Une histoire de robinet...

Publié le 29 juillet 2013 par Jeffdepangkhan @jeffdepangkhan

Serait-ce la mousson qui m'aurait suggérée cet article, du moins son titre ? Peut-être, car nous sommes passés en phase douce de cette saison des pluies. En cette période juillet-août, la mousson ressemble quelque peu à cette réflexion que ce faisait Forest Gump dans le film éponyme lors de son enrôlement dans les troupes US pendant la guerre du Vietnam : « Un jour, il a commencé à pleuvoir et ça ne s'est jamais arrêté ! ». En effet, terminés les gros orages et les pluies battantes de mai et juin, désormais nous sommes dans la petite pluie fine et discontinue même si certains jours, elles décident de se taire pour laisser le soleil faire son effet « brume électrique ! Mais rassurons-nous, en septembre nous auront le droit au retour des fortes pluies diluviennes, c'est comme ça tous les ans et il n'y a aucune raison que cela change cette année ! Alors, en ces jours d'été, on écoute le clapotis des petites gouttes de pluies qui s’abattent sur les toits de tôle ondulée, température modérée et humidité garantie, linges difficiles à sécher, une nature qui explose de ces teintes vertes immaculées, une saison comme je le répète souvent, que j'adore !

Est-ce donc cette satanée mousson qui va me faire divaguer sur cette histoire de débit de l'eau ? Pas vraiment, même si l'eau ruisselante appelle à parler de l'eau. En réalité, je parlais dans un article précédent de cette manie qu'a la plupart des thaïlandais (peut-être plus particulièrement en ISAN) de ne pas se soucier de jouer de l'interrupteur pour éteindre les éclairages domestiques et de ne pas actionner les robinets afin de les fermer lorsque les bacs et autres récipients étaient pleins...Manie qui se voulait épidémique lorsqu'un farang (moi, par exemple) jouait dans la cour des ISAN depuis très (trop?) longtemps, au grand dam de mes amis de l'hexagone m'accueillant au fil des années dans leur humble demeure... On pourra remarquer que l'augmentation vertigineuse des tarifs de l'électricité et de l'eau ces deux dernières années, fait que même la tête de linotte la plus invétérée se doit de faire gaffe si elle veut pouvoir se payer ses factures mensuelles de ces deux produits indispensables, dont on ne pourrait se passer désormais ! Alors, prise de conscience ? Peut-être, surtout pour la fée électricité, l'eau restant à des tarifs des plus abordables (à Ban Pangkhan, 5 baths (12 cts d'euro) le mètre cube, cela reste très très bon marché, n'est-ce pas ? Pas de comparaison à faire avec une quelconque facture d'eau en Europe !).

« Mais il va y arriver avec son robinet le farang de Pangkhan, oui ou non ? ». On y arrive, pas de soucis mais avant tout je voudrais revenir sur une anecdote du passé qui m'est arrivée lors de ma première visite en Thaïlande et du même coup de palabrer quelque peu sur la configuration des salles de bain thaïlandaise.

Lors de ce premier séjour, je redécouvrais un certain modernisme ; en effet, arrivant du sud de l'Inde où pour avoir de l'eau, le puits était dans 90% des cas la seule solution, où il fallait le faire manuellement car les pompes électriques restaient la plupart du temps muettes pour cause de manque d'approvisionnement en électricité, j'avais donc l'habitude de prendre mon eau au puits dans le jardin au fur et à mesure des besoins instantanés. J'arrivais donc chez un ami de mon ami qui m'avait « traîné » jusqu'en Thaïlande et cet ami de cet ami, qui louait une petite baraque dans la banlieue de Hua Hin, de l'autre coté du canal, à une époque où Hua Hin ressemblait à un petit port de pêche, nous reçut bras ouvert. Le voyage transitant par le Sri Lanka puis par un enchaînement en bus de Bangkok vers la petite station balnéaire nous avait rendu plus que « collant », manifestement, nous pèguions comme on le dit à Marseille. Il nous proposa de nous rafraîchir en nous ouvrant sa salle de bain, magnifiquement carrelée de petites céramiques couleur turquoise, agrémentée d'une douche avec chauffe-eau électrique, cela laissait présager du meilleur. Je m'y attelais en premier, emprunt de la plus grande joie. Une fois en tenue d'Adam, je tentais d'actionner la douche mais elle ne répondit pas à mon injonction ; j’entrebâillais la porte et interpellait notre hôte qui me répondit fataliste : « eh, coupure d'eau comme tous les jours, tu vas devoir te doucher au baquet ! ». Je me disais alors que la Thaïlande n'était pas si moderne que ce qu'elle avait la prétention de démontrer, « pfut, même ici, il y a des coupures d'eau ! ». Je regardais alors devant moi, cette sorte de grande baignoire carrelée et je comprenais alors le pourquoi du comment de ce grand bac que je soupçonnais de ne pas être une baignoire après une courte réflexion, juste avant de tenter de faire cracher de son eau le pommeau de douche. Fallait que je sois « cogno » tout de même. J'avais observé ce grand bassin lors de cette première intrusion dans une salle de bain siamoise et je m'étais alors dit que les thaïlandais étaient plutôt étranges, faire des baignoires en ciment recouvert de carreaux et ne pas y mettre d'évacuation pour l'eau. J'avais même pas percuté qu'en arrivant dans cette pièce d'eau que le bac était déjà plein faisant office de réserve d'eau en cas de coupure d'eau et que par principe -un minimum de réflexion s'impose, Jeff- si l'on veut prendre un bain, la baignoire est vide et qu'on doit alors la remplir si l'on veut s'y prélasser. Je riais tout seul de ma connerie et me garderait bien de le dire haut et fort au terme des mes abblutions, mais l'Inde et son seau que l'on tirait au bout d'une corde à grand renfort d'effort m'avait déconnecté depuis longtemps de la réalité. Flottant sur l'eau du grand bac -je ne m'étais pas encore posé la question à propos du petit bassin situé près de la toilette à la turque, chaque chose en son temps tout de même, il fallait faire doucement devant toutes ces découvertes- deux petites bassines en forme de casserole m'attendaient donc. Je pouvais enfin m’adonner pour la première fois à la douche au baquet, si chère au thaïlandais car ces bassins d'eau n'étaient pas seulement là pour palier aux coupures d'eau mais aussi pour le plus grand plaisir des thaïs. En effet les années s'écoulant, je remarquais que n'importe où, même dans les hôtels de standing (je ne parle pas des 5 étoiles, je n'y ai jamais mis les pieds en Thaïlande même si je soupçonne les salles de bain de ces palaces être équipées d'un système permettant la douche au baquet) un petit robinet souvent sous le système de douche était à la disposition du client, un seau juste dessous où flottait une bassine-casserole permettant alors au plus irréductible thaï de vaquer à ses ablutions au bon souvenir de son enfance ! S'asperger à la limite de l'apoplexie reste un grand plaisir pour nombreux thaïs et il est vrai qu'il n'y a rien de mieux pour sortir de sa toilette en pleine forme, rafraîchit et disposé à affronter de nouveau les fortes températures extérieures ! Il n'est pas rare lors de la saison chaude que le thaï lambda s'y confronte plusieurs fois par jour, dans des salles de bain de fortune au fond des jardin d'ISAN comme dans les cours des maisons, au bord des bassins, perché sur de minuscules pontons de fortune mais aussi au pied des immeubles d'habitation des quartiers populaires de Bangkok, là, il faut juste être très adroit avec son pagne ou son sarong, pudeur oblige, mais juste pour dire que cette façon de se laver ramène le thaïlandais à son enfance, un peu comme l'italien qui mange son assiette de pasta lui rappelant alors la mama et tout ce qui a trait à sa tendre enfance !

