Nous continuions donc notre voyage, notre visa népalais valable un mois arrivant à expiration. (Pour ceux qui n'auraient pas suivi cette série d'articles dont celui-ci comme d'ailleurs encore quelques autres qui suivront, décrit ma première rencontre avec le continent asiatique en 1991). Nous partions de Pokhara avec la ferme intention de rejoindre Katmandou pour y passer nos derniers jours dans ce magnifique pays. Nous étions déjà passés deux fois, mais très rapidement, trop rapidement. On prenait donc cette route passant par Muglin, de nuit, toujours totalement défoncée, elle nous emmenait dans la capitale népalaise .
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Au petit matin, à notre arrivée, le reste du groupe, ingénieurs , semi-sportifs et le reste repartaient vers leur dur labeur en France. Ouf ! En effet, être parachuté dans un groupe dont on ne connait personne où l'on doit supporter les défauts de chacun pour que le voyage se passe bien n'est pas chose aisée. Je ne leur jette pas la pierre car nous devions, mon ex compagne et moi, être aussi pour eux une source de conflit renfloué ! Enfin, le destin (écrit) faisait que nos chemins se sépareraient enfin là, ce matin de novembre 1991.
Une brume épaisse et un froid de canard galbaient la ville. Nous ne serions plus que trois, Yann resterait avec nous. L'obligation d'organiser quoique soit n’étant plus de mise, nous allions nous installer dans le quartier mystique de Freak street, le lieu où dans les années soixante, nombreux hippies du monde entier se donnèrent rendez-vous. On avait bien-sur l'intention de croiser quelques rescapés de cette époque ! On en verra aucun ! On s'installa dans un lodge, « friendly home ». Un livre d'or à l’entrée du bâtiment totalement désordonné où des couloirs et escaliers à n'en plus finir auraient découragé un amateur de labyrinthe, un vrai dédale, nous montra que nous ne nous étions pas trompés d'endroit. On pouvait lire des appréciations diverses émises par des routards, petits billets datant d'avant 1970. Des adresses, des liens, des appels au secours, des rendez-vous manqués, de tout mais nous ne pourrions pas tout lire, même si l'envie fut forte, on y aurait passé le reste de la semaine. Freak street se trouve derrière Durbar Square, lieu où temples et palais s'enchevêtrent. Le quartier ne représentait à peine que deux rues où restos, boutiques en tous genres et lodges occupaient tout l'espace.
Un nouveau quartier, Thamel, à l'opposé de la ville prenait forme, Freak street devenait « hasbeen » à entendre les jeunes gamins-guides qui devaient être commissionnés pour emmener le chaland à l'autre bout de la ville, hôtels modernes et tout le toutim étaient devenus dans l'air du temps ; le tourisme de masse pourrait bientôt commencer. Le Népal voulait également se débarrasser de sa réputation de ville des hippies ou pseudo fumeurs de Shilum. Le pays convoitait ce nouveau touriste, le trekkeur, plus fortuné et plus propre sur lui (en apparence seulement). La drogue devenue illégale, les visas court-terme étaient privilégiés et l'Everest et autres sommets dont l’accès étaient depuis facilité (administrativement), la mutation pouvait donc débuter.
Enfin, il y avait de beau reste du coté de Friendly home. Le bâtiment, moderne, au fond d'une coursive collait une bâtisse moyenâgeuse comme tous les édifices du centre de Katmandou, des maisons construites telles des œuvres d'art. Tout le quartier était fait de vieilles maisons dont l’étage était de bois sculpté et de fenêtre au panneaux de bois rivalisant de virtuosité artistique. Les népalais sont talentueux et cela ne datent pas d'hier, ils travaillent le bois merveilleusement, la terre, les tissus et sont d'une ingéniosité sans limite !
