Quand je n’y suis pas. En Islande.
Je marche les yeux fermés.
17 août 2007. Il est plus de minuit lorsque l’avion d’Icelandair se pose sur le tarmac de l’aéroport de Keflavik. Le soleil vient à peine de s’assoupir, laissant quelques traces multicolores de ses ultimes bâillements. Il fait un peu frais, nous sommes tous épuisés par ces deux jours de voyage depuis la Bretagne. Mais chacun de nous, enfants et parents, arbore le sourire mi-victorieux mi-inquiet de l’aventurier foulant pour la première fois le sol d’un monde inconnu.
Islande. Les descriptifs de voyages en Islande lus ici ou là ressurgissent depuis le bus qui nous emmène jusqu’à la capitale. Kjölur, Hvítárvatn, Mýrdalsjökull, Grænifjallgardur, Reykjadalur, Laugavegur, Hvannadalshnúkur, Fjallabak, Skaftafell, Landmannalaugar… Pendant que nous roulons en découvrant à travers les larges vitres les paysages inconnus qui constitueront désormais le champs visuel de notre quotidien, les noms qui roulent, qui claquent, qui fusent, défilent dans ma tête. Ils coïncident avec les immenses étendues de roche basaltique, les falaises échancrées, les déserts, les glaciers, les plages de sable noir, les monts, cascades, chutes, cratères, lacs et rivières qui occupent la surface de l’île et dictent leurs lois aux Hommes aux côtés des hivers opaques et des étés qui s’éternisent. Cette disparité géologique me laisse perplexe. Je mélange textes et images. J’imagine ce que «la gorge du dragon», la «grande vague», le «mont du chauve», les «collines de la sorcière»… auront à m’offrir. Et je savoure par avance les balades inédites que l’île aux innombrables treks a concoctées pour moi.
Quand je les rouvre, mes yeux, stoppé par un réverbère ou heurté par un passant, ce sont les trottoirs lisses et gris des rues parisiennes asphaltées qui s’affichent sur 180°. La pierre ici me paraît bien terne au regard des reliefs variés et colorés de l’insularité arctique.
Alors quand je n’y suis pas en Islande. Je marche à nouveau les yeux clos. Tant pis pour les obstacles !