Le fantôme de Torcello

Par Oliaiklod @Olia_i_Klod

Aujourd’hui, Torcello est pratiquement inhabitée : quatorze personnes qui vivent encore. En un mot, il s’agit d’une île presque déserte, calme, très calme.

Vos meilleurs guides à Torcello restent les chats, encore faut-il savoir les écouter… après nous avoir conté la véritable histoire puis la légende du Ponte del Diavolo, notre premier guide nous a mené en face de la Locanda Cipriani (où Ernest Hemingway aimait retrouver son ami avant une partie de chasse dans les marais). Trois des amis de notre compagnon félin logent là, et ils nous attendaient se chauffant au doux soleil d’hiver.

Pendant que nous mangions, ils nous ont entouré, et contre quelques petits cadeaux, ils nous ont raconté de bien curieuses histoires.

Pour éviter que les rares touristes surprennent notre étrange manège, l’un montait la garde, et les deux autres nous racontaient…

Ce silence grand silence qui nous entoure est presque contre nature, mais je vais vous dire, car c’est dans mon ADN, qu’il existe bel et bien un côté beaucoup plus « sombre » de l’île.

Lorsque vous descendez du bateau, ne suivez pas la foule de touristes, qui, comme un troupeau de moutons part toujours dans la même direction, celle qui semble unique, vers la droite où il y a des églises et la vieille ville. Restez plus longtemps sur ce quai, respirant profondément l’air salin de la lagune. Regarder le paysage. Admirez les couleurs des contours de l’eau et l’île en face de vous. Continuez vers la gauche, le long du canal de façon à atteindre un petit groupe de maisons.

Là, existait autrefois, du moins jusqu’à l’époque de la suppression napoléonienne, le couvent et l’église de Saint-Thomas des Bourguignons qui se trouvait autrefois sur une île séparée, par la suite rattachée à Torcello.

Une de ces bâtisses est réputée hantée, et malheur à celui qui l’achètera, puisqu’elle est aujourd’hui en vente.

Des témoins nous ont rapporté les faits suivants :Pendant la nuit, on entends de la musique ancienne qui semble provenir d’une pièce spécifique de la maison qui est une ancienne sacristie.
D’autres soutiennent également que, inexplicablement, leur montre s’est arrêtée tout le temps de leur séjour sur l’île, et que l’instrument est reparti tout seul, une fois le voyageur à bord du bateau, après avoir quitté Torcello.
On dit aussi qu’un groupe d’amis avait voulu passer une nuit dans un bateau amarré sur la rive de la fondamenta, devant l’ancien couvent. Pendant la nuit, aucun des occupants du bateau n’avait pu dormir. Constamment, ils avaient entendu des pas, comme si quelqu’un montait à bord, puis revenait à terre. Ils avaient beau scruter l’obscurité, il ne virent aucun mouvement. pourtant, ils avaient entendu un bruit de sandales, comme celles que portent les moines.Il y a aussi un témoignage encore plus impressionnant. Dans l’une des maisons qui sont situées à la place de l’ancien couvent, dans la nuit du 2 Novembre, une famille était à table, comme d’habitude. Soudain, sans que personne n’ait fait le moindre mouvement, une théière qui était sur ​​la table est tombée au sol, où elle s’est brisée en morceaux.
Rien d’étrange, pourrait-on dire : la théière, à l’automne, a traversé la table sur toute la largeur, puis elle est tombée au sol dans la direction opposée à celle dans laquelle elle se trouvait.
Dans le but de ramasser les morceaux, la maitresse de maison à tendu la main vers les morceaux de la théière, les polis se dressèrent sur ​​l’avant-bras comme si quand on est en présence d’électricité statique, puis ils sont revenus à leur position normale une fois le bras retiré.

Tout le monde sait qu’une telle chose est impossible, car le verre n’est pas un conducteur de l’électricité statique.

Et par-dessus tout, qui est ce moine vêtu de brun, mince et sec comme un clou, qui peut encore être vu marchant sur ​​le rivage de Torcello, alors que plus aucun religieux ne vit sur cette île ?

De nos jours, alors que vous vous approchez du rivage, en regardant la lagune, vous pourrez voir des bulles qui viennent éclater, régulièrement à la surface de l’eau.

Il s’agit d’un mélange d’air et de méthane.

Ce gaz est produit par la fermentation des matières végétales mélangées aux sédiments qui viennent s’accumuler ici, portés par les courants naturels de la lagune et les rivières, comme l’Osellino, dont nous vous avons déjà parlé.

Cette méthanisation est un phénomène naturel, lié à la fermentation en milieu pauvre en oxygène.

Les fonds marins autour de Torcello sont donc un véritable réservoir de ce gaz naturel, inexploité de nos jours (alors qu’on parle sans cesse d’énergies renouvelables). Mais il semble qu’à une époque plus reculée, vers de XVIème siècle, ces moines cisterciens, venus de Bourgogne avaient inventé une méthode efficace pour exploiter ce gisement de gaz.

Il est dit que dans le passé ce gaz était recueilli à l’aide d’un système complexe de tubes et des cloches de verre.

A l’emplacement exact où sont aujourd’hui les maisons que nous avons mentionné plus tôt, il y avait la sacristie de l’église Saint-Thomas, qui reste de nos jour connue comme « La Casa dei Borgognoni. » Entre les XVIème et XVIIème siècles, un moine cistercien y vivait, dont le nom est malheureusement entouré de mystère. Comme un alchimiste qui procédait à des expériences chimiques, il avait transformé la bâtisse en laboratoire et travaillé à la la collecte des gaz, et l’étude des phénomènes liés à ce bouillonnement de bulles venues du fond des eaux.

Un jour, un terrible accident s’est produit. Alors qu’au début de l’hiver il voulait allumer le feu dans une cheminée, il n’a pas prêté attention à une odeur suspecte qui aurait pu lui indiquer la présence de gaz. Il se dit que l’énorme explosion n’a propulsé le pauvre frère comme une balle sur le toit de la sacristie, le tuant instantanément. Mais comme cela arrive souvent, les gens prétendent que le moine a continué à vivre dans le lieu où il est mort.