Nous partagions donc une chambre à trois lits sous les toits de tôle ; je précise « de tôle » car aux aurores, chaque matin, nous étions réveillés par des pigeons, eux-mêmes s’éveillant à chaque nouveau jour, trottant, fricotant, faisant un barouf du feu de dieu sur « notre toit » et nous obligeant à nous lever tôt, mais cela nous procurerait le bonheur de profiter du lever de soleil. Nous avions désormais un bon entrainement de marcheur et nous voulions parcourir la ville et rencontrer les gens de Katmandou. Nous irions dans l'ancienne capitale Bhaktapur (à pied bien-sur), visiter le Sawanbhunat et rencontrer nos premiers babouins à cul rouge qui attendaient le moindre faux-pas des touristes montant à la stupa pour leur voler de la nourriture. Nous irions sur les ghats des crémations, un peu en dehors de la ville, lieu où les gens de la ville mais aussi de nombreux sadhus venaient se dématérialiser pour pouvoir renaitre dans de meilleurs hospices ou même pour les plus méritants, atteindre le nirvana. Nous irions donc un peu partout, adeptes de la marche ; nous découvrions une nouvelle drogue : Le sport ! Nous éviterions au maximum les extérieurs du périphérique, tout simplement pour éviter de le traverser ou de s'en approcher, totalement englué de rickshaws et véhicules en tous genres, l'endroit étaient déjà totalement pollué, irrespirable. Aujourd'hui, il paraît que c'est l'enfer. Comme des entrailles de la terre, la fumée envahit le moindre centimètre carré de la nouvelle ville. Katmandou est une cuvette (un peu comme Chiang Maï, ici en Thaïlande) et les fumées des pots d’échappements ont du mal à rejoindre l’atmosphère. Nous allions passer beaucoup de temps dans Durbar Square, assis sur les marches des nombreux temples, à contempler la vie grouillante de la vieille ville quasiment interdit d’accès à quelconque véhicule ; la taille des rues et le monde, obligeant l'endroit à être d'office « piétonnier ». Les ruelles traversant cette vieille ville étant un gigantesque marché de légumes, fruits et tout ce qui était nécessaire à la ménagère de Katmandou, mais aussi aux touristes très nombreux, enfin touristes très visibles, (je dis cela, car en INDE, on est totalement noyé dans l'espace et la foule !). On rencontrera beaucoup de tibétains, des moines bien-sur en grand nombre, les népalais que l'on croisera étant toujours là pour nous proposer un business quelconque ou une arnaque possible (j’exagère forcément mais cela n'en était pas loin).
Nous aurions aussi le privilège de voir la Kumari, dont les gens venaient se recueillir devant la fenêtre de son palais, pour les aider dans leur désir de procréation. La Kumari, une petite fille choisie presque au hasard parmi les gens de la montagne. Une condition, elle devait être vierge, pauvre et correspondre au cycle des réincarnations de la toute première princesse. Dès le premier jour de ses menstrues, elle serait remplacée par une autre jeune fille choisie par les prêtres qui géraient l'affaire, parcourant sans cesse le pays pour trouver la gamine idéale dont la date de naissance, les comportements, les signes divins devaient correspondre à la légende de cette déesse vivante. Une aubaine pour les paysans népalais qui espéraient tous que leur fille soit choisie par les prêtres...Leur conditions de vie changerait pour toujours !
On découvrait aussi la cuisine tibétaine car la cuisine népalaise,(comme je le dis dans des articles précédents) je ne parle pas de « l'international food à la mode du Népal », se cantonnait au Dal Bat ou au mieux à un semblant de cuisine indienne. Les tibétains eux emmenaient des nouveautés, des ragouts mais surtout leur fameux « momo » dont nous étions friands (les momo étant des bouchées de farce de viandes ou de légumes enveloppées d'une pâte cuite à la vapeur ou simplement frite, un peu comme des friands d’où « nous en étions friands », stop Jeff, tu divagues!).
Nous passions donc nos derniers jours aussi dans la contemplation, pas seulement à marcher (il fallait bien finir le stock d'herbe cueillit dans la montagne avant de passer la frontière indienne) ! On reviendrait l’année suivante mais sans que cela nous donnent l'envie d'y retourner...Eh ! Entre temps nous avions découvert l'Inde (comme je le dis plus haut) et comme vous le diront nombreuses personnes, si on accroche dès la première fois avec « Mother INDIA », il est difficile de s'en passer et donc d’apprécier à sa juste valeur ses pays limitrophes (en ce qui me concerne à part L'ISAN dont je suis totalement en addiction, le reste est du pipi de chat, enfin cela est un avis personnel car comme je le dis souvent et comme le disait feu mon grand-père, « les gouts et les couleurs, ça ne se discute pas »).
Nous faisions notre paquetage et décidions de nous rendre en Inde par le bus, un bus VIP et direct en plus, une nouveauté, à entendre le mec de l'agence de voyage, une nouvelle route vers l'est et pas de changement de bus à la frontière comme cela se faisait habituellement à Sonauli par la route rejoignant Gorakpur au nord de Bénarès du coté indien. Katmandou-Delhi en 36 heures à les entendre, un pur confort. Départ à 5 heures du soir de Katmandou. Inde nous te rejoindrions le lendemain aux aurores et en fin d’après-midi nous serions à Delhi. Que du bonheur, le « trip » allait pouvoir débuter !
Voici la seule photo que j'ai encore en ma possession, posant dans la chambre de «Friendly home »
PS : Le reste des photos ont été picorées sur GOOGLE (comme l'article précédent d'ailleurs) sans l'autorisation des auteurs. Si par un grand hasard, ils les reconnaitraient et n’apprécieraient pas l'association de leur photos à mon article, je les retirerais sans ciller ! A bon entendeur...
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