Quand le mot piscine est prononcé dans l’oreille de beaucoup de français, une moue de dédain se dessine sur leur visage. Pour certains c’est un endroit insalubre, humide (et pour cause) ou encore un endroit où on apprend à nager tout en se baignant dans une eau javellisée. A l’opposé, quand les islandais parlent d’aller à la piscine, c’est avec un plaisir partagé. Certains s’y rendent dès l’ouverture, vers 6 heures du matin. Ils ne commenceraient pas leur journée avant d’avoir effectué leur 500 mètres ou sans rencontrer leurs amis dans les jacuzzis (qui sont à plusieurs températures) pour converser sur un sujet ou sur un autre. Je l’avoue, avant de venir en Islande j’étais le type même du français qui n’aime pas aller à la piscine. La mer ou les plans d’eau d’accord. Mais plonger dans un bassin rectangulaire et faire des allers-retours à l’infini, non. Depuis ma venue en Islande, mon sentiment pour ces bassins-là est la même. C’est vrai que les jacuzzis apportent un plus inestimable et beaucoup ne viennent à la piscine que pour mariner plus ou moins longtemps.
Mais il y a à Reykjavík un endroit où j’aime me mouiller. C’est Nauthólsvík. Une toute petite plage de sable de coquillages qui a été aménagée au début du 21e siecle avec un petit bassin d’eau chaude qui se déverse dans la mer. La plage a, à sa droite, l’aéroport de la capitale. En face la ville de Kópavogur. A sa gauche Fossvogsdalur. Une charmante petite vallée où court, en son milieu, un petit ruisseau qui se jette dans le golfe maritime. On peut la remonter en se promenant sur ses berges. Et derrière elle la forêt de Öskuhlið où trône Perlan que tous les touristes visitent. Une forêt où il est bon de folâtrer et qui est par endroits vraiment ensorcelante. On y trouve aussi des champignons pour les amateurs. Et le bruit des passages d’avions est atténué par tous les conifères dont elle est pourvue. Ces grands volatiles sont remplacés par leurs ancêtres au chants magnifiques. Un pique-nique en pleine forêt de Reykjavík ? Un délice.
Pour couronner le tout, un petit restaurant, qui a pris le nom de l’ancienne ferme qui existait à son emplacement aujourd’hui, permet de déguster les mets du terroir dans un cadre magnifique. Il y a même un terrain de pétanque si vous avez eu la très bonne idée d’apporter vos boules en voyages… L’endroit a son histoire et on peut encore voir des vestiges du temps passé comme Læragjá (la crevasse aux cuisses) juste en face du restaurant ou les gens venaient se baigner après une soirée bien arrosée. Puisqu’ils étaient trempés de l’intérieur pourquoi ne pas être trempé de l’extérieur aussi. Les gens venaient s’y baigner tout nus. Pratique assez courante en Islande. Dès qu’il y a un point d’eau chaude pour se délasser, l’air se charge de naturisme dans ce pays. L’eau venait du trop plein des fûts qui soutiennent aujourd’hui Perlan et qui emmagasinaient l’eau chaude pour la ville de Reykjavík. Ce n’est qu’en 1980 que la société des eaux ferma définitivement l’écoulement de ces surplus d’eaux au grand désespoir de la faune nocturne qui ne vint plus. L’endroit s’assécha et on voit donc encore les murets qui avaient été aménagés pour s’asseoir et faire tremper ses gambettes ou plus. Il est intéressant de savoir que l’endroit avait plusieurs surnoms. Volga, Beruvík, Læralind, Dóná ou Rasslind. Tous ces surnoms ont une connotation libertine qui mettaient l’imagination en feu et qui, soit excitaient les sens, soit faisait monter l’indignation. Aaaah, le bon vieux temps…