Mais revenons-en à notre robinet, je divague (dix vagues ?) car depuis un certain temps, je remarquais ma chère et tendre ouvrir en continu mais au compte-goutte le robinet du grand bassin de notre salle de bain alors qu'auparavant elle ouvrait les vannes telles les trop-pleins des barrages alpins, mais cette nouveauté que je nommerai, la technique du « pisse trois gouttes » a comme effet négatif que l'eau s'écoulant alors tout doucement ne permet pas que l'on détecte le fait que le bassin soit plein, ce qui m'empêche d'intervenir alors rapidement et l'eau s'écoule donc inéluctablement pour repartir d'où elle vient, c'est-à-dire, dans la nature. Sachant que ma grande fille le fait aussi dans sa salle de bain, il y eut des factures d'eau débordantes, plus que conséquentes ces derniers mois, cela aurait pu être insupportable à ma femme, c'est elle qui paye l'eau, eh bien pas vraiment... Alors bon enfant, à chaque passage dans la salle de bain, je ferme le robinet crachant son goutte à goutte tout en sachant que la prochaine personne passant derrière moi, en l’occurrence toujours ma femme -le fiston n'a pas encore le bras assez long pour se mêler à ce ballet aquatique- le rouvrirait à nouveau tel un robinet qui fuit -et entre nous, rien de plus énervant que ce « ploc', ploc'...ploc' » tout au long de la journée -encore une bonne raison d'aller traîner ?

Donc, la semaine dernière, je me suis lancé et j'ai demandé à ma moitié qu'elle était la raison de cette ouverture à minima du robinet et sereinement, elle me répondit :

-   Ben, c'est pour payer moins cher l'eau ! Surpris, je continuais :

- Mais, payer moins cher alors que l'eau part à vau-l'eau? Me dévisageant tel un benêt, elle me dit alors :

- Mais non, si on ouvre le robinet tout doucement, le compteur avance moins vite et l'on paye moins cher du coup !

Je restais coi et partait dans une explication sur les compteurs d'eau, qu'il tourne au fur et à mesure du débit de l' eau et que c'était un fait avéré, le compteur avançait coûte que coûte, robinet à plein régime ou non, 100 litres d'eau au débit plus ou moins rapide reste 100 litres d'eau de tout manière... Elle me regarda avec un gros doute et je crois bien qu'aujourd'hui, j'ai déjà du fermer trois fois le robinet de la salle de bain.

Alors avec un robinet ouvert avec parcimonie, 100 litres d'eau représenterait-il seulement 80 litres ? Je vous dirais que je n'ai pas été observé le compteur qui se trouve dans le jardin, car, peut-être, sait-on jamais, les compteurs en ISAN économiseraient du volume d'eau plus l'on couperait la chique à son robinet...Étonnant, non ?

Quant au petit bassin, celui qui sied sous le grand bassin près de la cuvette des toilettes, deux jeunes français passant par chez nous la semaine dernière me posaient la question sur sa fonction, j'expliquais alors, malgré la douchette, bien présente, on pouvait avoir besoin de ce bassin en cas de coupures d'eau ou de rupture de papier toilette, ben oui, enfin lorsqu'il y en a bien-sur, le PQ ne fait pas encore office partout, alors ce petit bassin reste alors le seule et unique recours de sortir digne des toilettes...

Paille Kheundheu...