Après un parcours plus ou moins chaotique, me voici arrivée à Lagunas, aux portes de l’Amazonie. Une nouvelle aventure commence.
Lagunas, l’arrivée dans un monde nouveau
Lagunas, autre ville étrange. Toujours ces baraques en bois. Elles ont un faux air de western! Ici, l’électricité n’est que temporaire, soit de 4h à 7h30 du matin et de 18 à 23h. Mais vers 17h, la pénombre est déjà présente… Qu’à cela ne tienne, les Péruviens ont vraiment un autre rapport avec l’obscurité. Je les distingue en train de prendre le frais sur le pas de porte, les enfants jouent éclairés par les lampes torches que les habitants utilisent dans leur foyer, les chauffeurs discutent entre eux à la lumière de leurs motos-taxis…
L’ambiance est assez spéciale d’autant plus que nous sommes vite repérées. Dans la nuit, je vois des paires d’yeux dépasser des bordures de fenêtre. Je surprends les regards des chauffeurs de motos-taxis. Des attroupements se créent pour commenter le passage des gringas (terme qui signifie « touristes hors d’Amérique Latine »). Rien de méchant, car tous nous échangent des sourires bienveillants.
Nous passons la première nuit dans une chambre assez glauque. La porte ne ferme pas, mais pas du tout, c’est à dire qu’il faut la bloquer avec un tabouret et quant à la serrure, inexistante ! La douche et les toilettes se situent à l’extérieur, dans la basse-cour ! Encore (remember le trek dans la Cordillère des Andes) ! On s’asperge d’anti-moustique mais rien n’y fait. Serait-ce un avant-goût de ce qui nous attend dans la forêt amazonienne ? Enfin, nous passons la nuit tant bien que mal. Heureusement, nous sommes trois.
En route pour l’aventure
Le lendemain matin, Santiago, notre guide, vient nous chercher pour prendre le petit-déjeuner à l’agence avant notre départ pour la jungle. Notre trip consiste en un circuit en canoë de 4 jours pour découvrir la faune et la flore de la jungle. Impatientes !
Le petit-déjeuner avalé, un moto-taxi nous amène aux abords de la rivière. Les guides, Santiago et Reyner préparent les canoës. Alexandra et Sophie montent avec Reyner et moi avec Santiago. Dans les pirogues, se trouve tout le nécessaire en nourriture, moustiquaire, matelas pour notre séjour.
Au fil des jours, je vois des oiseaux de toutes sortes, perroquets, hérons, toucans, martins pêcheurs, colibris… mais aussi des loutres, un serpent, une tarentule, un paresseux, un petit crocodile, des poissons chats, des piranhas, des paiches (poisson d’eau douce le plus grand au monde), des grenouilles (hic, j’aime pas trop ça), des arbres géants et tortueux qui s’agrippent les uns aux autres par des lianes qu’empruntent les nombreux singes « frailes », rouges, noirs, blancs. Il ne manque plus que Jane et Tarzan.
Dans la pirogue, Santiago prend son temps pour ramer et s’approcher dès qu’il pense apercevoir un animal. Il a le feeling pour ça. Du coup, nous arrivons toujours au campement loin derrière les autres. J’aime bien. Santiago est aussi très bavard. Il me raconte sa vie, ses projets et plein de légendes autour des animaux et des plantes médicinales. Ça, plus le bercement du canoë, je lutte à plusieurs reprises contre la somnolence.
La vie sur les campements
Pour les repas, nous nous arrêtons dans des cabanes en bois sur pilotis. Santiago et Reyner gèrent tout. Je bloque sur le côté sanitaire. Quand il ne s’agit pas de toilettes situées au bout d’une passerelle en mode « surtout surtout, on ne s’assoit pas ! », il faut aller dans la forêt et prier pour ne pas tomber nez à nez avec un serpent ou tout autre animal non domestique !
Le premier soir, nous dormons dans une cabane sur pilotis avec dans chaque chambre une moustiquaire. Manue contente ! Le confort est sommaire mais rien à voir avec la première nuit à Lagunas. J’adore. J’ai vraiment l’impression d’être dans la cabane de Tarzan.
La deuxième nuit, oh surprise !, nous la passons sur une plateforme en bois également montée sur pilotis mais pas de mur… Santiago et Reyner nous montent nos lits qui se résument à de fins matelas sous moustiquaires. Finalement, je m’endors assez paisiblement au beau milieu de la nature avec une petite pensée pour nos amies les bêtes que j’imagine nous guetter sans rien dire.
Wildlife !
Petit à petit, je me fais à la vie sauvaaaaage ! Ce que j’imaginais impensable au début, devient un plaisir par la suite. Alors que, le premier jour, j’osais à peine tremper un ongle, je finis par prendre un bain dans l’eau saumâtre de la rivière. Santiago et Reyner, quant à eux, sont en totale harmonie. Rien ne les effraie. Ils nous répètent sans cesse que rien ne peut nous arriver. Et ils sont là pour veiller sur nous. Stupéfaites, nous les voyons prendre, à la nuit tombée, leur bain dans la rivière !
