Je l'écrivais dans mon dernier article, « La gazette de Ban Pangkhan, 28ème du nom », nous nous sommes rendus dernièrement à Ubon Ratchathani, situé en Isan de l'Isan ! Nous visitions notre grande fille, Tan, sur le campus éponyme de la ville se trouvant à quelques 10 kilomètres sur la N 24, celle qui longera la frontière Cambodgienne où de nombreux vestiges de l'époque Khmer la jalonne ; elle rejoint enfin la route N 2 quelques kilomètres au sud de Korat (Nakhon Ratchasima). Cette route, pour ceux qui voudrait d'ailleurs visiter l'Isan étant une très belle approche de la région, une fois à Ubon, vous serez alors tout près des rives du Mékhong que vous pourrez longez vers le nord pour rejoindre Nongkai. Un bel « Isan'tour » en perspective...
Ne nous égarons pas, revenons-en à nos buffles des rizières !
À peine arrivés, après quelques effusions très sobres, à la mode Isan, un waï et tout va bien (les conversations qui fâchent ou qui font rire seront pour plus tard?), il était alors presque midi, nous décidions d'aller dans un « mall-shopping center » (prononcer à la thaïe : môl-shopinggg-centeu), les gosses adorent et puis les ban nok (les ploucs) ne vont pas « à la ville » pour rien. On ne choisissait pas n'importe lequel de ces temples du « pour cent baths t'as rien », encore nimbé de ses chantiers d'aménagements extérieurs, nous allions au Central Plaza ! Le fiston avec son Pôpa, direction le Robinson, rayon des jouets pour approvisionner sa collection de voitures Cars ; Maman et Tan se mêlant à une foule d'adolescentes effarouchées qui de leurs cris stridents et hystériques bavaient devant une star d'un boys'band quelconque mais totalement inconnu au bataillon de Jeff de Pangkhan ; Un mouvement de hanches, du pied (gauche ou droit ?) ou un air de sa panoplie musicale déclenchait « Le cri » !
Le tour de tous les étages terminé, la faim nous assaillait ! J'avais lu et entendu dire que l'on mangeait de magnifique steak au sein des restaurants de la chaînes américaines Sizzler. Nous trouvions « le ranch » ! Déco quelque peu désuète, boite aux lettres d'un ranch isolé du middle west, banquettes, sièges et tables dans les tons brun-noire, lumière tamisée ! Pas grand monde dans l'endroit ! Sur la gauche un buffet d'entrée où le peu de clients pour ce jour pouvaient tourner autour tenant leur assiette taille dessert dans une main, une pince dans l'autre, à coté, sa « rivale », une vitrine de dessert était éclairée de lumières douces rose-violette. On s'installait. Horde de serveuses et serveurs, bruit de steaks que l'on grille dans les cuisines... On nous donnait chacun une carte, carte grande comme un dictionnaire encyclopédique, décidément, ce format encombrant est la marque de toutes les chaînes de restauration ! L'épaisseur de celle ci par contre n'avait rien à voir avec une quelconque volume Universalis. Quatre-cinq feuillets cartonnés, de grandes images, viande australienne... Oh la la ! Belle image et puis le prix en plus petit... 800 Baths et des poussières le steak ! Je n'avais pas mes lunettes, la tête de Ma Dame, me confirma que ce n'était pas un 3 mais bien un 8 qui trônait en pôle position ! Fatche, ils nous prennent pour des américains ! Nous étions assis, il fallait commander ! 3 filets bien bleu, une grillade de cochon pour Môman, elle n'a pu se résoudre à dépenser 800 baths pour un morceau de barbaque ; La serveuse qui avait rentrée toutes nos attentes dans une boite électronique style « paiement par carte » qui devait être relié à un terminal d'ordinateur en cuisine et sûrement à la caisse, nous faisait son speech : Boisson à volonté, certes pour le coca ou l'eau voire le thé, buffet d'entrée à volonté et celui des dessert aussi ! Ça, ça plaît au thaï, c'est gratis ! « flee » !
