C’est ce qu’affirme Michel Del Castillo sur son site, dans un article intitulé : Donna Leon, la madone des bobos
Michel del Castillo (ou Michel Janicot del Castillo) est un écrivain français né à Madrid le 2 août 1933 à 05h45, peu avant la guerre civile. Son père, Michel Janicot, quitte son épouse Candida Isabel del Castillo en 1935, après avoir été convaincu de son infidélité. Il rejoint la France et ne s’occupe plus de son jeune fils. Sa mère, Candida Isabel, très engagée politiquement, est proche du parti républicain de Manuel Azaña. Pourtant elle sera emprisonnée par ces mêmes républicains de 1936 à 1937, pour s’être inquiétée du sort des prisonniers politiques. Durant son emprisonnement le jeune Michel lui rend visite accompagné de sa grand-mère. Présentatrice connue et efficace à la radio républicaine à partir de 1937 elle sera condamnée à mort par les franquistes.
Candida Isabel del Castillo avec son fils Xavier, né en 1923 du premier mariage. Il sera élevé par son père et ne reverra sa mère, furtivement, qu’en 1942 alors qu’elle traverse l’Espagne pour rejoindre l’Afrique du Nord. Photo Michel del Castillo
« J’ai savouré les mille détails de la vie quotidienne des Vénitiens, la description des différents quartiers, l’évocation sans complaisance d’une Italie gangrenée par la corruption. »
Quelque chose manquait, mais quoi ?
« Très vite, j’ai compris ce qui causait mon insatisfaction. Toutes les intrigues reproduisent le même schéma: invariablement les assassins appartiennent à la classe dirigeante, nobles corrompus, industriels douteux, politiciens véreux, bigots hypocrites et vicieux, militaires factieux, magouilleurs vêtus de cachemire et de soie, spéculateurs sans scrupules, banquiers louches, j’en passe ; invariablement aussi, les humbles y sont les victimes innocentes des turpitudes des puissants. C’est un monde en noir et blanc. »
« Les Brunetti sont écologistes avec une nuance d’ironie. Généreux, ils ont l’aisance tranquille de ceux qui se savent à l’abri du besoin. Ils peuvent se permettre d’accrocher un tableau de Tintoretto dans leur cuisine. Paola, la fille unique du comte Falier, l’un des hommes les plus riches et les plus puissants de la ville, héritera de sa fortune. Faut-il préciser que Paola est une féministe déterminée? »
Voilà donc ce qui permet à Michel Janicot del Castillo de définir le bo-bo vénitien : écologiste, féministe et héritier. Mais les Brunetti ont une tare encore plus grande à ses yeux : ils sont de gauche !
« Anciens militants de gauche, l’un, le commissaire, a perdu toute foi dans la politique, cependant que Paola vote, sans trop d’illusions, communiste. »
Forcément, puisqu’ils sont de gauche, ils sont déçus par cette idéologie, mais ils restent ficèles aux politiques qui la défendent. Forcément, les gens de gauche sont tous des abrutis finis qui n’ont aucune culture…
Pas tout à fait, puisque « elle enseigne la littérature anglaise à l’université, il lit à ses moments de loisir Thucydide ou Hérodote, quand ce n’est pas La guerre des Gaules ou Tacite. Ils professent des idées toujours justes et généreuses. »
On est en effet, avec la famille Brunetti, à mille lieu de celle de Michel Janicot del Castillo.
Il n’a même pas su résister aux deux monstres qu’il a eus pour géniteurs. Rue des Archives nous faisait assister à la fin de sa mère, ogresse octogénaire, obèse et invalide, que n’effleurait nul remords et qui ne régnait plus que sur un grouillement de vermine. Son nouveau récit autobiographique, De père français, nous peint le monstre mâle. « Mon assassin« , écrit-il dès la première phrase. La liste des crimes de ce père semblerait interminable. Qu’on sache seulement que ce lâche abandonna sa femme et leur fils dans la tourmente madrilène de la guerre civile. Et lorsque, en 1940, cette femme, républicaine espagnole, vint à Clermont-Ferrand lui demander secours, pour s’en débarrasser il la dénonça comme « étrangère indésirable« . Arrêtée, elle se retrouva internée au camp de Rieucos. Son petit garçon la rejoignit bientôt derrière les barbelés.
Chez les Brunetti, la morale politique est toujours sauve.