Le premier soir, nos deux chers guides nous proposent de faire une sortie nocturne, ce qui nous permet d’observer d’autres types d’animaux comme les crocodiles. Nous nous approchons également plus facilement des oiseaux qui en raison de l’obscurité se maintiennent au garde à vous sur les branches des arbres. Le dernier jour, nous quittons quelques heures nos canoës pour une sortie à pied dans la forêt. Je m’amuse à voir la forme des troncs biscornus, une confusion de lianes qui dégringolent et s’entortillent, des arbres de toutes tailles et de toutes sortes. Il y a ceux le bec dans l’eau, ou ceux qui poussent sur d’autres arbres, aussi les arbres à troncs multiple…
C’est également l’occasion pour Santiago et Reyner de nous faire un cours sur les plantes médicinales. Ils croient à toutes ces histoires et légendes : l’écorce qui soigne les maux de ventre, celle qui, comme dit Santiago, « réchauffe le moteur des femmes qui ne peuvent pas avoir de bébés » ou « refroidit le moteur de celles qui n’en veulent plus ». Il y a aussi l’arbre aux fruits miraculeux avec lesquels il faut s’enduire le corps suivi d’un bain dans la rivière pour que nos voeux se réalisent. Et puis les dauphins roses… ils en ont peur. Ils disent que ces animaux se transforment en humain pour voler nos âmes ou des choses comme ça.
Et vogue sur l’Amazone
Après 4 jours, mon séjour dans la jungle s’achève. Les Allemandes retournent vers la mer. Quant à moi, je décide de continuer mon aventure dans la forêt amazonienne avec comme destination finale Iquitos. Pour ça, je prends le lendemain un bateau à marchandises qui transporte également des passagers. Depuis Yurimaguas, il faut compter deux nuits. De Lagunas, ce n’en sera qu’une. Je me retrouve à passer la nuit dans le hamac que j’avais acheté en prévision à Yurimaguas. Tout ce qui est iPad, téléphone, passeport, dorment avec moi ! La nuit est fraîche et courte…
Dans la journée, les repas sont sonnés à coup de casserole. Chacun va de sa gamelle pour se la faire remplir de riz, poulet ou autre concoction sortie tout droit de la marmite du chef cuisinier. Ça n’est pas l’armée, mais ça y ressemble. Encore une fois, je suis l’attraction du bateau. Certains me fixent sans dire mot et d’autres viennent spontanément me poser des questions.
Souvent les mêmes d’ailleurs : tu viens d’où, comment tu t’appelles, où vas-tu Manuelita, je peux te faire la visite d’Iquitos, crois-tu en Dieu ?… Difficile d’observer le paysage sans passer un entretien. Et pourtant le trajet est magnifique. Je vois les fameux dauphins roses et encore une fois les communautés, les ravitaillements, les flux de passagers, de vendeuses et les forêts de palmiers….
Iquitos, la trépidante
A Nautas, je prends un minivan. Il me faudra 2 heures de plus pour atteindre Iquitos. J’ai hâte de trouver un hôtel et une vraie douche. Mes vêtements sont imprégnés d’humidité. J’aspire également à une connexion wifi, histoire de donner de mes nouvelles. J’ai envie de calme. Iquitos m’apparait comme une ville de surexcités. Des motos-taxis partout. Pressée de gagner Cuzco, je réserve mon vol du jour au lendemain.
Au petit matin, en visitant Belén et son marché, je découvre aussi l’un des quartiers les plus pauvres d’Iquitos. J’arrive vite à saturation. La capitale de l’Amazonie péruvienne est également la ville où la sorcellerie est la plus pratiquée. Aussi, l’ambiance mystique est facilement palpable. Un quartier du marché est d’ailleurs consacré aux produits, plantes et potions de toutes sortes. Il y a de tout. Autant pour faire le bien que pour jeter le mauvais sort ! Croyances, esprits, ici, les forces de la nature ne sont pas que des légendes. Sur d’autres étals, ils vendent des oeufs de tortues… moyennement légal. Je découvre aussi des cadavres de tortues, le corps aplati et les boyaux en exposition. Plus je m’enfonce dans le marché, plus je me décompose. Les odeurs, l’état des rues, la pauvreté me gênent et, par respect, je préfère ne pas aller plus loin.
Il me reste une paire d’heures avant de partir. J’achève mon court séjour à Iquitos par un peu de shopping et une boisson fraîche sur le malecón mais j’attends Cusco avec impatience.
Après la chaleur tropicale de la forêt amazonienne, la cité inca et ses 3300 m d’altitude m’attendent. Une fois dans l’avion, j’observe l’étendue de la forêt amazonienne et son fleuve qui tel un serpent creuse son sillon au milieu des arbres. Passent les minutes et puis, changement brutal, le vert est remplacé par un désert de montagnes avant de rentrer dans une épaisse nappe de nuages telle une piste d’atterrissage. Je retrouve Lima la grise juste quelques instants, le temps de mon changement de vol.
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