À la ferme Pon Yang Khram (Sakhon Nakhon)
On investissait le buffet : Crudités, quelques croûtons, une sorte de fromage râpé, des dés de lardons grillés, des fruits coupés triangulairement, des sauces sorties vraisemblablement de grandes boites 5/1, enfin du coup, puisque c'était gratos, beaucoup de ces produits sortaient des marchés locaux ! L'assiette est volontairement petite, il faudra se relever plusieurs fois si l'on veut se gaver, enfin, j'en doute, cet assortiment étalé à la vindicte stomacale est relativement insipide. De toute manière, les steaks arrivèrent très vite, pas de quoi sauter au plafond, à peine 200 grammes, accompagnement de frites surgelés et trois-quatre légumes (deux rondelles de maïs (me..e, on n'est pas des vaches), deux tranches de courgette, une ou deux asperges ! Sauce au poivre noir Maggi Maggi et hop, le tour est joué ! J'oserai dire que la viande était bonne (heureusement, il ne manquerait plus que ça!)... Le maxi verre de coca épuisé, la carafe arrive de suite dans la main de « tiens ! Une nouvelle serveuse ! » qui va tout mettre à niveau, même pour l'eau que je me suis offert généreusement. Pour le dessert, choix entre un carré de jelly rose ou verte ou une mousse au chocolat qui n'a que le nom, cela ressemblant plus à un morceau de plâtre mou au goût chocolat terminé au beurre de soja ! Check bill, please ! Oh joie, promotion sur les morceaux de viande que l'on avait commandés, seulement 790 Baths au lieu de 800 et quelques ! On a fait une affaire ! Je laisse un pourboire, ce n'est pas de la faute de la serveuse si ce qu'elle vend ne vaut pas le prix demandé !
Je me demande alors comment on en arrive à pratiquer des prix tels que ceux-là ? Infrastructure démentiel qui demande un nombre de cadres, roi du marketing que l'on doit payer grassement ? Actionnaire à rémunérer de plus en plus d'année en année ? Emplacement commerciale au sein d'une galerie commerciale d'une chaîne (une autre) les plus en vue en Thaïlande ? Les salaires des employés dévoués ? (je n'ose y croire!). Tour du monde des marchandises avant d'arriver sur la table ? Cet exemple de Sizzler n'est pas isolé ! Loin de là ! Déambulez dans cet antre de la consommation qu'est un mall et vous allez pouvoir égrainer un nombre d'enseignes incroyablement connu !
Allez, on y va ?
Mac Do, incontournable : Il y a trente ans, j'y allais dans celui qui allait être le premier à ouvrir ses portes dans le grand-ouest de la France ! Puis, deux trois fois par hasard lors de traversée du territoire national, à chaque fois me disant que l'on m'y reprendrait pas, pas bon, cher et en plus te laissant irrémédiablement sur ta faim... Deux heures après aurait-il fallu repousser les portes d'un autre fast-food de ce genre pour être rassasié de nouveau ? La dernière fois que j'y croquais, c'était l'été dernier, lors de la venue d'amis en Thaïlande, qui après dix jours de bonnes bouffes Isan, voire bien française à Ban Pangkhan, la femme (qui reste néanmoins mon amie à ce jour) se mit à avoir des spasmes devant l'enseigne et insistait pour aller se perdre dans cette bouffe infâme ! Et pourtant, j’abdiquais ! En sortant, je me disais bien que l'on ne m'y reprendrai plus, non mais !
Si on continue à lécher les vitrines de ces temples de la malbouffe, on tombera inexorablement sur un KFC ! Oh mince alors ! Un Kaka (ou cata) Food Center ! Mes enfants m'y ont traîné deux fois mais j'avais bien avant leur désir déjà tenté le coup ! Constat ? J'avais eu l'impression de manger du poulet pré mâché sous une croûte il faut le reconnaître croustillante si on avait eu la chance que le morceau de poulet incriminé n'ait pas passé plusieurs dizaines de minutes sur le passe entre la cuisine et le présentoir, là où l'on commande un des menus proposés ; Si le morceau avait traîné trop longtemps, il n'aurait fait aucun doute que cet habit de « nuggets » aurait alors été mou comme le dernier des marshmallows sorti des usines Haribo ! Les enfants, il est vrai, veulent s'y rendre pour le fun, le changement d'un traditionnel khao man kai d'un quelconque Food Center Park d'une grande enseigne tel Big C... D'ailleurs, les deux fois où ils ont réussi à m'entraîner malgré le sentiment de haute trahison envers mes convictions que je ressentais à franchir l'huis de ce genre d'endroit, ils ont opté pour des plats de la cuisine thaïe que cette enseigne a dû se résoudre à proposer à son menu sous peine de désinfection de l'endroit par la population locale...
