ambiance salsa. Un hamac chacun. Le jour suivant est forcément limité dans ses déplacements. Cela nous coûtera un effort surhumain pour en sortir et décider de notre formule repas. Voilà, la vie n’est parfois pas plus compliquée que ça. En voyage, elle est tout du moins assez intuitive… rien ne sert d’en faire trop ou pas assez. Le voyage à l’instinct est aussi une question de dosage.
Cependant, pas question de partir de Medellín sans visiter le musée de Antioquia rassemblant les donations de Fernando Botero. Sur la place principale, de nombreuses statues de l’artiste sont exposées et photographiées par les touristes. Botero est un artiste grandeur nature comme on pourrait le décrire. Ses oeuvres monumentales, qu’elles soient en peinture ou sculpture, représentent des personnages exagérément voluptueux, symbole selon Botero de générosité et de bien-être. Dans le musée, je me retrouve face à la représentation de la capture de Pablo Escobar, l’un des plus grands trafiquants de drogue des années 90 fusillé sur les toits de la ville alors qu’il tentait de fuir la police en 1993.
Medellin reste tout de même une ville assez curieuse pour moi. Elle fait partie de ces destinations où les touristes gravitent dans un même secteur avec multiples bars et restos et, comme un monde à part, le reste de la ville un peu chaotique où vivent les locaux. Je ne suis pas fan de ce genre de ville et ne comprends pas en quoi elle fait partie des must des touristes.
Mais Medellin reste une magnifique étape qui s’achève en même temps que le trio France-Espagne-Hollande. Xavi retourne sur Bogotà. Pour ma part, je continue avec Daan vers le Nord de la Colombie.
Cartagena, un irrésistible parfum cubain
Désormais, il me faut les Caraïbes. Direction alors Cartagena. Cartagena est à l’image de ce que je peux me faire de Cuba. Les couleurs des maisons, les rocking-chairs qui se balancent dans les courants d’air, les locaux qui bavardent aux pas de porte ou squattent le parvis de la petite église place de la Trinidad, Cartagena est une étape pour le plaisir des yeux. Assez touristique certes, elle est lumineuse et joyeuse.
Je suis néanmoins intriguée, pour ne pas dire effarée, par les différents visages de la ville. A notre sortie du terminal, nous prenons un bus collectif qui mettra plus d’une demi-heure pour rejoindre le centre ville que nous loupons d’ailleurs. Nous entrons tout d’abord dans une Cartagena chaotique. Les maisons disloquées, les espaces perdus, le chaos de la route… puis arrive la Cartagena de l’oncle Sam, avec ses gratte-ciels envahissants… pouuuuuh, l’architecture à l’américaine ne me fait pas rêver. Puis vient le micro-centre de Cartagena avec ses multiples hôtels et touristes qui vont avec. Les murs sont rouges, jaunes, bleus. Certains présentent de magnifiques oeuvres de street-art.
Malgré une impression mitigée, les quartiers Getsamany et du Centro sont irrésistiblement photogéniques et d’autant plus authentiques aux premières heures de la journée. Je me balade appareil en main, scrutant le moindre marchand ambulant avec sa charrette débordant de fruits, les Colombiens sirotant leur jus du matin sur l’un des bancs de la place de l’église… peu de véhicules pour le moment, la ville se réveille tout doucement.
Les Caraïbes, repos bien mérité
Avec les Caraïbes, je touche cette fois-ci l’extrême Nord de l’Amérique du Sud. De nouveau le bus. Après quelques heures de conduite, nous stationnons près d’une demi-heure sur le bord d’une zone industrielle à l’entrée d’une pompe à essence de la ville de Barranquilla. Le lieu est assez chaotique. Sur le bas côté, j’ose à peine regarder cet homme inconscient gisant sur le sol dans un état plus que déplorable. Autour de nous, s’affaire une troupe d’hommes complices avec l’équipe du bus chargée de leur trouver des passagers en échange d’une commission. Ils semblent bien se connaître. Les passagers sont presque poussés dans le bus. J’ai l’impression d’assister à une vente aux enchères tant l’affaire semble se conclure sur le fil.
Avant notre départ, je surprends le chauffeur demander à son collègue de glisser en douce un billet au policier planté juste sur le côté du bus histoire d’éviter une amende pour mauvais stationnement. Je n’ai qu’une hâte, quitter cet endroit ! Le littoral me rappelle vaguement Máncora au Pérou. De longues plages de sable s’étalent à l’infini bordées de palmiers et de petites barraques en bois. Nous posons nos valises à Palomino, un village coupé du monde à deux heures de la ville de Santa Marta. Pour rejoindre le bord de mer, nous devons marcher une quinzaine de minutes à travers des chemins de terre et sur la plage quelques hôtels se répartissent les touristes venus se prélasser sous les cocotiers. A Palomino, il faut prendre garde à ne pas se faire assommer. Les palmiers tapissent effectivement le bord de mer. Nous trouvons d’ailleurs une dizaine de cocos tombées sur le sable. Le lait on ne peut plus frais est délicieux et j’apprécie la chair tendre de la coco fraîche.
