Autour de chez nous, pour en revenir à Ban Pangkhan, une fois les récoltes et autres travaux des champs terminés, les journées peuvent être longue au village. Il n'est pas rare, alors de voir garés devant les maisons des attroupements de motos sans que l'on voit où tous leurs chauffeurs se trouvent ! Étranges ? Pas vraiment, si on avance derrière ces mêmes maisons où dans les étages de celles-ci, on trouvera souvent des cercles de jeux loin d'être licites. La police locale ferme les yeux la plupart du temps ; rappelons que le jeux est interdit en Thaïlande sous toutes ses formes et il y a une bonne raison à cela : La plupart des habitants du royaume a ça dans le sang, une tentation viscérale difficile à contrôler. Lors de funérailles ou pendant les quelques jours du nouvel an thaï, Songkran, une tolérance, une « entente cordiale » laisse faire le jeu et les paris qui vont de pairs. Les reste du temps, on joue en se cachant même si tout le monde sait que l'on joue et où l'on joue. La police, la première ! Mais il y a des couacs parfois !
Il faut donc en revenir à ce qu'il vient de se passer en face de chez nous ; Un flic de la patrouille du village d'à coté venait régulièrement organiser un cercle de Kopcloc, un jeu de dé où la banque joue contre les autres invétérés du jeu en misant sur une piste où 6 numéros, les quatre signes, trèfle, pique, cœur et carreau ainsi que le pair et impair, le passe et manque sans oublier le rouge et le noir (d'autres combinaisons sont là, mais je n'ai pas tout capté) sont les sphères du pari ; une sorte de table jeu miniature de casino ! J'ai d'ailleurs mis un sacré bout de temps avant de comprendre la nature du jeu et je suis loin d'avoir encore tout maîtrisée, loin de là, mais je dirais que je me suis intéressée à ce jeu par « découverte ethnologique », eh ! je ne suis pas un joueur... Si le Rami et le Pokdeang (une sorte de « chemin de fer ») sont les deux jeux que les villageois pratiquent à longueur d'année suivant leur finance, le Kopcloc est le roi des jeux.
Donc ce policier venait régulièrement, c'est-à-dire tous les jours, et le jeu battait sont plein ! Plus les jours avançaient et plus on sentait de la tension. Hommes ou femmes venant chercher leurs conjoints respectifs dans un grand renfort d'engueulade, certains foyers voyaient leurs finances misent à mal ! Parce qu'il est là le problème, le pari et surtout perdre, engendre souvent de gros dégâts dans les familles. Hypothèque des terres agricoles, dépôts de l'or de la famille chez le chinois du coin et j'en passe ! Certains qui me liront savent ce que le jeu peut engendrer, d'ailleurs nombres de couples « farang-thaïe » en ont fait les frais ! Le joueur n'a pas de limite, on veut se refaire même si on n'a plus rien !
Ce policier de Ban Kwao avait sûrement la bienveillance de son chef de poste pour organiser ce petit casino villageois et je pense que les compensations financières étaient suffisantes pour que tout se déroule sans soucis mais le poste de Ban Kwao est sous le commandement du poste de Sélaphum et c'est là que tout a déraillé !
Mercredi dernier, vers 15 heures, je fus donc alerté par un brouhaha gigantesque... Les joueurs en cette époque de l'année, ne peuvent vaquer aux joies du casino dans la nature, cachés dans des fourrées, la mousson détrempant le terrain de jeux, alors la plupart du temps, on se met à l'étage d'une vieille baraque en bois qui parait abandonnée et cet après-midi là, ce fut le cas dans la maison brinquebalante de mon voisin épicier. La plupart du temps, l'épicier donne l'alerte d'une arrivée intempestive, mari ou femme exaspérés que le conjoint puisse dilapider tout le budget familial au jeu voire pire, que la marée-chaussée fasse son apparition. Il est plutôt efficace, le voisin « guetteur-épicier » puisqu'il passe sa journée assis sur sa grande table-chaise-sofa faite de bambou en attente du client mais ce coup ci, ce ne fut pas le cas -je saurais plus tard qu'au moment de l'arrivée des « marrons »(couleurs des uniformes de la police en Thaïlande), il était au toilette, pas de chance, d'ailleurs il s'en justifie encore- . Deux pick-up sont donc arrivés des deux cotés de la rue, bloquant toute fuite de parieurs, une chance, ma chère et tendre ne joue plus depuis longtemps sinon, elle aurait fini au poste de Sélaphum avec toute la clique de mes voisins. Tout ce petit monde est donc parti à la vue de tous, emboîté les uns les autres à l'arrière des véhicules, 17 kilomètres de spectacle pour les habitants des villages traversés, 17 kilomètres de honte pour les occupants des pick-up. Oh ! Ils ne sont pas restés longtemps puisque vers 20 heures tout le monde était de retour sauf le flic de Ban Kwao, non pas qu'il fut raccompagné vers son poste de police mais la négociation a du durer un bon bout de temps entre les deux postes pour qu'il ne soit pas mis au ban de la police...
Depuis les conversations vont bon train, les questions fusent, « qui a parlé, qui a prévenu la police, combien a payé le flic de Ban Kwao aux policiers de Sélaphum (D'ailleurs, il est revenu avant-hier mais n'en a pas dit un mot), l'épicier est-il coupable, enfin bien d'autres questions continuent d'alimenter les conversations du quartier où le reste du village est venu à tour de rôle s'enquérir de ce fait-divers retentissant !
Depuis plus personne ne joue ; l'ennui n'est plus, il y a de quoi alimenter les conversations pendant encore au moins quelques jours avant qu'un cercle de jeu se reforme et que...
D'ailleurs la révèle est bien là !
Paille Kheundheu...
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