Mon beau-frère travaille dans un abattoir de Selaphum qui suivant les arrivages d'élevages prédestinés à cette marque (mais aussi pour la multinationale CP d'ailleurs) a quelquefois ramené à la maison des bestioles non conformes au desiderata de ces deux marques pré citées et cela n'a fait alors que me conforter dans mon abjection à croquer dans quoique ce soit que pouvaient proposer KFC et CP. Je n'ai jamais vu un poulet, même à la grande époque du scandale des poulets brésiliens aux hormones, se rétrécir autant à la cuisson ! Le poulet mort une fois cuit ressemblait alors à un coquelet, un plat que j'aurai pu alors désigner pompeusement « Poulet à la sauce chérie j'ai rétrécie les gallinacées » ! Je ne m'étendrais pas non plus sur la façon dont mon beauf est payé (au rendement de la tête coupée et aux kilos d'entrailles extirpés de la bête), qu'il est appelé le matin même, pour « l'inviter » à être avec son couteau aiguisé, fin prêt dès la soirée venue et ceci depuis plus de dix ans ! Quand je vois le prix d'un baquet de poulet frit avec une petite frite, un demi litre de Pepsi, on pourrait se payer le double (voire le triple) de quantité de poulet au marché du coin et en plus de meilleur qualité ! Encore, une sombre histoire d'actionnaires, d'emplacements, de logistique, sûrement pas les salaires distribués aux employés qui pullulent derrière chaque comptoir de cette enseigne venue tout droit du Kentucky !
Vous l'aurez compris, je n'aime pas toutes ces chaînes de restaurations rapides, venues la plupart du pays de l'oncle Sam et pour quelques unes du Japon (elles se multiplient comme des petits pains ces derniers temps)...
Dans un pays où la « street food » est d'une qualité quasi sans reproche, de très bon marché, je ne sais pas pendant combien de temps va durer cette expansion maladive des MK (leurs canards d'expositions m'ont toujours fait penser au passage du film « L'aile ou la cuisse » où De Funes et Coluche se retrouvent dans l'usine d'une chaîne de restauration d'autoroute assistant à la reconstitution de poissons ou de poulets !). Mister Donuts (quelle sale odeur de friture d'huile de palme lorsque l'on a le malheur de passer trop près de leur stand !), les Oishi et « yama-moto-kakassé-a-carcassones » où le dernière mode est de voir passer des plats sur des tapis roulants sans être convaincu que personne n'y a déversé ses postillons (voire pire!) ou encore d'autres où des vitrines exposent les plats proposés moulés dans des plastiques durs style dînette pour les grands que vous oserez peut-être manger si le cœur vous en dit... Et la liste n'est pas exhaustive... Je demande d'ailleurs pardon à toutes ces enseignes que je n'ai pas citées (enfin presque !).
Non vraiment, je préfère aller manger au marché, sur un trottoir au pied d'une roulotte (il est vrai pas trop près des pots d'échappements, c'est mieux !) ou dans une gargote locale voire un restaurant tenu à la caisse par une petite amie de farang qui lui, aura déniché le bon steak qui sera trois fois moins cher et aussi bon (voire meilleur) que chez « Six Leurres ».
Je préfère refuser à mes gosses de nous rendre dans un de ces endroits lumineux quitte à ce qu'ils pensent de moi que je ne suis pas sympa (voire radin). Ils iront plus tard s'ils le veulent lorsque je ne serai pas obligé de les accompagner, en attendant, je leur cuisine toujours des plats maison, Ma Dame aussi, et lorsque l'on sort, désormais, on passe devant toutes ces enseignes sans complexe sans s'arrêter. Ces magasins n'auront plus jamais un Kopeck venant de ma part, mes enfants ne pourront pas me reprocher plus tard d'être rongés de maladies encore inconnues à ce jour du fait de les avoir traîner trop souvent dans ces temples de la débauche de la mal bouffe. Je ne serai jamais le complice de ces gens qui ne rêvent que d'une chose, que tout le commun des mortels de la planète mange la même chose de Jarkata à San Francisco en passant par Bamako et qu'ils soient les seuls à se mettre le pognon dans les fouilles pendant qu'ils continuent, eux, à déguster de vrais mets de choix dans des hôtels de luxe sur les rives des îles vierges tout en exploitant leurs employés, adeptes de cette bouffe malgré eux dont la plupart de leurs enfants seront aussi de futurs clients !
Paille Kheundheu...
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