Palmiers, ciels étoilés, cocktails…. que demander de plus ? Seul nuage dans mon ciel, les événements du 7 janvier 2015 à Paris. D’un coup je me sens loin de mon pays et la distance amplifie mon ressenti. J’aurais aimé être là. Ce vent de solidarité unique parvient jusque sur les côtes des Caraïbes. J’en ai des frissons. Je manifeste mon soutien à ma manière en écrivant « Je suis Charlie » sur le sable, que j’entends comme un cri de ralliement à la liberté d’expression de tout être humain, quelles que soient ses origines, sa culture, sa religion ou non-religion. A par celà, RAS sur la côte des Caraïbes. Bien que les vagues soient assez fortes, je profite chaque jour de la plage. Ici, quelques animaux viennent nous rendre des visites surprises, dont des singes ou une paire de perroquets. Seul ennui, les moustiques. De nouveau ! Mais ceux de la côte sont particulièrement désagréables dans la mesure où ils sont porteurs du virus chikungunya. Nous nous aspergeons de répulsif à plusieurs reprises dans la journée et tentons de ne pas trop y penser.
Après Palomino, nous nous dirigeons vers le parc naturel de Tayrona. La tranquilité de Palomino est derrière nous car à Tayrona, tout aussi magique que soient les plages, ce parc reste malgré tout un temple à touristes. L’eau est certes bien plus cristalline qu’à Palomino, les criques sont paradisiaques mais ici, tout est fait pour que le touriste suive les règles du bon consommateur ! Les prix sont chers et le personnel du camping ne prend pas vraiment en compte les besoins de ses voyageurs. Ainsi à 20h30, notre table de repas disparaît quasi sous nos yeux et les lumières s’éteignent ! Le voyage en Colombie touche à sa fin. Nous remontons en direction de Bogotà en marquant une étape à Villa de Leyva.
Villa de Leyva
Dernière étape avant Bogotà et l’un des plus beaux ensembles coloniaux d’Amérique Latine, Villa de Leyva est une destination pour touristes mais reposante. De nouveau, je retrouve une charmante ville aux rues pavées et blanches. Nous y passons peu de temps, juste de quoi flâner dans les rues encerclant l’imposante plaza mayor avec son temple catholique imposant.
Bogotà et le musée de l’oro
Comme beaucoup de capitales en Amérique du Sud, Bogotà n’échappe pas à la règle. Dans cette ville gigantesque, je suis frappée d’entrée par la pollution. Nous attendons devant la porte d’entrée l’arrivée d’Eléonore, une amie de Paris qui nous héberge. Fin de journée, nous sommes loin des températures caribéennes, il faut dire que Bogotà est située à 2600 mètres d’altitude. Nous nous emmitouflons dans nos vêtements chauds et attendons patiemment. Notre look surprend un peu les passants qui nous regardent du coin de l’oeil. Les colocs d’Eléonore arrivent les uns derrière les autres. Je suis sous le charme de la maison. Belle ambiance ! Il ne m’en fallait pas plus pour faire mes adieux à la Colombie.
Nous disposons d’une journée pour découvrir Bogotà et fonçons au Musée de l’Oro. De l’or en collier, en coquillage, épée, bouclier…. Au travers des siècles, l’or a nourri les fantasmes des hommes les plus pacifiques aux plus frénétiques et dangereux de la planète. Une quantité astronomique de pièces de collection se répartissent en plusieurs pièces. Si je croule un peu sous ce déluge d’objets rares, je ne suis pas insensible à l’image que cela me renvoie. Je ne peux m’empêcher d’être désolée. En visitant les différents pays, les jolies villes coloniales, en écoutant les récits des locaux…il s’agit tout de même de pays qui ont été dépouillés et massacrés au nom de la religion et de l’argent ! Un thème toujours d’actualité malheureusement. Nous sortons du musée et faisons notre ronde dans les rues alentours. Sur la place Simón Bolivar, des crayons en papier et le drapeau français en soutien aux attentats de Charlie ont été érigés. Le centre se disloque entre rues pavées et maisons colorées, les typiques marchés d’artisans, les commerces en tout genre et les rues biscornues. Ainsi se termine mon voyage en Colombie…
Bonnes adresses :
Salento
Brunch de Salento, Calle 6 No. 3-25
Hostal Casa del Loro, Carrera 9# 8-3
Villa de Leyva
Hostal la rana, Calle 10a No. 10-31