Les Brunetti seraient donc des Bo-bo ?
Le terme bobo, contraction de bourgeois-bohème, traduction de l’anglais bourgeois bohemian, est issu d’un livre de David Brooks intitulé Bobos in Paradise: The New Upper Class and How They Got There publié en 2000 ; il s’agit d’une sorte de sociostyle, c’est-à-dire de tentative de caractériser un groupe social selon les valeurs que ses membres partagent, plutôt que selon des caractéristiques socio-économiques ou démographiques. L’auteur entendait caractériser et regrouper sous ce terme l’évolution et la transformation du groupe des yuppies des années 1980.
On peut trouver un emploi précurseur dans le roman Bel-Ami, de Guy de Maupassant, publié en 1885 : « Ce fut elle alors qui lui serra la main très fort, très longtemps ; et il se sentit remué par cet aveu silencieux, repris d’un brusque béguin pour cette petite bourgeoise bohème et bon enfant qui l’aimait vraiment, peut-être. »
Les Brunetti « se chamaillent quand il arrive au policier d’émettre un propos qui pourrait passer pour homophobe, ils morigènent leur fille parce qu’elle laisse échapper une remarque anodine qui semble flairer le racisme, puis discutent longuement pour savoir si elle a émis une opinion personnelle ou si elle n’a fait que répéter des propos entendus dans son lycée. Débat essentiel car, dans le premier cas, c’est l’éducation reçue à la maison qui serait en cause, donc aussi leur responsabilité de parents. »
Deux conceptions de la ville et de la vie. Le bobo aime la ville socialement mélangée, croit en une société pacifiée. Une attitude différente de celle du bourgeois qui, lui, souhaite que son environnement reflète sa réussite matérielle et pense que la compétition et la sélection constituent, de loin, la meilleure façon d’assurer une certaine équité. Ces conceptions trouvent logiquement des traductions politiques différentes. Le bobo est de gauche mais il peut également se reconnaître dans un candidat ambitionnant de réconcilier les deux camps, d’où l’intérêt pour les candidats de droite de faire croire à une certaine teneur sociale de leurs programmes, écran de fumée pour plaire à cette catégorie de la population qui participe fidèlement aux élections.
« Donna Leon habite une île enchantée. Le clair soleil de la fraternitude brille sur ses rivages paradisiaques. Loin, très loin de cet appartement lumineux, de cette terrasse où Carlo Brunetti s’installe pour savourer son vin blanc en relisant Suétone, il existe un continent barbare, habité par la canaille de la haute, mais le couple peut ignorer ses turpitudes, lui en relisant ses Grecs, elle plongée dans les romans de son cher Henry James. Assez riches pour feindre de mépriser l’argent, ils vivent dans la béatitude des Bobos, avec une conscience sereine. Ce sont des purs, des cathares. »
En 2008, Michel Janicot del Castillo publie un récit biographique inattendu, consacré à Franco. Il rédige cependant le portrait d’un homme physiquement courageux, un militaire « chimiquement pur », en aucun cas fasciste, mais un conservateur autoritaire, assez banal, en lui accordant au passage le décollage économique de l’Espagne.
Ce jongleur des mots qui réinvente l’Histoire, juge on ne peut plus sévèrement Donna Leon : « Ces romans pour jeunes filles de la Haute Gauche, avec leurs méchants banquiers, leurs patrons cupides, leurs politiciens vendus n’en sont pas moins, je le redis, construits avec force, ils fourmillent de détails bien vus, de personnages vraisemblables, ils sont remplis de descriptions suggestives. Avec nostalgie, on explore tous les quartiers de Venise, on entre dans des tratorie simples et familiales, on visite les îles, par tous les temps, sous différentes lumières.
Comtesse de Ségur de la gauche caviar, Donna Leon possède un incontestable savoir-faire. Pour être une romancière authentique, il lui manque seulement le sens de la complexité. »
Pour conclure, d’après le révisionniste Michel Janicot del Costillo, Donna Leon est un pur produit de la médiocrité culturelle mondialiste américaine : « Pourquoi parler de Donna Leon, auteur honorable, artisan habile et consciencieux ? Elle symbolise la dégénérescence de la littérature, sa lente glissade, son américanisation. Elle fait des produits mécaniques, reproductibles, à la fois différents et identiques, tels que les ateliers d’écriture enseignent à les faire. »